En 1906, Haelberstaeder et Von Prowazek découvrent des inclusions dans les frottis conjoncdvaux de trachomateux.
En 1964 Moulder montre que ces microorganismes sont des bactéries à développement intracellulaire. Elles ont été désignées tour à tour sous les noms de : Bedsonia, Myagawanella, néorickettsies…
L’ordre des chiamydiales (du grec = petite casaque) comprenant la seule famille des Chiamydiaceae a été créé. Les Chlomydiaceae ont été séparées des rickettsies en 1970.
I – CLASSIFICATION :
Le genre Chiamydia, au sein de la famille des Chiamydiaceae, regroupe trois espèces : Chlamydia trachomatis, Chlamydia psittaci et Chlamydia pneumoniae , antérieurement désignée comme « souches TWAR » (tableau I).
II – HABITAT ET TRANSMISSION :
1. Chlamydia psittaci infecte les oiseaux et les mammifères. La bactérie est éliminée en abondance dans les fèces des animaux infectés (oiseaux, chats…) et elle est alors présente dans l’environnement. La transmission se fait surtout par voie aérienne par inhalation de poussières contaminées.
2. Chlamydia pneumoniae, infecte uniquement l’homme et la contamination interhumaine se fait par voie aérienne avec survenue d’épidémies dans des communautés.
3. Chlamydia trachomatis, a pour hôte exclusif l’homme. Les sérovars A, B, Ba et C responsables du trachome sont transmis le plus souvent indirectement par les mains souillées, les objets, les mouches. Par contre les souches responsables d’infections uro-génitales ou de la lymphogranulomatose vénérienne sont transmises par les relations sexuelles. Les infections oculaires de l’adulte dues à ces souches sont souvent associées à une infection génitale. Le nouveau-né s’infecte au moment de l’accouchement.
III – PHYSIOPATHOLOGIE :
Les Chiamydia sont des parasites intracellulaires obligatoires qui dépendent, pour leur métabolisme énergétique, de la cellule hôte. Ils se fixent à la surface des cellules sur des récepteurs spécifiques, puis il se produit une endocytose. La vacuole ainsi formée ne fusionne pas avec les lysosomes. La multiplication de la bactérie se fera à l’intérieur de cette vacuole.
Les sérovars A à K de Chlamydia trachomatis ne se développent que dans les épithéliums cylindriques : ils sont responsables d’infections locales. Les sérovars Ll, L2 et L3 envahissent les tissus lymphoïdes et se multiplient dans les macrophages.
Chlamydia psittaci se multiplie dans les macrophages et est responsable d’infections généralisées.
Les phénomènes immunitaires mis en jeu dans les infections à Chiamydia sont assez mal connus. L’immunité humorale n’empêche pas les recontaminations et l’immunité cellulaire est mal connue. Alors qu’un premier contact avec la bactérie ne donnerait qu’une atteinte bénigne, la répétition des infections chez un même patient serait responsable des symptômes graves observés (salpingites par exemple).
IV – POUVOIR PATHOGÈNE :
A – Chlamydia psittaci :
est responsable de la psittacose. C’est une infection pulmonaire de gravité variable, parfois compliquée de manifestations neurologiques (encéphalite).
B – Chlamydia pneumoniae :
provoque des infections broncho-pulmonaires, en général bénignes, survenant surtout chez l’adolescent et l’adulte jeune, mais aussi chez les personnes âgées. Ces infections peuvent être graves sur terrain débilité.
C – Chlamydia trachomatis :
1. Le trachome :
C’est une maladie endémique dans les zones inter-tropicales. Liée à la malnutrition, au sous-développement et au manque d’hygiène, elle frappe surtout les enfants. Le trachome touche environ 500 millions d’individus dans le monde et c’est la principale cause de cécité. La maladie est bénigne, mais les infections multiples favorisent l’entretien des lésions et les surinfections bactériennes aboutissant à la destruction de la cornée.
2. Les Maladies Sexuellement Transmises :
La lymphogranulomatose vénérienne ou maladie de Nicolas Favre est surtout observée dans les pays en voie de développement. Elle débute par un petit chancre indolore, spontanément résolutif, génital ou anal. L’infection des ganglions satellites va se traduire par une adénite avec fistulisation pouvant évoluer vers la chronicité.
Les lésions rectales peuvent entraîner un rétrécissement du rectum.
Les autres infections vénériennes dues aux sérovars D à K sont fréquentes dans le monde entier, 75 % des cas concernent les jeunes adultes avant 25 ans dont 10 % au moins seraient infectés. Transmises par les relations sexuelles elles se traduisent :
– chez l’homme par une urétrite subaiguë, survenant 10 à 60 jours après un rapport contaminant. Cette urétrite est souvent asymptomatique. Chlamydia trachomatis est le principal responsable d’épididymite aiguë. Des prostatites chroniques et des rectites sont également possibles.
– chez la femme, l’infection se traduit par une cervicite souvent discrète. Celle-ci peut se compliquer de salpingite, de péritonite (syndrome inflammatoire pelvien, péri-hépatite ou syndrome de Fitz-Hugh-Curtis). Ces infections hautes sont responsables de stérilités et de grossesses extra-utérines.
Chlamydia trachomatis a également été impliqué dans le déclenchement de syndromes de Fiessinger-Leroy-Reiter (atteintes urétrales, conjonctivales et synoviales) plus fréquent chez les sujets masculins appartenant au groupe HLA B 27.
– les infections du nouveau-né surviennent au moment du passage dans la filière génitale infectée. Elles se traduisent par une conjonctivite survenant dans les 5 à 15 jours après l’accouchement ou par une pneumonie observée après 1 à 3 mois.
V – CARACTÈRES BACTÉRIOLOGIQUES :
A – Morphologie :
Ce sont des bactéries (elles contiennent ADN et ARN) immobiles à Gram négatif.
Elles possèdent une membrane externe, contenant un lipopolysaccharide, mais sans acide muramique. La bactérie se présente sous deux formes :
– Les corps élémentaires, particules infectieuses, qui n’ont aucune activité métabolique. Ils sont de petite taille (0,3 pm), sphériques (Chlamydia trachomatis, Chlamydia psittaci) ou en forme de poire (Chlamydia pneumoniae) avec un appareil nucléaire condensé en périphérie du cytoplasme.
– Les corps réticulés, formes métaboliquement actives, intracellulaires, qui se multiplient par division. De taille plus importante (environ 1 p.m) ils n’ont pas de structure membranaire rigide. L’appareil nucléaire forme dans le cytoplasme une trame lâche. En fin de cycle, ils se transforment en corps intermédiaire qui donne ensuite les corps élémentaires. Ceux-ci s’accumulent au centre de la vacuole intracytoplasmique.
Avec Chlamydia trachomatis, une seule vacuole est présente dans la cellule, volumineuse, elle repousse le noyau en périphérie. Elle renferme relativement peu de corps bactériens et contient du glycogène. Par contre avec Chlamydia psittaci et Chlamydia pneumoniae, il peut y avoir plusieurs inclusions en même temps. Celles-ci sont denses et ne déforment pas le noyau.
En fin de cycle ces inclusions se rompent et libèrent les corps élémentaires qui vont à leur tour infecter de nouvelles cellules. Le cycle de multiplication in vitro varie de 36 heures pour Chlamydia psittaci à 72 heures pour Chlamydia trachomatis et Chlamydia pneumoniae.
B – Structure antigénique :
La structure antigénique des Chiamydia est complexe et les antigènes ont des spécificités de genre, d’espèce et de type (Tableau II).
1. Les antigènes de genre :
N’existe un lipopolysaccharide commun aux trois espèces, présent dans la paroi externe et thermostable. Il présente des analogies de structure avec celui de Salmonella ainsi que des réactions antigéniques croisées avec les formes rough.
2. Les antigènes d’espèces :
Le plus important est la protéine majeure de membrane externe qui jouerait un rôle de porine ; elle permet de différencier les espèces entr’elles et est utilisée pour l’élaboration d’anticorps monoclonaux.
3. Les antigènes spécifiques de types :
Ils permettent de différencier les 15 sérotypes de Chlamydia trachomatis et les multiples sérovars de Chlamydia psittaci. Jusqu’à présent, un seul sérovar de Chlamydia pneumoniae est connu.
VI – DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE :
A – Les prélèvements :
La qualité du prélèvement conditionne le résultat de la recherche de Chiamydia. Il est important de ramener des cellules qui contiennent les corps bactériens ce qui est réalisé par un grattage de la muqueuse.
1. En cas d’infection pulmonaire :
Quelque soit l’espèce de Chiamydia en cause, un simple écouvillonnage du rhinopharynx suffit. On pourra également utiliser des crachats, des aspirations bronchiques ou les lavages broncho-alvéolaires.
2. Dans les infections uro-génitales et oculaires :
II faut faire un frottis de la muqueuse. On pourra utiliser un écouvillon en dacron, en coton ou en plastique.
Chez l’homme, ce prélèvement sera fait dans l’urètre sur 3 à 4 cm sans faire saigner, le matin avant la miction.
Chez la femme, le prélèvement sera fait dans l’endocol après nettoyage pour enlever l’excès de glaire. La sensibilité du prélèvement peut être augmentée en faisant simultanément un frottis du méat urinaire.
En cours de coelioscopie, on peut être amené à faire des frottis de trompes ou de la cavité péritonéale, ou des recueils de liquides présents dans le cul-de-sac de Douglas.
Pour le diagnostic de rectite à Chiamydia on pratique des frottis de muqueuse rectale.
Dans les conjonctivites, les prélèvements seront effectués dans les sillons conjonctivo-palpébraux.
3. Au cours de la lymphogranulomatose vénérienne :
Le ganglion infecté, s’il n’est pas fistulisé, sera ponctionné. Sinon il faudra faire un prélèvement de pus.
4. Traitement des échantillons :
Pour une recherche directe sur lame, il faut faire un frottis, pas trop épais, puis fixer la lame au méthanol.
Pour les techniques de recherche d’antigène par méthodes immunoenzymatiques, des milieux de transport permettant la conservation du prélèvement pendant 8 jours à +4°C sont utilisés.
Pour la mise en culture, il faut déposer le prélèvement dans du milieu hypersaccharosé, tamponné (milieu 2 SP). Si la mise en culture est faite dans les 24 heures, ce milieu est conservé à +4°C, si la culture doit être retardée, il faut congeler rapidement le prélèvement à -80°C.
B – Diagnostic direct :
1. Recherche sur frottis :
a) Colorations :
La recherche directe sur frottis peut se faire après coloration au Lugol pour la recherche de Chlamydia trachomatis : les inclusions apparaissent en brun violacé sur fond brun jaune. Cette technique, peu onéreuse est peu sensible et réservée au dépistage du trachome. La coloration de Giemsa est de même très peu sensible, et les inclusions sont difficiles à mettre en évidence : celles de Chlamydia trachomatis apparaissent claires avec à l’intérieur des granulations basophiles ; celles de Chlamydia pneumoniae et de Chlamydia psittaci sont violet foncé, très denses.
b/ Immunofluorescence directe :
C’est une excellente technique qui met en évidence les corps bactériens directement dans les frottis. L’utilisation d’anticorps monoclonaux spécifiques d’espèces permet de faire directement le diagnostic d’infections à Chlamydia trachomatis et Chlamydia pneumoniae. La sensibilité et la spécificité de ces techniques sont excellentes mais elles nécessitent un observateur expérimenté et elles sont difficilement utilisables pour de grandes séries de prélèvements.
2. Recherche d’antigène dans le prélèvement :
Ce sont surtout des techniques immuno-enzymatiques qui sont utilisées. Elles mettent en jeu des anticorps polyclonaux ou monoclonaux qui n’ont pas de spécificité d’espèce. Seuls les prélèvements génitaux et oculaires peuvent être examinés ce qui limite leur emploi à la recherche de Chlamydia trachomatis. Ces techniques sont sensibles mais peuvent fournir des résultats faussement positifs. L’utilisation de réactifs de confirmation permet de limiter ces erreurs.
Automatisables, ces techniques sont indiquées pour le dépistage. Il existe également une technique utilisant la chimiluminescence qui est plus rapide.
Les méthodes de biologie moléculaire (utilisation de sondes d’ADN ou d’amplification en chaîne par polymérasee) pourraient remplacer les méthodes précédentes dans un proche avenir.
3. Recherche directe par mise en culture :
a) Culture sur oeuf embryonnê :
L’inoculation de l’oeuf embryonnê se fait dans la cavité vitelline. Cette technique a permis les premiers isolements de Chiamydia et a été utilisée pour la préparation des antigènes pour la sérologie. Actuellement elle est abandonnée au profit de la culture cellulaire.
b) Cultures cellulaires :
C’est la méthode de référence pour la recherche de Chiamydia, elle peut être utilisée quelque soit l’espèce et quelque soit le prélèvement. Cependant elle est délicate à mettre en oeuvre et nécessite un matériel coûteux et un personnel entraîné.
Les cellules les plus couramment utilisées sont les souches McCoy (lignées semi-continues d’origine humaine) pour Chlamydia trachomatis et Chlamydia psittaci et HeLa (lignée continue) pour les 3 espèces.
Chlamydia psittaci et les souches de Chlamydia trachomatis Ll, L2 et L3 sont très virulentes et le tapis cellulaire peut être inoculé directement. Par contre, avec Chlamydia trachomatis et Chlamydia pneumoniae, il faut centrifuger le prélèvement avec la culture cellulaire pour faciliter l’adhésion des corps bactériens aux cellules.
Les cellules sont ensuite traitées par la cycloheximide qui bloque les synthèses protéiques de la cellule hôte, en respectant le métabolisme énergétique, ce qui favorise le développement des Chiamydia. L’incubation est arrêtée au bout de 2 ou 3 jours. La présence de Chiamydia est recherchée avec une réaction immunoenzymatique ou avec des anticorps marqués à la fluorescéine.
N.B. La recherche directe de Chlamydia psittaci dans les prélèvements doit être effectuée en prenant de grandes précautions pour éviter une contamination accidentelle du personnel.
C – Diagnostic indirect :
1. La fixation du complément :
Elle utilise l’antigène de groupe (LPS), thermostable. Cette technique est peu sensible mais elle est utilisable dans les infections systémiques (psittacose, lymphogranulomatose vénérienne), dans certaines formes compliquées d’infections à Chlamydia trachomatis (péritonites) et dans 25 % des infections à Chlamydia pneumoniae. Cette technique est prise en défaut dans la majeure partie des infections locales, génitales ou pulmonaires.
Une sérologie positive en fixation du complément sera également positive (à un titre d’anticorps identique) en micro-immunofluorescence.
2. La micro-immunofluorescence indirecte :
Mise au point par Wang et Grayston, c’est actuellement la technique de référence pour la sérologie des infections à Chlamydia trachomatis.
Elle permet la recherche d’anticorps dirigés contre les trois espèces de Chiamydia.
Initalement elle a été utilisée pour le typage des souches isolées. Pour l’immunofluorescence, l’utilisation des 15 sérovars de Chlamydia trachomatis permet théoriquement de définir le type en cause dans l’infection mais en pratique une seule souche suffit (par exemple la souche L2 appartenant au sérovar D) en raison des multiples réactions croisées entre les différents types. Pour ce diagnostic on utilisera également une souche de Chlamydia psittaci (souche LOTH) et de Chlamydia pneumoniae (souche IOL ou TWAR).
L’antigène peut être soit des corps élémentaires partiellement purifiés (microimmunofluorescence), soit des cellules infectées (immunofluorescence sur inclusions).
La première méthode est la plus courante.
3. Les techniques immunoenzymatiques :
Elles sont également proposées, mais pour le moment il n’y a pas de sérum ni d’antigène de référence pour la sérologie et la comparaison avec la microimmunofluorescence est difficile. Aussi cette dernière reste préférable.
4. Résultats de la sérologie :
La micro-immunofluorescence est une méthode sensible. Cependant son interprétation est difficile. La recherche d’IgM est décevante chez les adultes (elle est par contre essentielle pour le diagnostic d’une infection néo-natale). La mise en évidence d’IgA ne contribue que peu au diagnostic d’infection évolutive. Un titre d’anticorps très élevé (> 1024) doit faire suspecter une infection compliquée chez la femme, même en l’absence de signes cliniques patents. Une séroconversion est rarement observée, de même qu’une diminution du titre après antibiothérapie. En dehors de ces cas, la sérologie n’apporte que peu de renseignements dans les infections à Chlamydia trachomatis. En effet, chez les patients les titres n’évoluent que lentement et persistent des années parfois à des titres élevés, même en absence de réinfection. De plus des anticorps anti Chlamydia trachomatis sont mis en évidence chez 30 à 40 % des patients. D en est de même avec Chlamydia pneumoniae.
L’utilisation de deux (ou trois) antigènes différents peut dans certains cas indiquer quelle est l’espèce responsable de l’apparition des anticorps, mais les réactions croisées sont nombreuses entre les trois espèces de Chiamydia et une différence de titres avec les différents antigènes ne pourra être observée qu’au début d’une infection. Donc la sérologie est de peu d’intérêt pour le diagnostic des infections à Chiamydia. Pour tenter d’améliorer son interprétation, des techniques de « Westemblot » (ou immunoréplique) sont actuellement en cours d’étude.
VII – TRAITEMENT :
A – Traitement préventif :
En l’absence de vaccin la lutte contre les infections à Chiamydia passe par l’éducation, le dépistage et l’utilisation de préservatifs pour les maladies vénériennes.
La lutte contre le trachome consiste surtout en une amélioration des conditions de vie et d’hygiène.
B – Traitement curatif :
Les Chiamydia sont sensibles aux antibiotiques qui pénètrent dans la cellule. Dans une infection non compliquée, il faut utiliser en tout premier lieu les tétracyclines, de deuxième génération (doxycycline, limécycline). Chez la femme enceinte, ou chez le nouveau-né ces produits seront remplacés par des macrolides (érythromycine, roxithromycine… ).
Les fluoroquinolones pourraient représenter une alternative au traitement des infections à Chlamydia trachomatis.
Le traitement doit être suffisamment prolongé (15 jours à 3 semaines). Devant une infection vénérienne, il faudra rechercher les partenaires et les traiter.
Chez la femme, une salpingite, un syndrome inflammatoire pelvien, peut amener à utiliser une antibiothérapie associée (amoxicilline + acide clavulanique, métronidazole).
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