A- Généralités :
1- Définition :
La cyanose est une coloration bleutée des téguments et des muqueuses qui apparaît lorsque le sang capillaire contient au moins 5g d’hémoglobine réduite pour 100 ml.
2- Clinique :
Cliniquement, une cyanose discrète peut être de diagnostic difficile. Elle est plus visible au niveau des extrémités et des muqueuses (ongles des mains et des pieds, lèvres, oreilles, langue).
Elle peut être intermittente, n’apparaissant qu’à l’effort (cris, biberons chez le tout petit). D’autre part, l’existence et l’intensité de la cyanose sont, à hypoxie égale, fonction du chiffre globulaire : l’anémie la diminue, la polyglobulie l’augmente.
3- Conséquences cliniques de la cyanose :
* L’hippocratisme digital : ongles en verre de montre, doigts en baguette de tambour.
* Polyglobulie +++ : conséquence de l’anoxie => hyperviscosité sanguine génératrice de thromboses, et en particulier d’accidents vasculaires cérébraux.
* Accroupissement ou « squatting »: particulièrement dans la tétralogie de Fallot. L’enfant reste volontiers accroupi, assis sur ses talons.
* Acidose métabolique, conséquence de l’anoxie tissulaire, prescrire un peu d’eau alcaline le matin.
* Accès de cyanose paroxystique : ce sont les accidents neurologiques paroxystiques des cyanoses congénitales. Ils sont souvent déclenchés par les cris, les pleurs, les efforts.
Brusquement la cyanose s’accentue et il apparaît une hypotonie puis une perte de connaissance brève. Dans d’autre cas, c’est une pâleur subite, ou un teint gris, suivi d’une PC (syncope « bleue » et syncope « blanche »): mort subite possible au cours des accès.
* Complications neurologiques : AVC= complications redoutables et fréquentes des cyanoses : par thrombose artérielle ou veineuse, par abcès du cerveau (greffe de germes échappant au filtre pulmonaire), par endocardite infectieuse anévrysmes mycotiques, embols septiques).
B- Tétralogie de Fallot :
1- Elle associe 4 éléments :
– Deux fondamentaux: CIV et sténose pulmonaire, valvulaire et/ou infundibulaire et/ou supravalvulaire. En général, il s’agit d’une hypoplasie étendue de l’arbre artériel pulmonaire.
– Deux contingents: aorte « à cheval » sur le septum I.V (dextroposition) et HVD réactionnelle.
2- Physiopathologie :
C’est le prototype de la cardiopathie cyanogène par obstacle associé à une communication anormale d’amont: il existe une surcharge de volume (par la CIV) et de pression du VD (en raison de la sténose pulmonaire), aboutissant à une HVD et à une inversion du shunt, qui devient D-G lorsque la pression VD devient supérieure à la pression VG.
3- Clinique :
– Signes fonctionnels : ils sont dominés par la CYANOSE +++. Apparition en général RETARDEE (différent de la transposition), à quelques mois de vie, ou même quelquefois lors de la marche, parfois plus précoce dans les formes graves (elle apparaît lorsque le shunt s’inverse). Intensité variable d’un cas à l’autre.
– « Squatting », seulement visible à l’âge de la marche ; Dyspnée, fatigabilité d’effort ;
– Complications de la cyanose : syncopes ou malaises anoxiques, bleues ou blanches, au cours desquelles le souffle peut disparaître (obstruction pulmonaire complète): leur survenue impose un geste chirurgical rapide et la mise sous bêta-bloquant en attendant.
– Souffle : le plus souvent, souffle holosystolique, intense et frémissant, de CIV au 4ème EICG. Parfois, il prend un caractère plus éjectionnel et râpeux et 2ème-3ème EICG (souffle de RP superposé).
4- Signes radiologiques :
Habituellement, 3 éléments caractéristiques :
– pointe du cœur relevée (HVD), avec cœur de volume normal (cœur « en sabot »)
– arc moyen gauche très concave (hypoplasie AP)
– poumons clairs, hypovascularisés, branches de l’AP grêles.
Dans 1/3 des cas, crosse aortique à droite : le bouton aortique passe à droite de l’oesophage.
5- Évolution – Complications :
* Malaises anoxiques ++ surtout dans les formes avec sténose infundibulaire.
* Troubles neurologiques : thromboses vasculaires, hémiplégies, abcès cérébraux, dans les formes évoluées.
* Complications hématologiques : thromboses ; hémorragies (troubles de la crase sanguine) ; hyperuricémie avec goutte ;
* Endocardite infectieuse.
6- Traitement :
– Malaise anoxique : O2 +++ au masque ; Avlocardyl *IVD (1 ampoule de 5 mg: injecter jusqu’à cédation du malaise).
– Palliatif : anastomose de Blalock-Taussig (anastomose entre artère sous-clavière et branche de l’AP du même côté) permet d’oxygéner le sang, en court-circuitant l’obstacle pulmonaire. Indiquée lorsque la tolérance est mauvaise dans les premiers mois de vie, l’enfant étant trop petit pour faire une correction complète d’emblée : peu de cas actuellement.
– Correction complète sous CEC : un patch sur CIV + valvulotomie pulmonaire et/ou élargissement de la voie pulmonaire par patch.
Age de la correction complète : en général vers l’âge de 6 mois à 1 an (parfois plus tôt ou plus tard en fonction de la tolérance et de la forme anatomique). Le pronostic à long terme est excellent.
C- Transposition des gros vaisseaux :
La transposition complète des gros vaisseaux est une malformation dans laquelle l’aorte naît du VD et l’AP naît du VG, les cavités cardiaques restant par ailleurs dans leur position normale. L’OD reçoit normalement le sang veineux désaturé, qui passe dans le VD, puis dans l’aorte.
De même, l’OG reçoit le sang oxygéné des veines pulmonaires, qui passe dans le VG et dans l’AP. Il n’y a donc plus de circulation croisée et les 2 circulations, systémique et pulmonaire vont fonctionner en parallèle, totalement indépendantes l’une de l’autre.
Pour que la survie soit possible, il est donc indispensable qu’il existe de shunts bidirectionnels entre la grande et la petite circulation, grâce à des communications entre les cavités droites et gauches (CIV, CIA, PCA); la tolérance de la cardiopathie est d’autant moins mauvaise que ces shunts sont plus larges.
L’aorte est donc le vaisseau antérieur et l’AP le vaisseau postérieur; le plus souvent, l’aorte monte en avant et à droite de l’AP (transposition droite, ou D-transposition).
D- Syndrome d’Eisenmenger :
Il existe une grande HTAP « fixée » par « maladie artériolaire pulmonaire obstructive », avec élévation des résistances pulmonaire compliquant l’évolution d’un shunt G-D, avec inversion du shunt et apparition de la cyanose, en générale tardive.
=> Abstention opératoire (le stade de la chirurgie est dépassé).