HISTORIQUE :
En 1916 Rocha-Lima découvre dans le corps d’un pou parasitant un malade atteint de typhus, maladie connue depuis longtemps, de fins microorganismes auxquels il donne le nom de Rickettsia prowazekii, du nom de deux bactériologistes morts de typhus en étudiant cette maladie : Von Prowazek et Ricketts.
Lors d’investigations similaires, d’autres microorganismes à morphologie voisine ont été trouvés, mais c’est essentiellement le contexte clinique et épidémiologique qui permet à cette époque de les différencier entre elles. C’est ainsi que l’on a individualisé successivement :
1906-1909 la transmission par la tique Dermacentor andersoni
1909 – Ch. Nicolle à l’Institut Pasteur de Tunis décrit la transmission du typhus épidémique par le pou
1910- Brill isole le typhus résurgent dont la description sera reprise par Zinsser 20 ans après, d’où le nom de la maladie de Brill-Zinsser
1915 – Schùffner identifie le typhus tropical ou Scrub-typhus
1928 – Mooser sépare le typhus murin du typhus épidémique
1937- Derrick isole à Brisbane (Queensland) l’agent de la fièvre Q, alors baptisée Query Fever, et en 1939 propose le nom de Rickettsia burnetii en l’honneur de Burnet qui, en collaboration avec Freeman, avait montré la distinction de cette infection avec les autres typhus.
I – CLASSIFICATION :
Les Rickettsia sont des bactéries intracellulaires obligatoires. Elles sont presque aussi petites que les plus gros virus. Cependant il s’agit bien de bactéries puisque ces germes se divisent par scissiparité, qu’ils possèdent à la fois de l’ADN et de l’ARN et qu’ils sont sensibles aux antibiotiques.
Dans la famille des Rickettsiaceae quatre genres sont responsables d’une pathologie chez l’homme.
– Rickettsia, avec plusieurs espèces responsables du typhus et des fièvres exanthématiques :
R. prowazekii, R. typhi, R. rickettsii, R. conorii, R. australis, R. akari, R. tsutsugamushi (R. orientalis), R. sibirica
– Coxiella, avec une seule espèce, Coxiella burnetii, responsable de la fièvre Q
– Ehriichia avec plusieurs espèces responsables d’infections du chien (E. canis), du cheval (£. risticii et E. equi) et du bétail (JE. phagocytophila). L’ehriichîose humaine est une maladie peu fréquente décrite sur la côte sud du Japon et dans le sud-est asiatique (E. sennetsu) et, depuis 1986, aux USA (agent non encore identifié). Elle se traduit par un syndrome pseudogrippal, de la fièvre, des adénopathies généralisées et parfois par une hépatosplénomégalie et un exanthème. Elle se confond aisément avec une mononucléose infectieuse, mais le malade présente souvent des antécédents de morsure de tique, des troubles des tests hépatiques, une diminution du nombre d’éléments figurés du sang et une réaction sérologique positive avec un antigène formé par E. canis. Ce germe est transmis à l’homme par des tiques. Les réservoirs de germes sont encore inconnus.
– Rochalimaea quintana est responsable d’accès fébriles ayant une durée de 24-48H et séparés par des périodes apyrétiques, c’est la fièvre des tranchées (ou de Voihynie).
On observe une leucocytose et une splénomégalie. La guérison survient en 5 à 6 semaines. Ce germe est transmis à l’homme par les déjections du pou de corps. Sa capacité à se multiplier in vitro en milieu acellulaire a justifié la création du genre nouveau.
Les études génétiques en cours, analysant les profils de restriction grâce à l’électrophorèse en champ puisé par exemple, devraient permettre dans un proche avenir de mieux connaître les relations inter- et intra-spécifiques de ces espèces.
II – HABITAT :
La recherche de Rickettsia chez de nombreux arthropodes montre qu’elles sont très répandues ; l’infection se produit généralement par ingestion. Certaines espèces restent localisées dans la cavité digestive, d’autres envahissent le corps de l’animal ; les glandes salivaires peuvent alors contenir le germe, ce qui explique la transmission par piqûre.
On les retrouve aussi chez différents réservoirs (homme, rat, chien, rongeur sauvage) et chez des vecteurs (poux, puces, tiques, acariens).
III – CARACTÈRES BACTÉRIOLOGIQUES :
A – Morphologie :
Ce sont des éléments cocco-bacillaires très petits, à la limite de la visibilité en microscopie optique, rosé pâle à la coloration de Gram, polymorphes, intracellulaires le plus souvent, à Gram négatif. La coloration de Macchiavello modifiée par Gimenez (fuchsine – vert malachite) permet de voir les rickettsies colorées en rouge vif sur un fond cytoplasmique vert pâle.
En microscopie électronique, la structure des Rickettsia est celle des bactéries à Gram négatif.
B – Caractères culturaux :
Les rickettsies se multiplient par division binaire à l’intérieur de la cellule-hôte.
Immédiatement après la division (microcinéma) et lorsque les conditions de nutrition sont bonnes, les rickettsies sont animées de mouvements rapides et parcourent le cytoplasme de la cellule-hôte en tous sens. Lorsque le milieu s’appauvrit la division s’arrête, la bactérie s’allonge et l’on obtient des formes filamenteuses.
Les rickettsies ont des stratégies de multiplication intracellulaire qui peuvent être dressées en 3 groupes :
– les bactéries du genre Rickettsia vivent libres dans le cytoplasme après un échappement extrêmement rapide de la vacuole de phagocytose.
– les bactéries du genre Ehriichia inhibent (comme Chiamydia et Legionella) la fusion phagolysosomiale et se multiplient dans le phagosome sous forme de morulae.
– Coxiella burnetii n’inhibe pas la fusion phagolysosomiale, et se multiplie dans le phagolysosome à pH acide.
Les relations avec les membranes de la cellule hôte sont importantes pour le développement de certaines espèces, en particulier pour R.tsutsugamushi qui demande une association étroite à la membrane pour assurer son métabolisme alors que pour R. prowazekii, il existe un développement libre intracytoplasmique grâce à l’action vraisemblable d’une phospholipase A.
C – Caractères antigéniques :
L’étude des antigènes est difficile en raison de la fragilité des rickettsies et des difficultés rencontrées pour séparer la bactérie de la cellule hôte.
Les études concernant le matériel antigénique ont été réalisées très généralement à partir de cultures réalisées sur la membrane vitelline d’oeufs de poule embryonnés morts 5 à 6 jours après l’inoculation. La fraction antigénique la plus importante est retrouvée dans l’extrait lipidique éthéré. Cet antigène permet de séparer trois groupes :
– Groupe 1 : R. prowazekii, R. typhi
– Groupe II : R. rickettsii, R. conorii. R. australis, R. sibirica. R. akari. R. japonica
– Groupe ni : R. tsutsugamushi
Les différentes espèces peuvent ainsi être séparées par des immunsérums spécifiques. Il est intéressant de noter que ces groupes séparent des espèces qui ont un pouvoir pathogène commun et ainsi trois groupes sont individualisés :
Groupe 1 : rickettsies du typhus (pou, puce), ayant une homologie génétique supérieure à 90 % (R. typhi, R. prowazekii) et un lipopolysaccharide commun croisant avec Proteus 0X19.
Groupe II : fièvres boutonneuses transmises par les tiques : rickettsies du groupe boutonneux dont le LPS est aussi commun, croisant avec Proteus 0X19 et 0X2 et ayant une homologie génétique supérieure à 90 %.
Groupe III : fièvres des broussailles : les rickettsies de ce groupe ont une communauté antigénique avec Proteus OX K mais ce groupe a une hétérogénéité antigénique et génétique considérable.
L’immunofluorescence permet de mettre en évidence différents sérotypes dont l’étude est particulièrement intéressante au sein du groupe II.
La plupart des antigènes rickettsiens intéressants du point de vue immunogène sont des protéines membranaires. On connaît deux protéines majeures chez R. conorii (115 kDa et 135 kDa thermostables) R. typhi et R. prowazekii (120 kDa). L’analyse de la structure de cette protéine de 120 kDa devrait permettre d’en distinguer les épitopes, en particulier les sites de reconnaissance des lymphocytes T. Ces études et la construction de peptides synthétiques laissent entrevoir la possibilité d’exploiter leurs propriétés immunogènes en vue de fabriquer des vaccins.
D – Résistance :
Les rickettsies sont des germes très fragiles, facilement tués par la chaleur 30 minutes à 56°C, la dessication et la plupart des désinfectants : formol, phénol.
Leur viabilité au sein de cellules infectées dépend de la température.
E – Pouvoir pathogène expérimental :
Le spectre d’activité pathogène des rickettsies est très large et de très nombreux animaux ont été utilisés pour leur étude. Le cobaye mâle est l’animal de choix en raison de sa sensibilité à la plupart des rickettsies (et des Coxiella) et du gonflement scrotal que l’on observe chez l’animal infecté. On observe un effet dermonécrotique après injection intra-dermique et un effet létal rapide après injection IV. La souris est moins sensible ; cependant elle est préférable au cobaye pour R. akari et pour R.
tsutsugamushi. L’injection intrapéritonéale à ces animaux permet la multiplication et l’isolement de ces germes.
IV – POUVOIR PATHOGÈNE NATUREL :
A – Groupe du typhus :
Les épidémies de typhus ont été connues depuis longtemps mais l’importance des arthropodes dans leur transmission ne fut mise en évidence qu’en 1909 par Nicolle.
Deux espèces sont en cause :
R. prowazekii : typhus épidémique exanthématique ou typhus historique ; R. typhi : typhus endémique ou typhus murin.
1. Typhus épidémique :
II survient par épidémies en particulier lors des guerres. La maladie est caractérisée par :
– une fièvre 40°C à 41°C, restant en plateau 2 semaines,
– une éruption généralisée à partir du 4e au 7e jour respectant le visage,
– un syndrome typhique, maximal 2 à 3 jours après l’éruption : prostration, torpeur, stupeur.
Il existe une toux sèche et une respiration laborieuse. Les formes graves sont mortelles, mais, si la guérison survient, il n’y a pas de séquelles. Les antibiotiques ont totalement modifié cette évolution.
La maladie est devenue rare dans sa forme épidémique, mais elle a été un des grands fléaux historiques accompagnant les famines, les guerres et jouant, par les morts qu’elle entraînait, un rôle politique majeur. Ainsi, Napoléon, en 1812, perdit un demi million d’hommes et ce fut l’une des raisons de sa défaite finale. Le typhus fut également important en Russie et en Serbie pendant la Première guerre mondiale ; pendant la Deuxième guerre mondiale il toucha les camps de prisonniers, il se répandit en Corée et au Japon.
Le risque existe toujours et une épidémie peut survenir dès que se trouvent réunies diverses conditions : rassemblement de populations déplacées dans des conditions d’hygiène mauvaises ou nulles, accentuation par la misère et le froid.
R. prowazekii apparaît dans le sang du malade au début de la période fébrile. Les poux de corps se nourrissent de son sang et ont tendance à le quitter pour chercher un autre hôte qui va contracter le typhus. Le pou abandonne des fèces riches en rickettsies sur la peau et c’est lors des grattages que les rickettsies pourront pénétrer la peau ainsi altérée.
Il existe quelques cas autochtones aux USA transmis par les ectoparasites des écureuils volants : c’est le typhus sporadique.
2. Maladie de Brill-Zinsser :
En 1898 Brill, à New-York, note l’apparition de cas sporadiques d’une maladie ressemblant au typhus dans des communautés d’émigrés en provenance d’Europe Centrale, mais ne trouve pas de vecteur.
Zinsser, en 1937, a avancé qu’il s’agissait d’une résurgence de rickettsies persistant dans la peau chez d’anciens typhiques. Plus tard en 1951, Murray a pu isoler des rickettsies, R. prowazekii, dans le sang de ce type de malades.
La maladie ressemble au typhus, mais est caractérisée par une intensité moins marquée des manifestations cliniques.
3. Typhus murin ou typhus endémique :
Longtemps confondu avec le typhus historique, il est dû à R. typhi et l’arthropode vecteur n’est pas le pou mais la puce. Le réservoir de germe est le rat.
Maladie comparable au typhus historique mais de moindre gravité : symptômes moins sévères, exanthème moins important, la courbe de température présente de grandes oscillations, la guérison est sans séquelles.
Le typhus murin est exceptionnel en France et a pu se rencontrer dans les ports ou les localités où les rats étaient infectés.
Sa répartition est très mal connue. Il existe un état endémique au Texas et en Grèce (île d’Eubée).
B – Groupe des fièvres pourprées et boutonneuses :
Ce groupe correspond à de nombreux tableaux cliniques, chacun étant liée à une Rickettsia dont la dénomination est particulière rappelant le lieu géographique où la maladie a été décrite. Elles peuvent se rencontrer en France sous la forme de la fièvre boutonneuse méditerranéenne et en Amérique sous la forme de la redoutable maladie des Montagnes Rocheuses.
1. Fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses :
Décrite en 1899, elle est caractérisée par une forte température accompagnée de délire et d’éruption de papules rouge violet évoquant une rougeole sévère. Le début est brutal marqué par des céphalées intenses en particulier dans la région frontale, douleurs musculaires aiguës. Avant les antibiotiques, le pronostic était sévère avec 20 % de mortalité surtout chez les vieillards ; actuellement elle est estimée à 4 % aux USA.
R. rickettsii agent de la fièvre pourprée est transmise par des tiques : Dermacentor andersoni (région des Rocheuses), D. variabilis, Amblyomma americanum, Haemaphy salis leporis-palustris au Mexique, Rhipicephalus sanguineus qui sont trouvées chez les animaux sauvages, en particulier chez les rongeurs, mais également chez le gros bétail et chez les animaux domestiques. L’infection peut toucher en particulier les bûcherons et les promeneurs en forêt. Elle ne se rencontre pas seulement dans les Montagnes Rocheuses, mais sur tout le continent américain suivant le cycle de développement des tiques. Actuellement cette infection est plus fréquente sur la côte Est que sur la côte Ouest.
2. Fièvre boutonneuse méditerranéenne :
Elle est due à R. conorii. L’épidémiologie de cette rickettsiose est étroitement liée à celle des tiques qui la transmettent, Rhipicephalus sanguineus, parasite habituel du chien domestique. La tique s’infecte en piquant des mammifères parasités (domestiques : chiens, bovins, ovins, caprins ou sauvages : lapins ou autres rongeurs) et constitue elle-même un réservoir de virus puisqu’elle transmet la rickettsie à sa descendance par voie transovarienne.
L’homme contracte la maladie surtout au printemps et en été à la faveur d’une promenade à la campagne. Le bassin méditerranéen constitue le plus important foyer, mais d’autres régions de France peuvent être touchées. La contamination se fait par la salive de l’arthropode. La muqueuse oculaire représente une autre porte d’entrée.
Du point de vue clinique, l’incubation dure 4 à 15 jours. La fièvre est élevée associée à un syndrome algique diffus (céphalées, myalgies). La lésion initiale est caractéristique : tache noire, petit ulcère avec un centre noir nécrotique et une bordure érythémateuse accompagnée d’adénopathies. Un érythème maculo-papulaire généralisé touchant les membres avec atteinte des paumes et des plantes des pieds est également observé.
Dans le midi de la France cette affection ancienne appelée « maladie d’Olmer » avait reçu le nom évocateur de « typhus des vendanges ». Des formes malignes avec parfois une évolution défavorable ont été décrites, marquées par une éruption purpurique et des atteintes polyviscérales, des complications neurologiques, hépatiques, cardiaques, vasculaires et bronchopulmonaires.
3. Rickettsiose vésiculeuse :
Elle est due à R. akari. Le cycle épidémiologique comprend la souris et un acarien (Dermanyssus sanguineus) qui infecte accidentellement l’homme par morsure. Elle est de répartition mondiale : Russie, Amérique, Afrique.
C – Groupe du typhus de Brousse :
La maladie est limitée à l’Extrême-Orient : Japon, Australie, Nouvelle-Guinée, Inde. Elle est due à R. tsutsugamushi (R. orientalis). Elle est transmise par un Trombicula.
La fièvre fluviale japonaise ou scrub-typhus de Malaisie ou typhus des broussailles est une fièvre exanthématique qui apparaît une dizaine de jours après la piqûre par la larve de l’acarien qui, à ce stade de son développement, doit faire un repas sanguin. La fièvre dure deux semaines. Les autres signes sont : escarre au point d’inoculation, adénopathie satellite, céphalées fréquentes et très vives, toux fréquente.
D – Physiopathologie :
L’expression clinique des rickettsioses parfois polymorphe fait intervenir des facteurs liés à l’hôte et aux bactéries. La gravité des rickettsioses est variable et la même maladie peut être bénigne ou fatale sans que l’on puisse faire de différences entre les souches responsables de ces formes. L’âge, un déficit congénital en G6 – PD, l’éthylisme aggravent les rickettsioses, mais le rôle d’une baisse des défenses immunitaires n’a pas été prouvé. Les médiateurs chimiques de la réaction inflammatoire pourraient jouer un rôle.
Les rickettsioses sont très virulentes car quelques bactéries (environ 10/piqûre) suffisent à induire une maladie. Généralement elles se multiplient localement, gagnent les ganglions satellites, puis le sang. Elles sont alors capables de parasiter les cellules de l’endothélium vasculaire de tous les tissus : peau, système nerveux central, myocarde, créant ainsi une vascularite qui explique les signes cliniques de la maladie : exanthème, céphalées, stupeur, collapsus cardio-vasculaire, splénomégalie, pneumonie.
V – DIAGNOSTIC BACTÉRIOLOGIQUE DES RICKETTSIOSES :
A – Direct :
L’isolement se fait par inoculation directe par voie intrapéritonéale au cobaye du sang ou autres produits pathologiques provenant du malade. Inoculation presque au lit du malade en raison de la fragilité des germes.
L’isolement du sang de R. conorii peut se faire assez aisément par une technique de centrifugation sur fibroblastes humains (HEL, MRC5). Le risque de l’isolement de R. conorii n’est pas supérieur à celui du virus grippal.
La culture des autres rickettsies sur différentes lignées cellulaires ou l’œuf embryonné, ne peut se réaliser que dans des laboratoires équipés et spécialisés (laboratoire de confinement) de classe 3. De nouvelles approches diagnostiques font appel aux sondes moléculaires et l’amplification génomique (Polymerase Chain Reaction : PCR). L’oeuf embryonné peut également être utilisé. L’identification est réalisée par immunofluorescence à l’aide d’immunsérums spécifiques.
B – Diagnostic indirect :
1. Réaction de Weil-Félix :
Weil et Félix avaient isolé un Proteus à partir de l’urine d’un malade atteint de typhus pensant qu’ils avaient affaire à l’agent pathogène, ils ont réalisé une réaction d’agglutination avec le sérum du malade qui se révéla positive. Cette méthode ancienne est abandonnée manquant de sensibilité et de spécificité. Elle reposait sur les communautés antigéniques entre Proteus OX 19 – OX K – OX 2 et les rickettsies sauf Coxiella burnetii.
2. Microagglutination de Giroud :
Cette technique consiste à mettre en présence des suspensions de rickettsies avec le sérum décomplémenté du malade. Elle tend à être abandonnée.
3. Réaction de Fixation du Complément :
Elle utilise un antigène soluble extrait par l’éther — réaction spécifique et sensible réalisée avec chacun des groupes : typhus, fièvres boutonneuses et fièvre Q, taux parfois peu élevés.
4. Immunofluorescence indirecte :
Réaction sensible et dont l’usage se développe pour faire le diagnostic de : fièvre Q, fièvre boutonneuse, typhus murin. Des antigènes rickettsiens prêts à l’emploi sont commercialisés. C’est actuellement la méthode de référence de l’OMS et il faut rechercher systématiquement les anticorps de classe IgG et IgM. Des réactions croisées donnant des faux positifs s’observent exclusivement avec les IgM (Proteus, Legionella).
5. Hémagglutination indirecte – Test au latex :
L’antigène est représenté par un complexe protéines-hydrates de carbone de R. rickettsii traité par la chaleur en milieu alcalin. Techniques plus simples et rapides, commercialisées.
VI – LA FIÈVRE Q – COXIELLA BURNETII :
Coxiella se distingue des Rickettsia par sa plus grande résistance aux agents extérieurs et par des caractères antigéniques différents.
Les Coxiella ont des caractères de structure de bactéries à Gram négatif.
La résistance est très grande et les Coxiella peuvent survivre plusieurs mois à la température du laboratoire, sur des vêtements ou en suspension dans le lait (paille, fumier, placentas desséchés infectés).
La fièvre Q ou Query fever est une zoonose de répartition mondiale. C. burnetii est responsable d’avortement épizootique et de mortinatalité chez le bétail. Rongeurs, ovins, caprins, bovins constituent le réservoir de virus. L’homme se contamine directement à leur contact (par le lait, les délivres contaminées) mais aussi par les poussières. La transmission par des arthropodes vecteurs est tout à fait négligeable.
La contamination se fait par voie aérienne ou muqueuse. Professions exposées : agriculteurs, vétérinaires, employés d’abattoirs, bouchers.
A – Clinique :
Après une incubation de 2 à 3 semaines, le début est brutal. La maladie a les caractères suivants : céphalées, fièvre à 39°C en plateau puis courbe en dents de scie, rechutes fréquentes, sueurs profuses, asthénie, localisation pleuro-pulmonaire avec signes de broncho-pneumonie et infiltrats mal délimités, allure de pneumopathie atypique.
Les complications sont rares. La guérison survient vers la troisième semaine, mais fatigue et asthénie persistent longtemps. L’endocardite de la fièvre Q a une incidence probablement sous estimée, se présentant comme une endocardite subaiguë ou chronique à hémoculture négative.
Ce tableau clinique peu spécifique, peut donc faire évoquer toute autre pneumonie atypique ou encore faire penser à une brucellose étant donné le contexte épidémiologique.
L’incidence de cette zoonose est méconnue en France.
B – Physiopathologie :
Le statut immunitaire de l’hôte semble déterminant dans l’expression clinique de la fièvre Q. Des cas de fièvres Q ont été rapportés en liaison avec une immunodépression (hémopathie, cancer, infection VIH, transplantation). Le LPS jouerait un rôle dans le déterminisme de la maladie. C. burnetii est caractérisée par un phénomène de variation de phase.
La phase 1 est la forme sauvage et virulente, la phase II est atténuée et obtenue par passages successifs au laboratoire. Le LPS phase 1 ne permet pas la fixation de la fraction €3 du complément et a une action protectrice de la lyse.
C – Diagnostic :
II repose sur la mise en évidence du germe. C. burnetii peut être cultivée à partir de produits de biopsie (foie, peau, valves) ou de sang. Les méthodes possibles sont l’inoculation au cobaye et la culture sur oeuf embryonné. Les cultures cellulaires présentent des risques de contamination du personnel de laboratoire et toutes ces recherches doivent être réservées à des laboratoires spécialisés. Toutefois les cultures cellulaires sont beaucoup moins dangereuses que les animaux qui excrètent C. burnetii.
C. burnetii peut être révélée par immunofluorescence directe dans les produits pathologiques.
La PCR permettra également de détecter le génome bactérien et de distinguer les souches responsables de formes aiguës et de formes chroniques à l’aide de deux jeux de primers, l’un détectant l’ADN de C. burnetii, l’autre une séquence plasmidique caractéristique des souches de forme chronique.
La sérologie reste toutefois le moyen le plus fiable et le plus facile :
– réaction de fixation du complément avec les deux antigènes de phase 1 et II. La réponse est cependant tardive et manque de sensibilité, les anticorps anti-phase ne sont plus précoces mais l’existence d’anticorps anti-phase 1 est utile dans le diagnostic d’endocardites ;
– l’immunofluorescence indirecte est sensible et spécifique, la séparation IgG, IgM, IgA affine le diagnostic en particulier une augmentation des anticorps de type IgA est souvent spécifique des endocardites ;
– une technique ELISA est proposée.
VII – TRAITEMENT DES RICKETTSIOSES ET DE LA FIÈVRE Q :
A – Traitement curatif :
II repose sur des antibiotiques à pénétration intra-cellulaire :
– tétracyclines et en particulier doxycycline, minocycline ;
– le chloramphénicol peut également être utilisé ;
– la rifampicine, l’érythromycine et la ciprofloxacine ont été préconisées.
B – Traitement préventif et prophylaxie :
Mesures antiparasitaires : différentes suivant le réservoir de virus et les vecteurs ; en présence de typhus, lutte contre les poux, les puces et les rats (dératisation des ports et des navires). Il n’y a pas encore de vaccin efficace pour les fièvres pourprées. Après une succcession d’essais « historiques » (Blanc, Baltazard, Laigret, Giroud, Zinsser, Haagen, Cox), un vaccin pour le typhus existe, dérivé des travaux de Cox, préparé à partir d’une suspension de rickettsies cultivées sur œuf embryonné et formolées.
Pour la fièvre Q : vaccination du bétail, mais la diversité des sources de contamination font que ces mesures sont peut-être insuffisantes.
Pour la fièvre boutonneuse méditerranéenne, sachant que la tique ne pique l’hôte que quelques heures après s’y être fixée, il est utile d’inspecter le corps et les vêtements après avoir traversé une zone endémiquement infestée et de vérifier si la tique contient du sang dans son abdomen, preuve de piqûre.