GÉNÉRALITÉS :
Le genre Bacillus comprend des bactéries en forme de bâtonnets, généralement mobiles, sporogènes. Ces bacilles sont à Gram positif, aérobies stricts ou anaérobies facultatifs.
Le genre Bacillus comprend une vingtaine d’espèces, mais on s’intéresse essentiellement à B. anthracis, en raison de son pouvoir pathogène (animaux, homme) et à B. cereus (intoxication alimentaire).
Néanmoins, depuis quelques années, de nombreuses publications rendent d’autres espèces de Bacillus responsables d’infections chez les immunodéprimés (bactériémies, méningites, méningo-encéphalites, pneumonies, endocardites).
I – CLASSIFICATION ET NOMENCLATURE :
Les espèces du genre Bacillus sont classées sur leur morphologie et la position de leurs spores. Cette classification divise le genre Bacillus en 3 groupes :
– Groupe 1 Bacilles à spores ne déformant pas le corps microbien,
– Groupe 2 Bacilles à spores déformantes, ovales,
– Groupe 3 Bacilles à spores déformantes, rondes.
A l’intérieur de ces groupes, les espèces et les variétés se distinguent par des caractères morphologiques et physiologiques.
II – PRINCIPAUX CARACTÈRES DU GENRE BACILLUS :
A – Morphologie :
Mobile par ciliature péritriche, à contrôler à partir d’un bouillon (B. anthracis est toujours immobile).
La coloration de Gram théoriquement positive peut être négative (le groupe 1 garde mieux la coloration).
La coloration simple à la fuchsine diluée permet de mieux apprécier les formes, les dimensions, la présence de vacuoles cytosplasmiques dues à des inclusions lipidiques.
Les Bacillus sont rarement capsulés, sauf B. anthracis dans certaines conditions.
Une gélose sans peptone est le milieu le plus favorable à la sporulation. La spore mûre est ovale ou ronde. Son diamètre est inférieur ou supérieur à celui du bacille. Sa localisation est centrale, paracentrale, subterminale ou terminale. Dans certaines espèces il existe des inclusions parasporales. Parfois on note la présence de cristaux de protéines.
La résistance aux agents physico-chimiques est faible pour les formes bacillaires, facilement tuées par le vieillissement et la chaleur (1 h à 55°C) et les antiseptiques.
Elle est plus élevée pour les spores (40 mn à 120°C). B. subtilis compte parmi les plus résistants.
B – Caractères culturaux :
La plupart des espèces se développent mieux à 28-33°C qu’à 37°C, mais beaucoup d’espèces tolèrent des différences thermiques marquées.
Les déterminations des températures seuil de croissance sont réalisées sur gélose inclinées incubées au bain marie.
Les milieux de culture usuels permettent la croissance de la plupart des espèces du genre Bacillus.
Les espèces ont chacune leurs exigences propres et souvent relativement homogènes : utilisation d’azote ammoniacal pour les uns, des acides aminés pour les autres, etc…
Les milieux favorables ou hostiles utiles pour l’identification sont :
– gélose nutritive à pH 6,
– pomme de terre : culture ou non,
– bouillon hypersalé.
C – Caractères biochimiques généraux :
Métabolisme respiratoire catalase (+), oxydase (±) aérobies stricts ou anaérobiose facultative suivant les espèces.
Nitrate réductase
Elle est présente ou non suivant l’espèce.
Attaque des hydrates de carbone
En milieu complexe, l’acidification est souvent masquée. Il faut donc employer un milieu minéral gélose (milieu de Smith, Gordon, Clark), enrichi d’extrait de levure.
L’acidification ou non du glucose, arabinose et xylose suffisent généralement pour l’identification.
Production d’acétoïne (acétyl-méthyl-carbinol)
Sa production sur le milieu usuel de Clark et Lubs n’est pas toujours bonne. Il vaut mieux utiliser un milieu glucose, peptoné sans phosphate. La température favorable à la production varie suivant les espèces (32°C, 37°C et 45°C).
Autres caractères à étudier
– Hydrolyse de l’amidon, de la caséine, de la gélatine,
– Hydrolyse de la lécithine ; B. subtilis possède une phospholipase qui hydrolyse la lécithine en diglycéride et phosphorylcholine (opacification). Souvent, la réaction est R (= restreinte), c’est à dire très localisée sous la culture. Il faut donc parfois enlever les colonies pour la mettre en évidence.
– Indole : rarement positive.
– Uréase.
BACILLUS ANTHRACIS
HISTORIQUE :
B. anthracis est responsable du « charbon », connu depuis l’antiquité.
1823 : Barthélémy procède à la première transmission expérimentale à des moutons.
1848 – 1850 : Rayer et Davaine décèlent dans le sang « charbonneux » des « petits corps filiformes ».
1860 Delafond réalise la culture de la bactérie.
1880 Pasteur, Roux et Chamberland atténuent la bactérie par la chaleur.
1881 Expérience de Pouilly-Le-Fort : Pasteur prouve l’efficacité de son vaccin anti-charbonneux.
I – HABITAT :
La spore confère une très grande résistance dans les milieux extérieurs. Ce sont des germes telluriques mais que l’on rencontre aussi dans l’eau et dans l’air.
B. anthracis est largement distribué dans le monde. Les animaux malades disséminent le germe ; le sol constitue le réservoir (champs, étables, prés) ; les cadavres et les produits d’origine animale (peaux, poils, os,…) participent à la pollution des terrains et peuvent contaminer l’homme.
II – CARACTÈRES BACTÉRIOLOGIQUES :
A – Morphologie et structure :
Gros bacille (5-6 µm x 1 n.m). Immobile (différent des autres Bacillus).
Dans les produits pathologiques, il se présente sous forme de courtes chaînettes.
En culture : chaînes longues en « canne de bambou » Gram positif. Extrémités carrées.
1. La capsule :
Les souches virulentes de B. anthracis sont capsulées. La capsule n’est produite in vivo ou en culture que dans certaines conditions (sang, sérum, bicarbonate de sodium, CO2). Les souches non-capsulées sont avirulentes.
2. La spore :
Elle est ovoïde, non déformante. B. anthracis appartient au groupe 1.
La sporogénèse se fait en présence d’O^, entre 18°C – 42°C et en atmosphère humide, dans des milieux pauvres, sans peptone.
B – Caractères culturaux :
B. anthracis se développe bien sur milieux usuels.
Anaérobie, il préfère la présence d’oxygène. Température optimum : 30°C – 35°C (15°C – 43°C) ; pH 7 – 7,4 (6 – 8,5).
Sur gélose nutritive inclinée, les colonies sont R à contours irréguliers. Sur gélose au sérum, les colonies sont S (en raison de la production d’une capsule).
• En bouillon ordinaire et en eau peptonée : formation de flocons au fond du tube avec surnageant clair.
C – Caractères biochimiques :
1. Pouvoir protéolytique :
II est peu marqué.
La liquéfaction de la gélatine en culot, après piqûre est lente.
Elle donne un aspect en « sapin renversé ».
Le lait est coagulé lentement et digéré lentement.
Sérum liquide : gélification puis liquéfaction.
Sérum coagulé : digestion lente.
L’hémolyse est légère et apparaît lentement.
2. Pouvoir glucidolytique :
II fermente : glucose, maltose, saccharose, lévulose, tréhalose et dextrine.
Lactose (-), galactose (-), arabinose (-).
Les autres sucres sont attaqués de manière inconstante.
3. B. anthracis ne possède nipénicillinase, ni uréase :
Il est H2S (-). Les nitrates sont réduits en nitrites.
D – Produits élaborés :
B. anthracis élabore la toxine charbonneuse. C’est une toxine de nature protéique, qui est composée de 3 protéines distinctes : le facteur 1 = facteur oedématogène (adénylate-cyclase), le facteur II = antigène protecteur, le facteur III = facteur létal (PM = 82 000).
Les facteurs II et III doivent être associés pour entraîner la mort de la souris, du rat ou du cobaye. L’injection intradermique des facteurs 1 et II entraîne des lésions cutanées chez le cobaye et le lapin.
L’action toxique des diverses souches peut varier suivant la production respective de ces 3 facteurs, et ainsi, certaines souches sont très oedématogènes et d’autres peu.
La production de la toxine répond à un déterminisme plasmidique.
E – Structure antigénique :
1. La capsule :
Elle est polypeptidique et intervient dans la virulence de la bactérie. Elle empêche la phagocytose, inhibe le pouvoir bactéricide du sérum et rend le sang incoagulable.
Les anticorps anticapsulaires ne sont pas protecteurs chez l’homme.
2. Les antigènes somatiques :
Ils peuvent être étudiés par réaction de précipitation (réaction d’Ascoli).
3. La toxine :
Elle provoque la formation d’anticorps neutralisants. Il existe des communautés antigéniques entre B. anthracis et certains autres Bacillus, mises en évidence par immunodiffusion (ex. avec B. subtilis, B. megaterium et B. cereus).
F – Lysotypie :
B. anthracis est sensible à différents bactériophages. La lysotypie peut être utilisée dans le diagnostic différentiel entre B. cereus et B. anthracis :
– phages du groupe A actifs sur B. anthracis, inactifs sur B. cereus
– phages du groupe AC actifs sur B. anthracis et B. cereus
– phages du groupe C inactifs sur B. anthracis, actifs sur certains B. cereus.
III – POUVOIR PATHOGÈNE NATUREL :
A – Chez les animaux :
On distingue des formes subaiguës, aiguës et suraiguës. Le charbon peut être « interne » ou plus rarement « externe ». Les formes cliniques varient suivant les espèces animales :
Mouton : forme suraigue (mort en quelques heures)
Cheval et Boeuf : forme aiguë (souvent fatale en 1 à 2 jours)
Porc : charbon externe forme subaiguë (oedème de la gorge).
Dans le charbon interne animal, les lésions macroscopiques sont celles d’une septicémie. Le sang est noir, poisseux, incoagulable ; on observe une splénomégalie et une hématurie. Dans le charbon externe, on note une tumeur centrée sur un paquet ganglionnaire.
Les lésions microscopiques sont représentées par une accumulation de bacilles dans les capillaires.
B – Chez l’homme :
1. Charbon externe :
Le charbon est rarement rencontré chez l’homme en France, mais on estime qu’il y a au niveau mondial chaque année entre 20 000 et 100 000 cas de charbon (Afrique, Asie surtout).
La lésion typique est la « pustule maligne », qui siège au point de pénétration du bacille (main, bras, face).
Cette papule érythémateuse évolue vers une vésicule, puis un escarre noirâtre lui succède. L’évolution est le plus souvent favorable. Très rarement, il y a apparition d’un « oedème malin » envahissant.
Le charbon cutané est une maladie professionelle (fermiers, vétérinaires, bouchers, mégissiers…).
2. Le charbon interne :
II est rare. Il peut prendre différentes formes :
– la forme pulmonaire : par inhalation de poussières après contact avec de la laine,
– la forme gastro-intestinale : après ingestion de viande contaminée,
– la méningite charbonneuse.
Ces formes ont un pronostic beaucoup plus sombre et conduisent souvent à la mort, parfois avant d’avoir instauré une thérapeutique efficace.
IV – POUVOIR PATHOGÈNE EXPÉRIMENTAL :
Le cobaye est très sensible à B. anthracis. Après inoculation, la mort survient en deux jours environ.
V – PATHOGÉNIE ET IMMUNITÉ :
Après pénétration dans les tissus, les spores germent et donnent naissance à des bacilles qui s’encapsulent, se multiplient et pénètrent dans les ganglions lymphatiques afférents. Cette rétention ganglionnaire est temporaire puis les bacilles passent alors dans le sang (bactériémie). La rate fixe les bacilles. Lorsque sa capacité de fixation est dépassée, les bacilles se déversent massivement dans le sang et s’y multiplient (septicémie tardive).
La mort est due à l’action de la toxine charbonneuse. L’injection de toxine charbonneuse au cobaye produit des troubles analogues.
Après la guérison, le sujet possède des anticorps protecteurs induits par le facteur II. Les souches non-capsulées, de virulence modérée, produisent de la toxine et sont vaccinantes.
VI – ÉPIDÉMIOLOGIE :
Le charbon existe pratiquement dans toutes les parties du monde, mais surtout en Asie et en Afrique. Il existe des fluctuations saisonnières de l’incidence de la maladie avec un maximum en été, notamment durant les étés chauds et secs.
A – Les matières virulentes :
Ce sont principalement les animaux malades et leurs produits de sécrétion et d’excrétion.
Les cadavres sont des sources de bacilles. La virulence des cadavres non autopsiés disparait en quelques jours car la spore ne peut pas se former.
Peaux, poils, crins, laine sont dangereux pour l’homme.
Sang, muscles, os (farines, poudres) sont dangereux pour l’animal et l’homme.
Le sol souillé est un réservoir important et permanent (80 ans).
Les spores enfouies peuvent être ramenées en surface par les vers de terre ou les inondations.
B – Réceptivité :
Les espèces animales n’ont pas la même réceptivité. Par ordre décroissant de réceptivité, on trouve les herbivores, les omnivores, les carnivores, les oiseaux.
Chez l’homme, la profession est déterminante. Le charbon est une zoonose professionnelle (tanneurs, bouchers, dockers).
C – Modalité de la transmission :
1. Infection des animaux :
Elle se fait essentiellement par voie digestive (ingestion d’herbes, de fourrages, de viandes polluées).
Il y a donc des possibilités de contamination locale (prés, champs maudits) ou à distance (transmission par oiseaux). Le commerce de poudre d’os importée de pays où le charbon est fréquent (Inde) peut amener l’apparition du charbon animal dans des régions indemnes.
2. Infection de l’homme :
Elle se réalise par voie cutanée. Elle atteint : éleveurs, vétérinaires, ouvriers d’abattoirs et d’équarrissage, bouchers, tanneurs, dockers. En dehors de cet aspect professionnel, il peut survenir une contamination accidentelle (ingestion de viande provenant d’animaux malades).
VII – DIAGNOSTIC BACTÉRIOLOGIQUE :
II est souvent orienté par l’épidémiologie : région (animaux) ou profession (homme).
A – Prélèvements :
1. Animal :
– Fragments d’organes,
– Os long,
– Os broyés, aliments composés, peaux,…
2. Homme :
– Prélèvement de lésion ou de pustule,
– Sang, LCR …
B – Examens bactériologiques :
1. Frottis de sang ou d’organe :
Présence de bacilles volumineux, en petites chaînes.
A la coloration de Gram, B. anthracis apparaît comme de grands bacilles, à bouts plats (3-5 u.m / 1-1,25 u.m). Il apparaît comme de courtes chaînettes dans les échantillons biologiques. Les spores sont rarement présentes.
2. Culture :
a/ Prélèvement monomicrobien :
Milieux usuels (bouillons d’hémoculture, gélose au sang…)
b/ Prélèvement polymicrobien :
Avec des prélèvements polymicrobiens (ex. aliments composés…) on sélectionne les spores de B. anthracis par chauffage à 80°C, 5 mn avant l’ensemencement.
Milieux sélectifs
– Milieu de Pearce et Powell : gélose nutritive à 40 u.g/ml d’hématine et 60 u.g/ml de lysozyme, incubée à 40°C.
– Milieu de Knisely : gélose à l’extrait de coeur à 30 U/ml de polymyxine, 40u.g/ml de lysozyme, 300 u.g/ml d’EDTA et 40 u.g/ml d’acétate de thallium.
En culture, les chaînes sont plus longues (cannes de bambous). Présence d’une spore centrale à subterminale non déformante.
Sur gélose au sang, on observe des colonies non hémolytiques. Les colonies sont du type R sur gélose au sang, TSA ou gélose nutritive, en forme de « tête de méduse ».
Elles sont non-capsulées.
La sub-culture doit être faite sur un milieu contenant 0,5 % de bicarbonate de sodium et incubée dans 5 % de CO2. Les souches virulentes produisent alors une capsule, et les colonies deviennent muqueuses. Cette formation de capsule est favorisée par addition au milieu de 0,7 % de sérum-albumine bovine.
Des anticorps fluorescents peuvent être utilisés pour détecter les bacilles encapsulés directement dans les tissus, sur les cultures, ou sur un frottis sanguin. (Les anticorps monoclonaux et polyclonaux anti-capsule sont disponibles au CDC).
On peut identifier directement les colonies de B. anthracis sur la gélose. Un anticorps anti-toxine (Facteur II) est déposé dans un puits à 5 mm d’une colonie suspecte. Après une nuit à 4°C on observe une bande de précipitation entre la colonie et l’immunsérum.
B. anthracis peut également être identifié à l’aide de galeries d’identification miniaturisées prêtes à l’emploi.
C – Diagnostic différentiel avec les autres Bacillus :
1. L’un des éléments de base est le caractère de mobilité :
B. cereus et B. thuringiensis sont mobiles. B. anthracis est immobile.
2. B. anthracis est sensible à la pénicilline, pas les autres Bacillus :
3. La vitesse d’hydrolyse du para-nitro-phényl-glucopyranoside :
ou maltoside par B. anthracis est augmentée par la présence dans le milieu de 1 % de Triton X-100, alors qu’elle est retardée pour B. cereus, B. mycoides ou B. thuringiensis.
4. La sensibilité au bactériophage gamma :
Seul B. anthracis y est sensible.
Le diagnostic différentiel entre B. anthracis et B. cereus peut être complété par les caractères suivants :
E – Inoculation à l’animal :
Le pouvoir pathogène expérimental est précieux pour apporter un diagnostic de certitude. On utilise le cobaye (600 g), dont on rase les flancs et sur lesquels on fait des scarifications. Le prélèvement (polymicrobien, c’est à dire : aliments composés, morceau de cadavre,…) est alors déposé sur la peau.
Lorsque le prélèvement est monomicrobien (étude d’une souche), l’injection se fait par voie sous-cutanée.
L’animal meurt dans une attitude naturelle, on recherchera le bacille du charbon sur des frottis d’organes (rate).
F – Diagnostic indirect :
1. Réaction d’Ascoli :
On révèle les antigènes polysaccharidiques thermostables de B. anthracis dans un prélèvement par une réaction de précipitation avec un sérum anti-charbonneux.
Technique : Le fragment d’organe est broyé au mortier avec 5 à 10 fois son poids d’eau physiologique, chauffé à 100°C pendant 5 minutes et filtré. Dans un capillaire on dépose du sérum anti-charbonneux, puis le filtrat sans mélanger. Un précipité se forme à l’interface lorsque la réaction est positive.
2. Recherche d’anticorps anti-Bacillus :
Chez les convalescents du charbon par précipitation ou fixation du complément
3. Allergie :
On peut mettre en évidence un état d’allergie à B. anthracis par injection intra-dermique de 0,1 ml « d’anthraxine ». On observe une réaction locale au bout de 24 heures.
VIII – TRAITEMENT :
Animal : pénicilline
Homme : pénicilline + sérothérapie dans les cas graves. Les résistances à la pénicilline sont exceptionnelles.
Streptomycine et tétracyclines ont été proposées.
En cas d’oedème malin ou de « charbon interne » la pénicilline G doit être administrée à fortes doses (20 millions UI/j chez l’adulte).
IX – PROPHYLAXIE :
A – Prophylaxie sanitaire :
Elle est difficile et illusoire en raison de la persistance des spores dans les terres polluées. On peut simplement essayer de ne pas créer de nouvelles zones dangereuses en surveillant les importations d’animaux et de produits d’origine animale en provenance de pays ou de régions infectés, ou en les traitant par différentes techniques (chaleur, rayons gamma, sulfure de sodium). En région infectée, on doit détruire les cadavres d’animaux charbonneux par incinération ou enfouissement dans des fosses contenant de la chaux vive. La prophylaxie de la maladie humaine est liée à celle de la maladie animale.
B – Prophylaxie médicale :
Chez l’animal, la prophylaxie du charbon repose sur l’injection annuelle d’une suspension de spores d’une souche atténuée non-capsulée de B. anthracis en présence d’adjuvant.
Chez l’homme, les essais de vaccination n’ont pas dépassé le stade expérimental.
Le succès de la lutte contre le charbon animal repose sur une vaccination régulièrement appliquée aux espèces sensibles en zone polluée, associée à des mesures sanitaires de destruction des cadavres en cas d’apparition de la maladie. Cette maladie figure en France dans la liste des maladies animales réputées contagieuses et dans la liste des maladies professionnelles indemnisables pour les professions exposées.
BACILLUS CEREUS
GÉNÉRALITES :
Bacillus cereus appartient au Groupe 1 du genre Bacillus. Gram (+), aéro-anaérobie facultatif, mobile (±), nitrate (+), catalase (+), mannitol (-) (cf. B. anthracis). Il cultive entre 10 et 45°C avec un optimum à 30-35°C (voir caractères généraux du genre Bacillus).
Ce germe est largement répandu dans la nature, dans l’air et le sol, il peut contaminer les aliments par ses spores.
B. cereus est responsable d’intoxications alimentaires après prolifération massive du germe dans un aliment contaminé.
Deux types d’intoxication sont décrits :
– Le premier type, correspondant à la production d’entérotoxine in vivo, ressemble à une toxi-infection due à Clostridium perfringens : après une incubation de 8 à 16 h, il apparaît une diarrhée profuse, accompagnée de douleurs abdominales, de nausées. Les symptômes régressent en 24 h.
– Le deuxième syndrome, correspondant à l’ingestion d’entérotoxine préformée dans l’aliment, est caractérisé par des vomissements très violents : l’incubation peut être courte (30 mn à 5 h). La régression des signes cliniques est également rapide.
I – TOXINES ET ENZYMES SÉCRÉTÉES :
B. cereus produit des toxines et des enzymes variées, des hémolysines dont l’une d’elle est la céréolysine, des protéases, des phospholipases. Les enzymes expliquent le caractère fulminant de certaines infections occulaires dues à B. cereus. B. cereus produit également des toxines plus spécifiques quant à leur action sur le tube digestif.
A – Une entérotoxine protéique de 50 kDa, encore appelée « toxine diarrhéigène » :
„ Cette toxine agit directement sur le tractus digestif. Elle modifie la perméabilité vasculaire et provoque une accumulation liquidienne dans la lumière intestinale. Elle possède une action nécrotique et une action cytotoxique. Elle est antigénique et thermolabile.
B – Une toxine, encore appelée toxine émétisante de 5 kDa :
Elle n’est pas antigénique et thermostable. Sa production serait caractéristique de certaines souches, liée au stade de la sporulation et non produite au delà de 40°C.
II – RISQUES D’ORIGINE ALIMENTAIRE :
A – Les sources de germes :
B. cereus est un saprophyte de l’homme et de l’animal. Il est fréquent dans le sol, sur les végétaux, les épiées, les céréales (particulièrement le riz).
B – Aliments incriminés :
De nombreux aliments peuvent être à l’origine des intoxications : viandes, légumes crus ou cuits, préparations à base de viande et de végétaux, pasta, sauces (sauces tomates instantanées), soupes, laits, crème à la vanille, purées de pomme de terre déshydratées (consommées après une conservation plus ou moins longue). Dans le cas de syndromes diarrhéiques, les taux de contamination des aliments par B. cereus sont voisins de 107 à 109 germes/gramme.
Cette multiplication des germes est due à des conditions de conservation inadaptées. Le riz préparé à l’avance, réchauffé à une température trop basse pour tuer les spores, après une période de conservation à température ambiante pouvant atteindre 2 à 3 jours est considéré comme l’aliment caractéristique à l’origine de vomissements (saison chaude, cuisine orientale).
A noter qu’en France, sur 611 épisodes d’intoxications alimentaires identifiés en 1989, B. cereus n’a été identifié qu’une fois, mais sa place dans cette pathologie est sûrement sous estimée. Elle représente néanmoins 5 % des cas d’intoxications alimentaires aux USA.
III – DIAGNOSTIC :
L’isolement de B. cereus dans les selles n’est pas suffisant.
Le diagnostic bactériologique est basé sur la numération des germes dans l’aliment et sur l’identification de l’espèce B. cereus.
Les milieux de dénombrement et d’isolement utilisent les propriétés les plus caractéristiques de la bactérie : propriétés hémolytiques, présence d’une gélatinase, d’une lécithinase, résistance à la polymyxine, absence d’action sur le mannitol. Ces propriétés sont utilisées conjointement dans un milieu à base de jaune d’oeuf, de mannitol et de polymyxine. Ces épreuves suffisent pour un diagnostic présomptif.
La confirmation de B. cereus doit être faite par d’autres caractères : mobilité du germe, l’hémolyse (alpha ou bêta), et la résistance à la pénicilline (B. anthracis est sensible à la pénicilline).
B. cereus est différencié de B. mycoides par des tests d’agglutination de lectines : B. cereus n’est agglutinable que par les lectines de soja, alors que B. mycoides est également agglutiné par des lectines d’Hélix pomatia.
Enfin une classification sérologique, basée sur la spécificité des antigènes flagellaires permet de mettre en évidence la prédominance de certains sérotypes dans les cas d’intoxication, le sérovar 1 est le plus souvent isolé, sans doute en raison de sa plus grande résistance à la chaleur.
IV – TRAITEMENT ET PROPHYLAXIE :
Un traitement n’est pas justifié, tout au plus un anti-émétique peut être nécessaire.
La prophylaxie de cette intoxication est d’une part un problème d’hygiène alimentaire collective où l’utilisation de produits déshydratés se développe (cuisines, restaurants) et d’autre part d’hygiène industrielle dans le domaine agro-alimentaire.
BACILLUS OPPORTUNISTES
D’autres espèces de Bacillus peuvent parfois jouer le rôle de germes opportunistes et on sait que durant ces dernières années, une augmentation significative des infections nosocomiales a été constatée. Traditionnellement, dans un laboratoire de bactériologie, ces Bacillus étaient, peut-être hâtivement, assimilés à des contaminants de la peau ou de l’air. Actuellement, on est parfois amené à leur accorder de l’importance dans une large variété d’infections (Tableau III) où cependant il faut bien préciser le terrain (immunodéprimés, cancers) et faire la preuve de la responsabilité du Bacillus, en particulier lors d’isolements répétés dans un produit normalement stérile. Ont été impliqués dans diverses manifestations : B. brevis, B. circulans, B. macerans, B. licheniformis, B. coagulons, B. pumilus, B. sphaericus, B. thuringiensis, B. subtilis.
Récemment des auteurs américains ont tout particulièrement insisté sur la progression des endophtalmies à Bacillus (B. cereus, B. subtilis…).
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