– En 1820, Bretonneau montra la contagiosité de la fièvre typhoïde qu’il appelait alors dothiénentérite.
– En 1880, Eberth observa le premier le bacille dans les organes d’un malade mort de typhoïde.
– En 1884, Graffky réussit la culture de ce bacille.
– En 1896, Widal montra que le sérum de malades atteints de fièvre typhoïde agglutinait des cultures du bacille d’Eberth. C’était là le premier séro-diagnostic, technique dont on connaît le succès ultérieur pour l’aide au diagnostic des maladies infectieuses.
– En 1930, Kauffmann et White développèrent une classification des bactéries voisines du bacille d’Eberth basée sur l’identification de leur antigènes.
– En 1939, Reilly montra le rôle du système neuro-végétatif dans la pathogénie de la typhoïde.
I – TAXONOMIE ET NOMENCLATURE :
Les travaux taxonomiques les plus récents ont montré que le genre Salmonella ne comprend qu’une seule espèce Salmonella enterica composée de 7 sous-espèces qui correspondent aux anciens sous-genre I, II, III et IV de Kauffmann. La dénomination S. enterica a été préférée à celle initialement proposée de 5′. choleraesuis qui désigne aussi un sérovar. Les différentes sous-espèces sont :
sous-espèce I Salmonella enterica subspecies enterica
sous-espèce II Salmonella enterica subspecies salamae
sous-espèce IIIa Salmonella enterica subspecies arizonae
sous-espèce IIIb Salmonella enterica subspecies diarizonae
sous-espèce IV Salmonella enterica subspecies houtenae
sous-espèce V Salmonella enterica subspecies bongori
sous-espèce VI Salmoenlla enterica subspecies indica
Ces sous-espèces sont elles-mêmes subdivisées en sérovars (ou sérogroupes) sur la base des constituants antigéniques (0, H et Vi). La sous-espèce 1 représente plus de 99,5 % des souches isolées en pathologie. La désignation des sérovars qui antérieurement correspondaient à des noms d’espèce, en particulier ceux de la sous-espèce I, avait été choisie selon le syndrome (5′. typhi), la spécificité d’hôte (typhimurium, choleraesuis) puis sur l’origine géographique de la première souche du nouveau sérovar (dublin). Ces dénominations ont été conservées, mais l’écriture en est modifiée : la sous-espèce n’est pas mentionnée car tous les sérovars sont de la sous-espèce 1 et le nom débute par une majuscule (Salmonella Typhimurium, S.
Montevideo) et n’est plus écrit en italique. Les sérovars des autres sous-espèces sont désignés uniquement par leur formule antigénique (S. salamae 1, 9, 12 : 1, w : e, n, x).
En 1987, 2213 sérovars : 1299 dans la sous-espèce I, 445 dans la sous-espèce II, 296 dans la IIIb, 91 dans la IIIa, 59 dans la IV, 14 dans la V et 9 dans la VI étaient identifiés. Les souches de la sous-espèce 1 proviennent généralement d’animaux à sang chaud et cette sous-espèce est pratiquement la seule à avoir un intérêt médical. Les autres sous-espèces sont généralement isolées d’animaux à sang froid ou de l’environnement.
II – HABITAT ET ÉPIDÉMIOLOGIE :
S. Typhi et S. Paratyphi A sont strictement adaptées à l’homme. Il n’est pas possible de reproduire la fièvre typhoïde chez l’animal par administration per os.
La transmission de la fièvre typhoïde d’homme à homme se fait par l’intermédiaire d’eau ou d’aliments (coquillages) souillés par des selles de malades ou de convalescents, porteurs sains.
En France S. Typhi est plus souvent isolée que S. Paratyphi. Il n’y a plus d’épidémies importantes mais des foyers localisés ; cependant on peut estimer à plus d’un millier le nombre des cas observés dans une année. L’augmentation du nombre de cas contractés dans les pays méditerranéens est à souligner. Il n’existe pas en France de cas autochtones de salmonelloses dus à S. Paratyphi A. La contamination des malades se fait à l’étranger.
Les Salmonella autres sont avant tout des parasites du tube digestif de l’homme et des animaux. Les sérotypes qui, contrairement aux précédents n’ont pas de spécificité d’hôte, sont dits ubiquitaires. Après la maladie, certains sujets restent porteurs sains et éliminent pendant plusieurs mois des Salmonella dans leurs selles. Les Salmonella sont retrouvées dans le milieu extérieur, dans les eaux d’égout en particulier. Des Salmonella sont aussi fréquemment retrouvées dans les farines de poisson ou poudres d’os utilisées pour l’alimentation des animaux.
La contamination de l’homme se fait par voie buccale. La fréquence des infections à Salmonella est en augmentation. Elle est favorisée par le développement des repas pris en collectivité où les aliments sont préparés bien avant d’être consommés et dans lesquels les bactéries peuvent se multiplier.
S. Typhimurium est rencontrée dans tous les pays. Elle est la plus souvent identifiée au Centre National des Salmonella de l’Institut Pasteur. Elle est isolée chez l’homme, chez les animaux et dans l’environnement.
S. Typhimurium occupe la première place dans l’étiologie des toxi-infections alimentaires. Pratiquement toutes les denrées peuvent héberger quelques Salmonella ; mais les denrpes d’origine animale jouent le rôle principal. Tout défaut dans la conservation des aliments (ce qu’il est convenu d’appeler la chaîne du froid) permet la multiplication des quelques Salmonella éventuellement présentes.
L’ingestion de 106 bactéries entraîne une toxi-infection alimentaire.
Certains sérotypes, jusqu’alors exceptionnellement isolés, peuvent avoir une diffusion épidémique importante. Ce fut le cas à partir de 1972 pour S. Wien. En 1984, S. Goldcoast a présenté une « bouffée », consécutive à la consommation de pâté contaminé. En 1985, S. Bovismorbificans a eu une diffusion importante en France.
Depuis 1987, la fréquence d’isolement de S. Enteritidis augmente fortement pour être en 1989 le deuxième sérovar le plus fréquemment isolé chez l’homme. Cette flambée d’infection à S. Enteritidis est préoccupante et correspond dans la majorité des cas à la consommation d’oeufs de poule. Les mesures de prévention doivent s’appliquer en aval, au niveau de l’utilisation des oeufs avec les précautions habituelles concernant la chaîne du froid pour les préparations sans cuisson, mais surtout en amont, au niveau de la production des oeufs, compliquée par la transmission verticale (voie transovarienne) de l’infection à S. Enteritidis (lysotype 33).
Les 15 sérovars les plus fréquents, représentant 84 % des souches isolées chez l’homme sont indiqués dans le tableau II.
III – POUVOIR PATHOGÈNE :
Les salmonelloses peuvent revêtir trois aspects :
A – Les formes septicémiques :
Ce sont les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes dues à S. Typhi, S. Paratyphi A, B et rarement C. Ce sont des septicémies à point de départ lymphatique.
Chez le nouveau-né ou le jeune enfant, d’autres sérotypes comme S. Panama ou S. Wien peuvent être responsables de septicémies qui mettent en jeu le pronostic vital.
B – Les salmonelloses purement digestives :
Les toxi-infections alimentaires à Salmonella se manifestent par des diarrhées, de la fièvre, et des vomissements. Les premiers signes surviennent 8 à 10 heures après l’ingestion de l’aliment contaminé. L’évolution de ces gastro-entérites est en règle générale spontanément favorable en quelques jours.
Les entérites à Salmonella s’observent principalement chez le jeune enfant. Des épidémies peuvent survenir dans des collectivités de nourrissons.
La fréquence des entérites à Salmonella au cours du S.I.D.A. est à noter.
C – Les formes extra-digestives :
Elles sont plus rares ; infections urinaires, cholécystistes, méningites, ostéomyélites, spondylodiscites, infections pulmonaires. Ces formes surviennent plus volontiers chez des malades immuno-déprimés. Les déficits enzymatiques des globules rouges et la drépanocytose sont des circonstances favorisantes.
IV – PHYSIOPATHOLOGIE :
Au cours de la fièvre typhoïde, les Salmonella ingérées pénètrent dans les cellules des plaques de Peyer et colonisent les ganglions lymphatiques intestinaux. Elles disséminent par voie sanguine, en réalisant une septicémie à point de départ lymphatique. Au cours de la maladie il est possible de trouver des Salmonella dans les urines.
Les Salmonella peuvent se développer dans la bile et survivre dans les canalicules et la vésicule biliaire où il est difficile de les éradiquer. Leur persistance à ce niveau entraîne un état de portage chronique.
Une partie des corps bactériens en se lysant libère de l’endotoxine ou LPS qui atteint par voie sanguine les centres neuro-végétatifs, ce qui entraîne le tuphos et le collapsus cardio-vasculaire. En injectant expérimentalement à des lapins de l’endotoxine au voisinage du nerf splanchnique, Reilly a pu reproduire des lésions du tube digestif, montrant ainsi le rôle du système neuro-végétatif.
V – CARACTÈRES D’IDENTIFICATION :
A – Caractères de la sous-espèce 1 :
Les Salmonella ont les caractères morphologiques culturaux et métaboliques décrits plus haut comme étant communs à toutes les Enterobacteriaceae. Les caractères qui permettent d’identifier les souches appartenant à la sous-espèce 1 ou S. enterica subsp enterica sont les suivants :
– bacilles mobiles,
– produisant du gaz en glucose (sauf S. Typhi),
– lactose et ONPG négatifs,
– possédant une LDC et une ODC,
– utilisant le citrate de Simmons comme seule source de carbone,
– ne possédant ni uréase, ni TDA, ni gélatinase,
– ne fermentant pas le saccharose, le raffinose et la salicine,
– la réaction de Voges-Proskauer (VP) est négative.
Le phage 01 de Félix et Callow lyse 98 % des souches de Salmonella et pas les autres Enterobacteriaceae. La mise en évidence de cette lyse est simple. On procède comme pour un antibiogramme. Au lieu de déposer des disques d’antibiotiques à la surface de la gélose on y laisse tomber une goutte d’une suspension du phage 01.
Il est important de noter quelques exceptions à ces caractères fondamentaux :
– Un sérovar aviaire, S. Gallinarum est immobile ;
– S. Paratyphi A ne produit pas d’H^S et est LDC négatif ;
– S. Typhi ne produit pas de gaz en glucose et produit peu ou pas d’H^S ;
– S. Typhi et S. Paratyphi A n’utilisent pas le citrate de Simmons ;
– Le sérovar S. Choleraesuis ne produit pas d’H^S.
B – Caractères des autres sous-espèces :
En raison de leur faible incidence en bactériologie médicale nous renvoyons le lecteur intéressé à l’article de Le Minor, Véron et Popoff cité en bibliographie de ce chapitre. Indiquons seulement que ces sous-espèces se distinguent de la sous-espèce 1 par les caractères suivants : ONPG, gélatinase, utilisation du malonate et culture sur milieu au KCN. Ces quatre caractères sont négatifs simultanément pour les seules souches appartenant à la sous-espèce 1.
C – Diagnostic différentiel :
Trois Enterobacteriaceae, commensales du tube digestif de l’homme, peuvent lors d’une identification sommaire être confondues avec les Salmonella. Ce sont Hafnia alvei, Citrobacter freundii et Proteus mirabilis. Les caractères différentiels avec les Salmonella sont indiqués dans le tableau II.
– Citrobacter freundii n’a pas de LDC et est ONPG (+) ;
– Hafnia alvei ne produit pas d’H2S, est VP (+) à 22°C et est généralement ONPG (+) ;
– Proteus mirabilis possède une uréase et une tryptophane-désaminase.
N’étant pas des Salmonella, aucune de ces trois espèces n’est lysée par le phage 01.
VI – CLASSIFICATION SÉROLOGIQUE :
Elle est basée sur la détermination, par agglutination sur lame, des antigènes 0, H et Vi. Il existe plus de 2 000 sérovars, mais avec un nombre limité de sérums agglutinants, tout laboratoire peut typer la majorité des souches de Salmonella qu’il isole. Le typage des sérovars rares nécessite l’intervention d’un laboratoire de référence.
A – Antigènes 0 :
La spécificité de chacun des 67 antigènes 0 répertoriés est déterminée par sa composition, c’est-à-dire par la structure des polysaccharides de la paroi bactérienne.
Les formes R. Ce sont des mutants, non pathogènes, qui ont perdu par délétion une grande partie de la chaîne polysaccharidique responsable de la spécificité 0. Ces souches ne sont plus sérotypables et sont auto-agglutinables dans de l’eau physiologique.
Les formes T (de transition). Ces souches sont rares. Elles donnent des colonies ayant l’aspect S, mais elles ont perdu leur spécificité 0, comme les formes R.
Les bactériophages dits convertisseurs. Ils peuvent par lysogénie produire des modifications de la structure antigénique 0 des Salmonella. Les facteurs antigéniques 0 qui sont liés à une conversion phagique peuvent être présents ou absents. Ils sont soulignés dans le tableau de Kauffmann-White.
B – Antigènes H :
Les flagelles sont constitués d’une molécule protéique, la flagelline, dont la composition en acides aminés détermine le type antigénique H. Cette composition est codée par un gène de structure H) pour la phase 1 et un gène H2 pour la phase 2.
Certains sérotypes sont monophasiques. Ils ne peuvent synthétiser de la flagelline que d’une seule spécificité.
La plupart des sérotypes sont diphasiques. Ils peuvent synthétiser des antigènes H soit de la phase 1, soit de la phase 2.
Les antigènes de la phase 1 sont désignés par des lettres : a, b, c … z. Comme l’alphabet n’y suffisait pas, les plus récemment reconnus sont désignés par un z suivi d’un nombre. Les antigènes de la phase 2 sont désignés par des chiffres.
Inversion de phase. Lorsque dans une culture, la majorité des bactéries est par exemple en phase 1, la quantité d’antigènes de la phase 2 est trop faible pour être détectée. L’inversion de phase consiste à ensemencer la souche dont la phase 1 est connue dans une gélose molle en présence de sérum correspondant à cette phase 1.
Seules les bactéries qui ne sont pas immobilisées par ce sérum, donc qui sont de l’autre phase, peuvent migrer dans la gélose molle et être recueillies à distance du point d’ensemencement. Cette population entièrement constituée de bactéries en phase 2 est utilisée pour la détermination de la deuxième phase. Cette technique est connue sous le nom de méthode de Sven-Gard.
C – Antigène Vi :
Ce polyoside capsulaire n’est trouvé que de façon inconstante chez trois sérotypes : S. Typhi, S. Paratyphi C, S. Dublin.
Les souches Vi + qui produisent une quantité importante d’antigène Vi sont 0-inagglutinables. Elles deviennent habituellement 0-agglutinables après un chauffage à 100°C qui fait passer l’antigène Vi dans le surnageant.
D – Le tableau de Kauffmann-White :
Ce tableau indique pour chaque sérovar les antigènes 0, Vi et H dont la détermination est utile pour le typage sérologique. A chaque sérovar correspond une formule antigénique. Par exemple, S. Virchow : 6,7 : r : 1,2.
Dans ce tableau, les sérovars qui ont des antigènes 0 communs caractéristiques sont rassemblés pour former un groupe 0 désigné par une lettre A, B, C, D etc.
Exemple : les sérovars du groupe B ont tous l’antigène 04 et ceux du groupe D, l’antigène 09.
A l’intérieur de chaque groupe 0, les sérovars apparaissent d’après l’ordre alphabétique de la phase 1 de leur antigène H.
Les facteurs entre parenthèses peuvent être absents.
Les chiffres de la colonne N correspondent à l’ordre de fréquence d’isolement des sérotypes les plus fréquents qui représentent 84 % des souches isolées de l’homme en France en 1989 (B.E.H. 1990,16,69).
VII – MARQUEURS ÉPIDÉMIOLOGIQUES :
Ils servent à comparer des souches appartenant à un même sérovar pour rechercher l’origine d’une contamination. Plusieurs types de marqueurs sont utilisables.
– Antibiotypie. Par simple antibiogramme, une souche possédant de nombreux caractères de résistance peut être distinguée d’une souche sensible.
– Biotypie. Elle consiste à comparer certains caractères métaboliques variables au sein d’un même sérotype. Exemple : l’utilisation du d-tartrate par S. Paratyphi B, variété Java.
– Lysotypie. La souche à tester est soumise à l’action d’une série de bactériophages virulents actifs sur le groupe auquel appartient la souche. La sensibilité aux phages nécessite la présence de récepteurs de surface spécifiques qui sont des caractères génétiques stables pour chaque souche. Le lysotype est la liste des phages lytiques pour la souche étudiée.
– Bactériocinotypie ou colicinotypie. Des substances initialement décrites chez E. coli, sont produites par certaines souches et sont capables de lyser d’autres souches de la même espèce ou d’espèces voisines. La détection des bactériocines et la détermination du lysotype ne sont effectuées que par des laboratoires spécialisés.
VIII – DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE D’UNE INFECTION A SALMONELLA :
II faut toujours chercher à isoler le germe au cours d’une salmonellose. Cela permet sa caractérisation précise pour une enquête épidémiologique et l’étude de sa sensibilité aux antibiotiques. Le sérodiagnostic de Widal et Félix n’est utile que pour les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes. Le séro-diagnostic n’est qu’une méthode indirecte et des réactions croisées sont possibles même avec des bactéries autres que les Salmonella.
A – Diagnostic direct ; Isolement des Salmonella :
1. Hémocultures :
. Elles sont faites de préférence lors des ascensions thermiques. Il est souhaitable que chaque prélèvement recueille environ 10 ml de sang car le nombre de bactéries par ml de sang est souvent faible au cours des fièvres typhoïdes.
La réalisation ne pose pas de problèmes techniques : les Salmonella poussent sur milieux usuels. L’hémoculture est surtout utile lors des fièvres typhoïdes et paratyphoïdes. Pendant le premier septénaire, elle est positive dans 90 % des cas. Le taux de positivité tombe à 40 % pendant le troisième septénaire.
L’hémoculture peut être positive lors des entérites du jeune enfant. Sa positivité est exceptionnelle dans les entérites de l’adulte et les toxi-infections alimentaires.
2. Coprocultures :
a/ Indications :
– Une coproculture doit être pratiquée dès que l’on suspecte une infection à Salmonella.
– Au cours de fièvres typho-paratyphoïdiques, elle reste plus longtemps positive que l’hémoculture.
– Au cours des entérites et des toxi-infections alimentaires, la coproculture est positive alors que les hémocultures restent négatives.
– Après traitement, la coproculture permet de vérifier que le malade ne reste pas porteur sain. L’élimination des Salmonella pouvant être intermittente, il y a donc lieu de faire deux coprocultures à une semaine de distance.
– Une coproculture systématique annuelle est préconisée pour les personnes employées dans des cuisines ou dans l’industrie alimentaire.
b/ Technique :
Au cours des salmonelloses, l’excrétion de germes dans les selles peut être faible.
De plus les Salmonella sont en nombre inférieur à des espèces commensales : Escherichia coli et Proteus. Il faut donc, pour les isoler, utiliser à la fois des milieux d’enrichissement et des milieux sélectifs.
– A l’arrivée du prélèvement un milieu d’enrichissement et un milieu sélectif sont ensemencés. Un très grand nombre de milieux ont été proposés. Notamment pour la bactériologie alimentaire. Nous indiquons ici les milieux le plus usuellement adoptés en bactériologie médicale.
Milieux d’enrichissement
Ils permettent à l’aide d’antiseptiques sélectifs inhibant les autres bactéries d’accroître la proportion de Salmonella. Un bouillon de Miiller-Kauffmann au tétrathionate ou un bouillon au sélénite de sodium sont ensemencés et repiqués après une incubation de 18 heures à 37°C.
Milieux sélectifs
Ces milieux géloses contiennent des antiseptiques, des sels biliaires qui empêchent la croissance de certaines espèces bactériennes et inhibent l’envahissement par les Proteus. Ils permettent de repérer les colonies suspectes par la fermentation de certains sucres (lactose) et la production d’H2S. La gélose Hektoen est généralement préférée au milieu SS (Salmonella-Shigella).
– Le deuxième jour, après incubation de ces milieux à 37°C :
– Le milieu d’enrichissement est repiqué sur un milieu sélectif qui sera examiné le lendemain.
Cinq colonies suspectes (lactose (-) et H2S (+)) repérées sur le milieu sélectif ensemencé la veille, sont l’objet d’une caractérisation biochimique succincte, puis, si les caractères sont ceux d’une Salmonella d’une identification précise et enfin d’un sérotypage.
3. Autres prélèvements :
Dans la bile la recherche de Salmonella se fait de façon analogue à la coproculture.
Dans les autres produits pathologiques, urines, pus divers, la présence d’une Salmonella est généralement une découverte fortuite du laboratoire.
L’analyse des aliments contaminés en utilisant des milieux sélectifs et des milieux d’enrichissement est la meilleure façon d’isoler une Salmonella responsable d’une toxi-infection alimentaire.
B – Diagnostic indirect : le séro-diagnostic de Widal et Félix
II n’est utile que pour le diagnostic des fièvres typhoïdes et paratyphoïdes A, B et C et est sans intérêt pour les autres salmonelloses.
Lorsque le malade est vu tardivement ou s’il a bénéficié d’une antibiothérapie appliquée à l’aveugle, l’isolement de la bactérie n’est souvent plus possible. C’est alors que le sérodiagnostic de Widal et Félix a son intérêt. Il permet de rechercher les anticorps anti-0 et anti-H dans le sérum. Mais de nombreuses causes d’erreurs existent et l’interprétation est parfois délicate. C’est pourquoi la prescription d’un sérodiagnostic de Widal et Félix doit toujours être accompagnée de celle d’une coproculture voire d’une hémoculture visant à isoler la Salmonella.
1. Principe et réalisation :
II s’agit de rechercher dans le sérum des malades les agglutinines correspondant aux antigènes somatiques 0 et aux antigènes flagellaires H de Salmonella Typhi et des
Salmonella Paratyphi A, B et C.
La recherche d’agglutinines Vi n’a aucun intérêt pratique
Pour cela on utilise des suspensions antigéniques TO, TH, AO, AH, BO, BH, CO et CH. Ces suspensions antigéniques sont consituées de bactéries tuées, traitées soit par l’alcool qui détruit les antigènes H, soit par le formol qui détruit les antigènes 0.
Dans une série de tubes, chaque suspension antigénique est mise en présence de dilutions croissantes du sérum du malade, pour déterminer le titre des agglutinines.
La lecture est faite soit après une centrifugation de 10 minutes (méthode rapide), soit après 2 heures à l’étuve à 37°C.
2. Résultats normaux :
Les agglutinines 0 apparaissent vers le 8e jour de la maladie, et les agglutinines H vers le 10-12e jour. A la période d’état, il y a simultanément des agglutinines 0 et H.
Le titre de ces dernières est plus élevé (par exemple TO = 1/200 ; TH = 1/800).
Les agglutinines 0 disparaissent normalement en 2 à 3 mois. Les agglutinines H persistent plusieurs années après une infection ou une vaccination antityphoparatyphoïdique A et B. La présence seule d’agglutinines 0 témoigne d’une infection récente.
Une fièvre typhoïde peut parfois s’observer chez un vacciné : dans ce cas, il y a présence simultanée d’agglutinines TH, AH, BH et d’agglutinines 0.
Il n’y a pas de relation entre le titre des agglutinines et la gravité de la maladie.
3. Résultats faussement positifs :
– La présence d’agglutinines TO seules peut être due à une infection par une Salmonella ayant un antigène 0 commun avec S. Typhi, mais des antigènes H différents. Il s’agit le plus souvent de 5′. Enteritidis.
– De même la présence d’agglutinines BO seules peut être due à une infection à S. Typhimurium, par exemple.
– Certaines souches de Yersinia pseudotuberculosis, à cause de communautés antigéniques, peuvent donner une agglutination avec BO (sérogroupe II) ou avec TO (sérogroupe IV)
– Des réactions faussement positives peuvent être observées au cours de certaines maladies : paludisme, typhus exanthématique, dysglobulinémies (myélomes, collagénoses, cirrhoses) et infections diverses par des Entérobactéries.
4. Résultats faussement négatifs
– Le sérodiagnostic de Widal est négatif pendant le premier septénaire.
– Un traitement précoce par des antibiotiques ou des corticoïdes peut empêcher l’élévation du taux des anticorps.
– n existe des cas rares de typhoïde authentique sans élévation du taux des anticorps.
IX – TRAITEMENT :
Un antibiogramme est effectué sur toute souche de Salmonella isolée autant pour caractériser cette souche que pour orienter le traitement antibiotique qui n’est pas systématique pour toutes les salmonelloses digestives.
A – Fièvres typhoïdes et paratyphoïdes :
Les souches isolées en France demeurent généralement bien sensibles aux antibiotiques, contrairement à ce qui a été observé lors d’épidémies au Mexique, au Viet-Nam et au Pérou.
Les antibiotiques de choix sont ceux qui ont une bonne concentration dans les ganglions lymphatiques : chloramphénicol ou triméthoprime-sulfaméthoxazole.
L’ampicilline a une concentration lymphatique moins bonne, par contre elle a une bonne élimination biliaire.
Les antibiotiques administrés par voie orale assurent une meilleure concentration lymphatique. C’est le cas des fluoriquinolones.
Contrairement à la règle générale en antibiothérapie, les antibiotiques ont été classiquement donnés à posologie progressive pour éviter une lyse microbienne massive et les inconvénients dus à la libération brutale d’endotoxine.
B – Entérites et toxi-infections alimentaires :
Seules les formes sévères chez le nourrisson ou chez le vieillard sont traitées par les antibiotiques. Dans les autres cas où le pronostic est favorable, un traitement symptomatique suffit.
C – Porteurs sains :
Les personnes qui, au décours de la maladie, continuent d’éliminer des Salmonella dans leurs selles ne doivent pas être traitées par les antibiotiques. Ceux-ci sélectionnent des souches résistantes et sont sans action sur la durée du portage. Seules des mesures d’hygiène sont à préconiser.
X – PRÉVENTION :
A – L a vaccination :
Le vaccin TAB, injectable, constitué de bactéries entières inactivées, mal toléré et conférant une protection de qualité médiocre n’est plus le cauchemar des jeunes incorporés dans l’armée française et des rares catégories de personnes pour lesquelles cette protection est obligatoire.
Deux vaccins ont été mis au point. L’un est un vaccin vivant atténué (souche mutante Ty 2 la), utilisable par voie orale. L’autre, disponible en France (TYPHIM Vi®) est un vaccin injectable constitué par le polyoside capsulaire de S. Typhi ou Ag Vi obtenu purifié sous sa forme 0-acétylée native. Innocuité et efficacité sont les qualités de ce vaccin qui a permis de conférer 72 % et 64 % de protection en milieu à forte incidence (Népal, Afrique du Sud).
B – L’hygiène :
Hygiène collective. C’est la prévention du péril fécal par le contrôle bactériologique de l’efficacité du réseau de distribution d’eau potable et l’installation de réseaux d’assainissement.
C’est aussi le contrôle de la qualité bactériologique des denrées alimentaires.
Hygiène individuelle. C’est la détection des porteurs sains notamment parmi le personnel des cuisines ou des industries alimentaires.