Site icon Medical Actu – Actualités Médicales Quotidienne – Actualité Santé

Pseudomonas Aeruginosa

Publicités

Le bacille pyocyanique

Le bacille pyocyanique, du grec puon = pus et du grec kuanos = bleu foncé, est désigné sous le nom d’espèce Pseudomonas aeruginosa du latin aeruginosus = couvert de rouille. Isolé en 1882 par Gessard.

C’est l’espèce la plus connue et la plus répandue du genre Pseudomonas. La plus pathogène, elle constitue l’espèce-type du genre.

I – HABITAT :

C’est une bactérie qui vit normalement à l’état de saprophyte dans l’eau et le sol humide ou sur les végétaux. Elle résiste mal à la dessication. Cette bactérie peut vivre en commensale dans le tube digestif de l’homme et de divers animaux. Le B.

pyocyanique peut survivre et se multiplier dans une infinie variété de liquides et de milieux, sur des supports et des matériels surtout s’ils sont humides.

Considéré comme une bactérie pathogène opportuniste c’est le germe-type des infections hospitalières ou nosocomiales.

II – MORPHOLOGIE ET CARACTÈRES CULTURAUX :

Bacille à Gram négatif— 1 à 3 p.m de long ; 0,5 à 1 u.m de large.

Parfois entouré d’une pseudo-capsule appelée slime qui peut jouer un rôle important dans la pathogénicité de cette bactérie.

Il peut être cultivé facilement sur tous les milieux en aérobiose (température de 37°C ou 30°C). Il dégage une odeur aromatique caractéristique de seringa due à la production d’ortho-amino-acétophénone, intermédiaire du métabolisme du tryptophane et non liée à la production de pigment. Un milieu sélectif comme le milieu de Drigalski convient pour la culture. Des milieux sélectifs à base de Cétrimide que l’on peut additionner d’antibiotique (ac. nalidixique) sont proposés pour la recherche dans des produits très contaminés ou les eaux (hydrologie).

A – Aspects des colonies :

Ils sont particuliers à cette espèce. Une dissociation spontanée en 3 types principaux peut être observée :

colonies la (« large ») : isolées, grandes avec une partie centrale bombée et un contour irrégulier — Fried Eggs (oeufs sur le plat). Elles sont caractérisées par une autolyse qui donne un aspect métallique, irisé lors de la culture en nappe de la bactérie. Ce phénomène est lié à l’action des enzymes protéolytiques bactériennes.

colonies Sm (« small » ) : petites, mates légèrement bombées avec un bord circulaire régulier.

colonies M (muqueuse), bombées, opaques, visqueuses parfois coulantes comme pour Klebsiella. Ces colonies se rencontrent presque spécifiquement dans des infections chroniques, urinaires ou pulmonaires. La bactérie produit alors un polysaccharide extra-cellulaire (l’acide alginique) qui est différent du « slime ».

B – Production de pigments :

C’est l’une des caractéristiques de cette espèce ; ils servent à son identification.

Cette propriété n’est corrélée ni avec la virulence, ni avec la protection. Ces pigments sont fluorescents ou non fluorescents.

1. Pyoverdine :

Pigment jaune-vert fluorescent, soluble dans l’eau, insoluble dans le chloroforme de poids moléculaire 1500, chromophore quinolinique associé à deux petits peptides.

C’est un sidérophore qui en se complexant avec les ions Fe+++ permet de capter le fer extracellulaire. Oxydé en pyorubine dans les vieilles cultures. Mis en évidence dans le milieu de King B (phosphate, sulfate, glycérol, peptone), sa production est inhibée par les ions sodium et favorisée dans les milieux carences en fer.

2. Pyocyanine :

Pigment bleu soluble dans l’eau et le chloroforme, caractéristique de P. aeruginosa qui est la seule espèce à le produire (composé fortement polaire, de nature phénazinique). La synthèse de ce pigment est diminuée en présence d’un excès d’ions phosphate et sodium. C’est un indicateur de pH, en solution à pH 3 = rouge, en milieu neutre ou alcalin = bleu. Il peut jouer le rôle d’accepteur terminal d’électrons si la chaîne respiratoire est inhibée par exemple par l’azide de Na.

La pyocyanine a de plus une action bactériostatique sur certaines bactéries en particulier à Gram positif. Elle est mise en évidence dans le milieu A de King (faible teneur en sels minéraux, glycérol, peptone pepsique).

Il existe des souches apigmentées ; moins de 5 % des souches sauvages ne produisent pas l’un ou l’autre de ces pigments. Elles sont fréquemment isolées chez des malades traités aux antibiotiques.

Il existe des souches mélanogènes = pigment brun noir diffusant (ne produisant pas de pyocyanine ni de pyoverdine) isolées de lésions purulentes.

Il existe encore des variétés érythrogènes = pigment rouge-brun aéruginosine A, parfois appelée pyorubrine.

Il faut noter que d’autres Pseudomonas produisent des pigments notamment des espèces phytopathogènes et il convient d’en faire le diagnostic différentiel :

P.fluorescens, P.putida, P. aureofaciens, P. chlororaphis, P.lemonieri, P. cepacia, P. stutzeri, P. mendocina, P. vesicularis, X. ( P . ) maltophilia, P. paucimobilis.

III – IDENTIFICATION BACTÉRIOLOGIQUE :

Le diagnostic est facile : oxydase (+), culture à 37°C : culture à 41°C mais pas à 4°C. Il est préférable d’étudier les caractères biochimiques à 30°C. Milieux A et B de King (production de pyocyanine et pyoverdine), oxydation de certains sucres avec production d’acides, utilisation comme seule source de carbone et d’énergie de nombreux substrats hydrocarbonés (réalisation de l’auxanogramme dans un milieu minéral simple).

Hydrolyse : gélatine, lécithine, DNA.

En anaéobiose respire les nitrates d’où une confusion si la gélose profonde contient des nitrates, mais son métabolisme est uniquement respiratoire.

Arginine dihydrolase positive.

TABLEAU I : caractères différentiels des principales espèces du genre Pseudomonas (d’après C. Richard)

IV – SUBSTANCES TOXIQUES ET PRODUITS ÉLABORÉS :

En dehors des pigments, dont nous venons de voir l’intérêt pour l’identification, le B. pyocyanique élabore des protéines et des substances toxiques pour l’homme, l’animal de laboratoire ou les plantes. On distingue principalement : une hémolysine thermostable, des exo-enzymes (protéases, phospholipase) et des toxines protéiques (exotoxine, entérotoxine).

Hémolysines :

Deux hémolysines sont produites : un glycolipide thermostable et une phospholipase C.

– Le glycolipide hémolytique est une substance de bas poids moléculaire non enzymatique et non antigénique thermostable et relativement peu toxique.

– Phospholipase C. L’hydrolyse de la lécithine est due à une lécithinase, thermolabile, comparable à la toxine alpha de Clostridium perfringens. Elle produit une réaction inflammatoire limitée, oedémateuse, érythémateuse ou hémorragique chez l’animal ressemblant à ce qui s’observe chez l’homme dans certaines formes cutanées d’infection à P. aeruginosa.

Protéases :

P. aeruginosa produit des enzymes protéolytiques (élastase, protéase alcaline, collagénase, caséinase) qui sont des facteurs de virulence car leurs actions se combinent, expliquant les destructions tissulaires observées lors d’une infection.

Exotoxine A :

Cette toxine létale a été découverte par LIU dans le sang de lapins moribonds après injection d’une culture vivante. Elle n’a pas d’activité protéolytique ou lécithinasique (purifiée, 66,6 kDa, 2 sous-unités A et B, DL 50 de 0,05 à 0,10 u.g pour la souris).

Cette toxine a le même mécanisme d’action que la toxine diphtérique (toxine ADP-ribosylante) agissant en inhibant la synthèse protéique par altération du facteur d’élongation EF2. La toxinogénèse n’est pas liée à la présence d’un phage lysogène.

Cette toxine est produite par plus de 90 % des souches.

Exoenzyme S :

Certaines souches de P. aeruginosa produisent une autre substance toxique différente de l’exotoxine A, ayant une activité ADP-ribosyltransférase, excrétée par 40 % des souches.

Cytotoxine :

La cytotoxine (« leucocidine ») est une protéine de 25,1 kDa ayant une action lyrique à faible dose sur différents types cellulaires en particulier les leucocytes (PMN, lymphocytes), produite par plus de 95 % des souches.

Entérotoxine :

Elle est mal connue. Elle provoque une accumulation hydrique dans l’anse ligaturée de lapin et pourrait être à l’origine d’entérocolite à B. pyocyanique.

Facteur de perméabilité vasculaire

V – POUVOIR PATHOGÈNE NATUREL :

Peu virulent pour l’individu normal, le B. pyocyanique est par contre un agent infectieux redoutable lorsque les défenses immunitaires du sujet sont altérées.

P. aeruginosa est l’exemple type de la bactérie pathogène opportuniste.

Les malades particulièrement sensibles sont les nourrissons, les personnes âgées, les sujets atteints d’affections graves, chroniques, métaboliques (diabète) mais surtout hématologiques ou cancéreuses. Les traitements immunosuppresseurs, les corticoïdes, les antimétabolites favorisent l’infection à B. pyocyanique d’origine endogène. Chez les brûlés, cette infection est l’une des causes majeures de mortalité. La croûte humide et l’amoindrissement des moyens locaux de défense favorisent la prolifération rapide du germe. Enfin le traitement curatif ou préventif des malades à hauts risques par des antibiotiques à large spectre contribue largement à l’augmentation de la fréquence des infections à bactéries multirésistantes, parmi lesquelles P. aeruginosa joue un rôle prépondérant.

A – Infections pulmonaires :

Elles peuvent être primitives ou secondaires à une septicémie.

Les pneumopathies primitives s’observent exceptionnellement chez le sujet sain mais sont le lot courant des malades trachéotomisés, des insuffisants respiratoires sous antibiothérapie prolongée, des malades atteints d’hémopathies ou de cancers et recevant une chimiothérapie. L’évolution est sévère (mortalité 30 à 50 %), le germe est isolé des expectorations alors que les hémocultures sont habituellement négatives.

La mucoviscidose (enfants atteints de fibrose kystique au pancréas) se complique de surinfections bronchiques bactériennes notamment à S. aureus dans les premières années, puis sous l’influence de l’antibiothérapie, à B. pyocyanique dans 70 à 90 % des cas. L’isolement de souches muqueuses M produisant de l’exopolysaccharide muqueux (alginate : polymère d’acide mannuronique et d’acide guluronique) est caractéristique.

Enfin une atteinte pulmonaire peut s’observer au cours des septicémies à B. pyocyanique.

B – Infections uro-génitales :

Très fréquentes, elles ne sont jamais primitives, mais toujours secondaires à une exploration des voies urinaires : simple cystoscopie ou sondage vésical, sonde urétrale à demeure, intervention rénale ou prostatique…

C – Infections ostéo-articulaires :

Le B. pyocyanique est à l’origine de 10 % environ des ostéites et de 20 % des arthrites septiques. Les ostéites secondaires, les plus fréquentes, succèdent à une fracture ouverte ou à une intervention avec mise en place d’un matériel étranger, ou surinfections d’ulcérations cutanées chez un diabétique. Les ostéites primitives d’origine hématogène se voient essentiellement chez les héroïnomanes et touchent électivement les vertèbres.

D – Infections oculaires :

Le B. pyocyanique peut être présent à l’état de saprophyte dans les culs de sac conjonctivaux. Dans certaines conditions, il peut entraîner des infections superficielles de l’oeil, par exemple des blépharo-conjonctivites ont été observées au cours de chimiothérapies anticancéreuses chez des malades porteurs de lentilles coméennes après l’utilisation de mascara contaminé.

En fait, ces infections sont rares mais elles sont gravissimes. Le B. pyocyanique est responsable de 15 à 20 % des surinfections bactériennes d’ulcérations coméennes.

Elles gagnent très vite l’ensemble du globe oculaire. Cette panophtalmie appelée, avec raison, fonte purulente de l’oeil, est une complication redoutable de la chirurgie ou des investigations ophtalmologiques.

E – Infections O.R.L :

Le B. pyocyanique n’est pas un saprophyte courant du conduit auditif externe ; seuls 1 % des individus sains en sont porteurs. Il est par contre isolé chez 45 à 65 % des sujets ayant une otite externe banale.

L’otite maligne à B. pyocyanique a pu être observée chez les diabétiques âgés. Le terme malin a été employé en raison des possibilités d’extension.

Récemment une nouvelle forme d’otite externe à B. pyocyanique a été décrite sous le terme « d’oreille des plongeurs », atteignant les plongeurs des stations de recherches pétrolières en Mer du Nord.

F – Infections méningées :

Elles sont rares : 2 % des méningites dans leur ensemble, toutefois 10 % des méningites après intervention neuro-chirurgicale sont dues à P. aeruginosa.

G – Infections cutanées :

Chez le sujet sain on peut observer un onyxis avec perionyxis réalisant l’ongle vert, des infections interdigitales, des surinfections d’ulcères de jambe. Des lésions cutanées polymorphes connues sous le nom Secthyma gangrenosum se rencontrent au cours de septicémies en particulier chez les leucémiques. Chez les brûlés la colonisation des lésions par le B. pyocyanique est rapide ; à la trentième heure, 20 % des lésions sont infectées, 48 % à la quarante-huitième heure et plus de 60 % au cinquième jour. Le risque majeur est bien la septicémie, brutale, dont le taux de mortalité est élevé : environ 50 %.

Des infections cutanées à B. pyocyanique peuvent s’observer en climat chaud et humide, mais également chez tout sujet en contact avec une eau contaminée. En particulier sous nos climats, la vogue actuelle des bains en eau tiède ou chaude (bains bouillonnants, balnéothérapie, applications de boues réchauffées ou thermales, bains médicinaux, thalassothérapie, bains romains) peuvent être à l’origine de folliculites à pyocyanique. Le traitement par le chlore de ces eaux à usage récréatif est parfois absent, souvent insuffisant et inefficace (conditions de pH, filtration, aération….) Un risque existe également pour les baignades dans des eaux stagnantes ou mal renouvelées ou non épurées (gravières, anses du bord de mer sans courants ou à faible marée surpeuplées en été, à proximité d’égouts) où sont associées, bien sûr d’autres bactéries hydriques.

H – Septicémies :

Elles sont en augmentation régulière, comme d’ailleurs les autres septicémies à bacilles Gram négatif.

Ces septicémies s’observent d’une part chez les nouveaux-nés et d’autre part chez les adultes traités par des corticoïdes ou des antimétabolites. Elles succèdent aux surinfections cutanées des brûlés, aux proliférations bactériennes des malades trachéotomisés. Enfin les cathéters et les sondes constituent également des portes d’entrée. Le pronostic des septicémies à B. pyocyanique est sévère ; la mortalité est supérieure à 50 % mais celle-ci dépend bien entendu de l’affection sous-jacente puis de la précocité et du choix du traitement.

J – Entérites à B. pyocyanique :

Leur mécanisme physiopathologique est proche de celui d’autres entérites. Elles sont très rares. On a décrit des épidémies de diarrhées dans des pouponnières.

Les trois formes cliniques sont :

– l’entérite aiguë : consécutive à une antibiothérapie à large spectre ou l’ingestion d’aliments très contaminés ,

– la typhlite : colite nécrosante localisée au caecum survenant chez des sujets leucémiques et neutropéniques

– l’entérite hydrique (Fièvre de Shangaï) avec un tableau de fièvre typhoïde, liée à l’absorption d’eaux polluées.

Toutefois l’isolement dans les selles de P. aeruginosa ne doit pas conduire à une antibiothérapie systématique.

K – Endocardites :

Environ 1 % des endocardites peuvent être dues au B. pyocyanique. La fréquence des endocardites tricuspidiennes augmente chez les drogués.

VI – MODÈLE PHYSIOPATHOLOGIQUE :

P. aeruginosa colonise les muqueuses ou les plaies et adhère grâce aux facteurs d’adhésion ou aux composés polysaccharidiques externes. Chez un patient non immunisé contre une souche du même sérogroupe 0 une multiplication rapide des bactéries se produit et sous l’influence des différents facteurs de virulence déjà cités et en particulier du LPS-endotoxine, il se forme un foyer inflammatoire local. Dans ce foyer se concentrent de nombreux phagocytes, polynucléaires qui vont dans les cas favorables assurer la destruction rapide des bactéries. Des anticorps sériques spécifiques d’espèce pour les enzymes ou de groupe pour le LPS sont produits en quelques jours, mais trop tard pour jouer un rôle dans les phénomènes immédiats.

En cas de déficience immunitaire portant sur le nombre et/ou la qualité des polynucléaires, la phagocytose est insuffisante et le stade d’invasion succède à la colonisation. Les bactéries débordent alors les barrières cellulaires de défense dans le foyer inflammatoire et se multiplient ; une bactériémie est habituellement constatée avec localisations secondaires. La production d’exotoxine est intense et sa diffusion large. En raison des facteurs de virulence diversifiés de ce germe, un modèle physiopathologique simple ne peut rendre compte de la complexité pathogénique de l’infection.

VII – ÉPIDÉMIOLOGIE :

La nature nosocomiale de la plupart des infections à P. aeruginosa rend nécessaire la connaissance parfaite des mécanismes de transmission. L’utilisation de marqueurs épidémiologiques (sérotypie, lysotypie, pyocinotypie) fiables permet de suivre les épidémies hospitalières et d’envisager la lutte contre les sources de contamination.

A – Sources de contamination :

Le milieu extérieur et l’eau sous toutes ses formes ou le malade lui-même par ses exsudais (urines, crachats, selles,…)

L’environnement hospitalier : fleurs coupées (eau des vases), plantes en pots, fruits, légumes crus ou en salade (tomates, carottes, radis, laitues), siphons d’éviers ou de sol, humidificateurs, respirateurs, eau distillée, (possibilité de multiplication jusqu’à 107 germes/ml, sans trouble visible).

Antiseptiques : par exemple les ammoniums quaternaires sont souvent inactifs et permettent la multiplication de la bactérie.

B – Vecteurs de contamination :

La transmission à partir d’une source de contamination initiale à un malade ou de patient à patient, résulte de la contamination ou la souillure des supports inertes, des mains des visiteurs et surtout du personnel qui véhiculent la bactérie selon un schéma épidémiologique désormais classique. Dans les services de réanimation, les malades trachéotomisés hébergent rapidement du B. pyocyanique qui colonise la partie supérieure du tractus respiratoire. Le germe pourra ainsi disséminer dans le service.

C – Marqueurs épidémiologiques :

Les marqueurs épidémiologiques à disposition sont : la sérotypie, la lysotypie et la pyocinotypie. L’antibiotype ne constitue qu’une indication en général insuffisante.

La sérotypie est le marqueur le plus couramment utilisé alors que la lysotypie et la pyocinotypie sont réalisées par des laboratoires spécialisés.

1. Sérotypie :

La classification antigénique de Habs comprend actuellement 17 sérogroupes 0 (correspondant aux AgO lipopolysaccharidiques, thermostables) qui permettent d’identifier 90 à 95 % des souches par une technique d’agglutination sur lame (mimunsérums Diagnostics Pasteur).

Les sérogroupes 0 les plus fréquents sont 01, 05, 06 et 011 (ce dernier ayant la particularité de présenter une activité ONPG hydrolase).

Lors des bactériennes, on isole plus fréquemment les sérogroupes 01, 2, 5, 6, 7, 10 et 11.

La distribution géographique mondiale des sérogroupes est très variable entre, d’une part des souches cosmopolites plus ou moins fréquentes, et d’autre part des souches rares (014, 15,17) absentes dans certains pays.

La détermination des sérotypes H (correspondant aux antigènes protéiques flagellaires, thermolabiles) permet d’abaisser le pourcentage des souches non typables, mais cette technique n’est pas utilisée couramment.

2. Lysotypie :

Le bacille pyocyanique peut être lysé par de nombreux phages lytiques. La majorité des souches sont lysogènes, voire poly-lysogènes. Une même souche peut ainsi héberger, intégrés sur le chromosome ou sur un plasmide, une dizaine de phages tempérés. Cette haute fréquence de lysogénie est d’ailleurs caractéristique de P. aeruginosa et est rarement rencontrée dans d’autres espèces de Pseudomonas.

La lysotypie employant 17 bactériophages selon la méthode de LINDBERG permet ainsi de marquer 98 % des souches, et le nombre des lysotypes est actuellement voisin de 300. C’est une excellente méthode complémentaire de la sérotypie dans l’étude épidémiologique locale.

3. Pyocinotypie :

La pyocinotypie consiste en la mise en évidence de la production de bactériocines : pyocines = aeruginocines. Cette technique est relativement simple à condition de disposer de quelques souches sensibles nécessaires pour les révéler.

Les pyocines sont classées en 2 types principaux :

– type S : sensible aux enzymes protéolytiques, ne montrant pas de forme particulière en microscopie électronique

– type R : résistant aux enzymes protéolytiques ayant une structure de cylindre creux et double ressemblant à une queue de bactériophage en microscopie électronique. Celles-ci pourraient être des phages défectifs. La pyocinotypie permet, à l’aide de la méthode décrite par Fyfe, Harris et Govan en 1984 utilisant 13 souches indicatrices, de distinguer 105 types principaux et 25 sous-types.

L’une des trois méthodes permet de marquer 90 à 95 % des souches. Dans les cas difficiles, la combinaison de 2 méthodes améliore ce pourcentage. Les marqueurs épidémiologiques permettent de connaître la flore contaminant un service et ainsi de déterminer avec une forte probabilité l’existence d’une contamination au sein du service (souche connue) ou d’une contamination endogène (souche nouvelle).

VIII – TRAITEMENT ET PROPHYLAXIE :

A – Sensibilité aux antibiotiques :

P. aeruginosa n’est sensible qu’à quelques antibiotiques et le choix d’un traitement est donc important. Malgré l’efficacité de certains, le succès n’est souvent que relatif et l’effort de lutte contre les infections à B. pyocyanique doit passer avant tout par la prévention : mesures d’hygiène voire la vaccination.

P. aeruginosa est résistant à de nombreux antibiotiques, (benzylpénicillines, aminopénicillines, céphalosporines de 1e et de 2e générations, phénicolés, tétracyclines, triméthoprime). Cette résistance répond à trois mécanismes :

– l’imperméabilité de la paroi à certains antibiotiques (résistance naturelle pour les pénicillines M = méthicilline, cloxacilline ; résistance acquise faisant intervenir des porines = ticarcilline, cefsulodine, imipénème)

– l’inactivation enzymatique (17 bêta-lactamases plasmidiques, plusieurs types : PSE = Pseudomonas Spécifie Enzyme, PSE-1 et PSE-4 : CARBécillinases ; OXA = oxacillinases ; TEM 1 et 2), résistance naturelle aux premières bêta-lactamines par synthèse d’une bêta-lactamase chromosomique habituellement réprimée (Case = céphalosporinase inductible de Sabath)

– modification de l’affinité de l’antibiotique pour la cible (PBP).

– Il existe au moins une trentaine de plasmides de résistance connus chez P. aeruginosa pouvant coder pour une multirésistance touchant bêta-lactamines et aminosides. Formant une dizaine de groupes d’incompatibilité, ils se distribuent schématiquement en trois catégories : des plasmides spécifiques du genre Pseudomonas, des plasmides pouvant circuler entre Pseudomonas et Entérobactéries, des plasmides habituels des Entérobactéries retrouvés parfois chez Pseudomonas.

Ces quelques données générales expliquent les phénotypes de résistance très divers qui sont observés et combien il est difficile sur la base de la valeur des CMI publiées d’établir une hiérarchie parmi les molécules antipyocyaniques proposées. La conjoncture épidémiologique variable d’un hôpital et d’un service à l’autre, rend aléatoire toute prévision de sensibilité.

Le choix d’une bêta-lactamine pourra se faire en fonction de l’antibiogramme parmi les carboxypénicillines (ticarcilline, association ticarcilline + ac. clavulanique) ayant une bonne vitesse de bactéricidie comme l’imipénème, les acyluréidopénicillines (aziociiïine, pipéracilline), acylpénicillines (apalcilline), certaines céphalosporines (cefsulodine et ceftazidime), monobactame (aztréonam), carbapénème (imipénème). En outre, l’association la plus efficace d’une bêta-lactamine à un aminoside sera souvent recherchée afin d’être rapidement bactéricide dans les infections généralisées. Parmi les aminosides plusieurs phénotypes de résistance sont observés, l’amikacine restant la plus active. La diminution de la perméabilité aux bêta-lactamines affectant également les aminosides rend certaines souches particulièrement résistantes. P. aeruginosa est résistant à l’acide nalidixique mais les quinolones de 2e génération, ont une activité intéressante : la péfloxacine, la norfloxacine, l’ofloxacine et la ciprofloxacine donnant les CMI les plus basses.

Les aminosides associées aux bêta-lactamines antipyocyaniques constituent le traitement de première intention.

La sensibilité de P. aeruginosa à la colistine est constante, mais son efficacité in vivo est décevante. Certaines souches sont sensibles à la fosfomycine, mais cet antibiotique doit être associé pour éviter l’émergence rapide de mutants résistants.

Dans la réalisation de l’antibiogramme, un inoculum trop lourd est un écueil à éviter.

Cela est du à la tendance des corps bactériens à former des agglutinais.

B – Protection par la vaccination :

La prévention de l’infection, notamment en milieu hospitalier, passe avant tout par des mesures d’hygiène générale et dans le choix des antiseptiques.

De nombreux travaux ont été consacrés à l’immunoprévention des infections à B. pyocyanique.

Les études expérimentales ont débuté en 1960 et se sont constituées dans plusieurs directions. Aux U.S.A. : vaccin Pseudogène (7 sérotypes – Heptavalent

Lipopolysaccharide Préparation), au Royaume Uni : vaccin polyvalent soluble (antigènes de surface – 16 sérotypes – vaccin PEV-01), en Roumanie : suspension bactérienne chauffée (11 sérotypes), en France : vaccin mixte polyvalent (10 sérotypes, suspension bactérienne chauffée + staphyloccoque + anatoxine staphylococcique).

Leurs applications cliniques peuvent se résumer actuellement à l’utilisation de deux types de vaccins :

– vaccins bactériens (suspension de bactéries chauffées)

– vaccins acellulaires (extraits purifiés divers, mais contenant habituellement du LPS).

En France, le vaccin cellulaire polyvalent est utilisé en prophylaxie chez les grands brûlés.

L’immunothérapie est parfois préconisée avec immunoglobulines naturelles ou hyperimmunes.

Quitter la version mobile