La découverte d’une adénopathie cervicale est fréquente en médecine générale. La plupart du temps c’est un diagnostic banal d’adénopathies réactionnelles à une complication infectieuse. Cependant, malade et médecin craignent les causes malignes, soit primitives : lymphome ou hodgkin, soit secondaires : adénopathies métastatiques. La question est centrée sur le bilan initial, à effectuer avant la biopsie, dont il faut décider du moment, ni trop tard, ni trop tôt.
CLINIQUE :
Préciser le siège, la taille en cm, la consistance, le caractère mobile ou adhérent au plan profond, douloureux ou indolore, unique ou multiple.
Tous ces caractères peuvent orienter vers une cause que l’on peut caricaturer comme :
– Petits ganglions durs et indolores → néoplasie ;
– Gros ganglions empâtés douloureux → infection.
Le diagnostic d’adénopathies est aisé lorsqu’il s’agit d’adénopathies multiples. Lorsqu’il s’agit d’une masse unique, il faut discuter :
– Selon la consistance :
• molle → lipome ,
• dure → fibrome ossifiant ,
• battante et expansive → tumeur du glomus carotidien ;
– Selon le siège :
• kyste dysembryoplasique : pôle inférieur de la parotide,
• glande sous maxillaire (lithiase) ;
– Adénopathies banales du bon répondeur immunologique, connues du malade de longue date et dont les dimensions sont inférieures à 2 cm.
Dans les cas difficiles, l’échographie peut apporter la confirmation de la nature ganglionnaire de la masse palpée et renseigne sur sa forme, son homogénéité (kyste, abcès), sa vascularisation.
L’orientation du diagnostic étiologique nécessite :
Un interrogatoire attentif :
MODE DE SURVENUE :
– Installation aiguë ou progressive.
– Circonstances de découverte :
• Infection dentaire ;
• Angine ;
• Aphtose buccale ;
• Atteinte cutanée.
– Existe-t-il des signes compressifs : dysphagie, dysphonie, toux ?
– Existe-t-il des signes généraux : fièvre, sueurs, amaigrissement ?
MODE DE VIE DU PATIENT :
– Âge, tabac +++, traitements ?
– Métier +++
– Chats (griffes du chat, toxoplasmose) ? Chasseur (tularémie) ? Poissons ?
CONTAGE RÉCENT OU ANCIEN :
– Tuberculose dans la famille.
– Contact avec les jeunes enfants ? Rubéole….
– Vie sexuelle à risque ? Syphilis, HIV.
Un examen clinique complet +++
Particulièrement de toutes les aires ganglionnaires, recherche d’une splénomégalie.
Un examen locorégional :
GÉNÉRALISTE :
Oreille (conduit auditif externe), cavité buccale (palper), cuir chevelu (mélanome, piqûre d’insecte), peau (griffures, furoncles…).
CONSULTATION SYSTÉMATIQUE PAR UN ORL :
Recherche d’une cause dans les territoires de drainages des adénopathies cervicales (sans oublier le revêtement cutané et cuir chevelu pour les adénopathies spinales).
Examens biologiques simples :
– Numération formule sanguine avec réticulocytose et étude attentive du frottis, +++ à la recherche :
• d’une hyperleucocytose par polynucléose neutrophiles ;
• d’une éosinophilie, d’une hyperlymphocytose, d’un syndrome mononucléosique.
– Bilan inflammatoire : VS, électrophorèse des protides.
– Radiographie pulmonaire.
– Bilan hépatique : TGO, TGP, phosphatases alcalines, gamma GT.
– MNI test, Dye test, Wright.
– IDR à la Tuberculine.
Adénopathies bénignes :
ADÉNOPATHIES INFECTIEUSES NON SPÉCIFIQUES :
Secondaires à une localisation ORL, souvent d’allure traînante : dents, angine bactérienne, voire phlegmon amygdalien, furoncle du conduit auditif externe, piqûres de guêpes…
ADÉNOPATHIES BÉNIGNES SPÉCIFIQUES :
– Mononucléose infectieuse (MNI) : adolescents, caractère inflammatoire des adénopathies, allure clinique aiguë, angine initiale.
NFS: syndrome mononucléosique.
– Rubéole : contage avec des enfants, adénopathies multiples et posterieures +++ ;
NFS : syndrome mononucléosique + plasmocytose.
– Primo-infestation VIH ou AIDS related complex :
Homme jeune : caractère traînant torpide des adénopathies.
Se méfier des lymphomes inauguraux ++++.
– Toxoplasmose : contage avec les chats, évolution clinique insidieuse (chronique… 2 ans).
NFS : syndrome mononucléosique + hyperéosinophilie.
– Maladie des griffes du chat = ou lymphoréticulose bénigne d’inoculation.
Contage ? Chancre d’inoculation disparu ? Fistulisation des adénopathies.
– Tuberculose ganglionnaire : transplanté, contage familial.
Caractère des adénopathies évoluant vers la fistulisation.
– Brucellose : agriculteurs, adénopathies multiples surtout axillaires, fermes peu douloureuses, température sudoro-algique.
– Tularémie : contacts avec le gibier, caractère douloureux de l’adénopathie, évoluant vers la fistulisation.
Point d’inoculation ? Conjonctivite souvent associée. Sérologie.
– Syphilis :
• primitive = adénopathie unique, chancre d’inoculation buccal = amygdale, adénopathie unilatérale nécrotique.
• secondaire = adénopathies multiples, roséole associée.
ADÉNOPATHIES NON INFECTIEUSES INFLAMMATOIRES :
– Sarcoïdose :
• Siège cervical bas, radiographie pulmonaire, adénopathies médiastinales associées ;
• Diagnostic confirmé par biopsie.
– Polyarthrite rhumatoïde : diagnostic évoqué sur le contexte clinique. Ne pas biopsier.
– Maladie de Whipple : troubles digestifs associés.
– Adénopathies immunologiques : toxiques +++.
– Kikuchi (lymphadenite nécrosante) : femme jeune, fièvre, adénopathies traînantes cervicales.
Diagnostic confirmé par biopsie.
Étiologies malignes primitives : hémopathies
MALADIE DE HODGKIN :
– Caractère asymétrique des adénopathies, évolution par poussées : une adénopathie qui régresse n’est pas toujours bénigne +++.
– Fièvre + prurit + syndrome inflammatoire.
– Adénopathies médiastinales.
– IDR négativée.
→ Biopsie rapide +++
LYMPHOMES NON HODGKINIENS :
Tableau identique, mais :
– croissance + rapide
– polyadénopathie ou adénopathie très volumineuse.
Importance de la qualité de la biopsie avec congélation +++++.
→ Biopsie rapide +++
LEUCÉMIE LYMPHOÏDE CHRONIQUE :
Diagnostic évoqué après 50 ans devant :
– une polyadénopathie symétrique associée avec splénomégalie ;
– diagnostic confirmé par NFS + phénotype des lymphocytes périphériques.
→ Biopsie inutile +++ sauf pour éliminer un syndrome de Richter sur une masse ganglionnaire asymétrique à croissance plus rapide.
LEUCÉMIE AIGUË :
– Adénopathie rarement révélatrice.
– Diagnostic porté par NFS.
Étiologies malignes secondaires : métastases ganglionnaires
ADÉNOPATHIES MALIGNES MÉTASTATIQUES :
« Petite lésion – grosses adénopathies »
– Cancers digestifs : ganglion de Troisier
– Cancers médiastinaux : ganglion sus claviculaire droit
– Cancers ORL :
• langue mobile : ganglion de Küttner ;
• base de la langue : jugulaire bas ;
• amygdale : jugulocarotidien haut ;
• cavum : occipital ;
• oreille, larynx : spinal.
Ne pas oublier la palpation de la thyroïde.
RÉALISER UN BON EXAMEN ORL +++ EN SE MÉFIANT :
– des plis de l’orifice tubaire ;
– des reliefs du sillon amygdaloglosse ;
– du sinus piriforme.