Palpitations

Les palpitations correspondent à la perception anormale des battements cardiaques, qui habituellement ne sont pas perçus. Elles représentent un motif fréquent de consultation auprès du cardiologue.

Toute la difficulté consiste à différencier les palpitations bénignes, favorisées par le stress, d’un trouble du rythme nécessitant un traitement spécifique.

Palpitations
Palpitations

DIAGNOSTIC :

Interrogatoire :

Il est déterminant pour l’orientation diagnostique.

On recherche d’abord les éventuels antécédents cardiaques personnels (notion de cardiopathie congénitale, de souffle cardiaque) ou familiaux (notion de trouble du rythme, de cardiopathie ou de mort subite dans la famille), le mode de vie du patient (sportif ou sédentaire), et on évalue son anxiété vis-à-vis du symptôme.

Il est nécessaire de faire expliquer au patient de la façon la plus précise possible ce qu’il ressent. On lui demande donc de décrire les palpitations :

– leur circonstance de survenue : effort ou stress, repos ;

– leur périodicité, leur horaire de survenue, et leur durée ;

– leur tolérance : simple gêne, malaise, angor, dyspnée, voire syncope ;

– les facteurs favorisant leur survenue : digestion, prise d’excitants (café, thé, alcool) ;

– la séquence exacte de ce que ressent le patient : une impression isolée de battement plus fort que les autres évoque des extrasystoles ; des palpitations rapides et prolongées évoquent, si elles sont irrégulières, une fibrillation auriculaire ou, si elles sont régulières, une tachycardie jonctionelle, voire une tachycardie ventriculaire ; des palpitations lentes et régulières orientent plutôt vers une bradycardie et un trouble conductif ;

– on demande également au patient s’il a pris son pouls pendant les palpitations, ce qu’il a ressenti et s’il a compté la fréquence cardiaque ;

– enfin, on recherche des symptômes pouvant faire suspecter une cardiopathie sous-jacente : dyspnée d’effort ou de repos, douleurs d’allure angineuse, etc.

Examen clinique :

L’auscultation cardiaque recherche la présence d’uns souffle ou d’un galop, pouvant orienter vers une cardiopathie. Elle permet peut-être d’orienter le diagnostic vers des extrasystoles, ou vers une fibrillation auriculaire si le rythme est très irrégulier, voire vers une bradycardie. On recherche également une hypertension artérielle (HTA) et des signes pouvant évoquer une endocrinopathie, notamment une dysthyroïdie.

Examens complémentaires :

Leur stratégie dépend de la gravité des symptômes et de la présence ou non d’une atteinte cardiaque sévère sous-jacente : en cas de symptômes peu inquiétants, on privilégie la documentation de l’arythmie par les moyens non invasifs, alors qu’en cas d’atteinte cardiaque sévère sous-jacente, de symptômes inquiétants (malaises, syncope), ou d’antécédents familiaux de mort subite, on adopte une stratégie plus agressive pour ne pas négliger un trouble du rythme grave.

En cas de palpitations persistant une heure ou plus, on peut également inciter le patient à consulter en urgence pour obtenir un ECG pendant une crise.

Électrocardiogramme :

Il est l’examen de première intention, mais n’est que rarement contributif. En effet, le plus souvent, les patients n’ont leurs symptômes que de façon intermittente, et il est rare que cela se produise au moment de la consultation.

Néanmoins, il est indispensable, car il permet de diagnostiquer une fibrillation auriculaire, un flutter persistant, ou une bradycardie (bloc auriculoventriculaire ou bloc sinoauriculaire).

Il permet également de porter le diagnostic de syndrome de Wolf Parkinson White. La présence d’extrasystoles, auriculaires ou ventriculaires, est fréquente et banale, et ce diagnostic ne doit être retenu qu’après avoir éliminé les autres causes de palpitations.

Enregistrement Holter rythmique :

En cas de palpitations survenant de manière quotidienne, l’enregistrement Holter des 24 heures peut être contributif. Il consiste à enregistrer un électrocardiogramme pendant 24 à 48 heures, sur un support magnétique contenu dans un appareil de petite taille, qui se porte en bandoulière et permet au patient de vaquer à ses occupations habituelles. Le tracé est ensuite analysé à l’aide d’un système informatique. Le patient tient un journal de ses symptômes et à la possibilité de placer des marqueurs sur le tracé au moment des symptômes.

Enregistreur d’événement :

Ce sont des appareils très miniaturisés, avec une autonomie importante, pouvant être confiés au patient pour des périodes de 15 jours à 1 mois pour les modèles externes, ou implantés sous la peau du patient, avec une autonomie de 18 mois. Ils sont utiles en cas de symptômes peu fréquents. L’enregistrement peut être activé par le patient en cas de symptôme, ou se faire automatiquement selon une programmation décidée par le médecin, en fonction du trouble du rythme recherché. Les données enregistrées sont ensuite analysées par un système informatique.

Épreuve d’effort :

Elle est particulièrement utile en cas de palpitations survenant à l’effort : tachycardie jonctionelle, tachycardie ventriculaire sur coeur sain, fibrillation auriculaire adrénergique. Elle est également utile en cas de syndrome de Wolf Parkinson White ou pour diagnostiquer un trouble conductif ne survenant qu’à l’effort, ainsi qu’une insuffisance coronaire.

Échographie cardiaque :

Elle n’est pas systématique mais est réalisée dès que l’on suspecte l’existence d’une cardiopathie sous-jacente : cardiopathie hypertensive ou valvulaire souvent associée à de la fibrillation auriculaire, cardiopathie ischémique.

Exploration électrophysiologique :

Il s’agit d’un examen invasif qui n’est réalisé qu’en cas de forte suspicion de palpitations liées à une arythmie qui n’a pas pu être documentée par les autres examens. Cette exploration consiste à introduire des sondes dans les cavités droites par voie veineuse fémorale droite pour tenter de provoquer un trouble du rythme auriculaireou ventriculaire, reproduisant la symptomatologie du patient. Elle peut être complétée d’une ablation endocavitaire, qui consiste à détruire la zone responsable de l’arythmie.

ÉTIOLOGIE :

Extrasystoles :

Les extrasystoles sont très fréquentes dans la population générale, mais sont ressenties de manière très variable selon les individus, allant d’une perception intense et douloureuse chez certains à l’absence complète de symptôme chez d’autres. Elles constituent sans doute le motif le plus fréquent de consultation pour palpitations.

Le patient ressent une irrégularité de son rythme avec « un battement qui manque » (l’extrasystole qui n’est pas directement ressentie) et « un battement plus fort » (la systole qui fait suite à l’extrasystole est plus intense).

Figure 1. Extrasystoles auriculaires (ESA). À noter le repos compensateur (pause postextrasystolique) que ressent le patient et la présence d’ESA non conduites.
Figure 1. Extrasystoles auriculaires (ESA).
À noter le repos compensateur (pause postextrasystolique) que ressent le patient et la présence d’ESA non conduites.

Le diagnostic peut se faire au pouls ou à l’auscultation, et est confirmé par l’ECG qui permet d’établir s’il s’agit d’extrasystoles auriculaires (Fig. 1) ou ventriculaires. Un Holter des 24 heures peut être réalisé pour quantifier ces extrasystoles, et rechercher des formes répétitives (doublets, triplets ou salves), voire des arythmies soutenues.

En cas d’extrasystoles « bénignes », en l’absence de cardiopathie sous-jacente, on commence par rassurer le patient, sans proposer de traitement, ce qui le plus souvent permet l’atténuation de symptômes. En cas de persistance de symptômes, on peut proposer au patient un traitement bêtabloquant ou anxiolytique léger.

En revanche, des extrasystoles ventriculaires nombreuses avec des salves en cas de cardiopathie sous-jacente, notamment ischémique, doivent amener à poursuivre les examens, ces extrasystoles pouvant être la « gâchette » initiant un trouble du rythme plus grave. Des extrasystoles survenant chez un patient sans cardiopathie, mais chez qui on retrouve la notion de malaise, de perte de connaissance ou de mort subite dans la famille, doivent amener à poursuivre les investigations. En effet, elles peuvent révéler un trouble du rythme lié à une maladie génétique responsable d’anomalie du fonctionnement électrique du coeur par une perturbation des mouvements ioniques dans les cellules cardiaques (canalopathies), dont les plus connues sont le syndrome de Brugada et le syndrome du QT long congénital. Le diagnostic est en général établi par l’ECG.

Ces maladies peuvent comporter un risque de mort subite et nécessitent une prise en charge spécifique.

Fibrillation auriculaire et flutter auriculaire :

Fibrillation auriculaire :

La fibrillation auriculaire (FA) est le trouble du rythme le plus fréquent. Son incidence augmente avec l’âge. Elle peut être parfaitement asymptomatique, et découverte de manière fortuite lors d’un examen de routine, ou être ressentie de façon plus ou moins pénible par le patient. Typiquement, le patient ressent des palpitations irrégulières, anarchiques. Le pouls à sa prise peut être plus ou moins rapide, mais toujours irrégulier. Le début peut être brutal ou précédé d’une recrudescence d’extrasystoles. La tolérance est variable selon la fréquence cardiaque, et surtout l’état myocardique sous-jacent.

La crise peut durer de quelques minutes à quelques heures (on parle alors de FA paroxystique), à plusieurs jours (FA persistante) ou plusieurs mois (FA permanente). L’arrêt de la crise n’est pas toujours ressenti par le patient.

La FA survient plus fréquemment sur un terrain de cardiopathie valvulaire, hypertensive ou ischémique, mais peut aussi survenir sur un coeur normal.

Il est important lors de l’interrogatoire de faire préciser les circonstances de survenue des crises : un début des crises à l’effort ou lors d’une émotion oriente vers une FA dite « adrénergique », au contraire sa survenue en période de repos, spécialement la nuit ou pendant la digestion oriente vers une FA dite « vagale ». Cette distinction est importante car les traitements sont différents selon les facteurs déclenchants.

Une prise importante d’alcool peut également être un facteur favorisant. L’ECG montre une activité auriculaire anarchique, avec une réponse ventriculaire irrégulière, plus ou moins rapide (Fig. 2a et 2b).

Figure 2a. Fibrillation auriculaire à conduction ventriculaire rapide. À noter le rythme ventriculaire irrégulier, rapide, l’activité auriculaire anarchique.
Figure 2a. Fibrillation auriculaire à conduction ventriculaire rapide.
À noter le rythme ventriculaire irrégulier, rapide, l’activité auriculaire anarchique.

 

Figure 2b. Fibrillation auriculaire à conduction ventriculaire lente.
Figure 2b. Fibrillation auriculaire à conduction ventriculaire lente.

 

Figure 3. Flutter auriculaire à conduction 2 pour 1.
Figure 3. Flutter auriculaire à conduction 2 pour 1.

Flutter auriculaire :

Le flutter auriculaire est une arythmie correspondant à la survenue d’un circuit de réentrée tournant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre dans l’oreillette droite. L’activité auriculaire est organisée et régulière, de fréquence comprise entre 200 et 300/min ; elle est transmise aux ventricules de façon variable : mode 2 pour 1 (2 oreillettes pour un ventricule), 3 pour 1, donnant respectivement pour une fréquence auriculaire de 300/min une fréquence ventriculaire de 150 (2/1) ou 100/min (3/1), ou de façon plus irrégulière (flutter à conduction variable). Le patient ressent une arythmie plus régulière que la FA, et le plus souvent le flutter est moins bien toléré que la FA. Ces deux arythmies coexistent souvent chez le même patient, et certains patients arrivent parfaitement à les différencier. L’ECG montre une activité auriculaire régulière, en dent de scie, bien visible dans les dérivations inférieures (Fig. 3).

À noter les ondes F en dents de scie bien visibles en D2 et D3, l’activité ventriculaire régulière.

 

Tableau I. Facteurs de risque thromboembolique
Tableau I. Facteurs de risque thromboembolique

Arythmie complète par fibrillation auriculaire :

Le flutter comme la FA produisent un défaut de contraction des oreillettes avec pour conséquences, d’une part une baisse du débit cardiaque pouvant atteindre 30 % en cas de cardiopathie sous-jacente, et d’autre part le risque de formation de thrombus dans les auricules, avec comme corollaire la possible survenue d’accidents thromboemboliques notamment cérébraux (Tableau I).

Tableau II. Facteurs de risque échocardiographiques des complications thromboemboliques de l’arythmie complète par fibrillation auriculaire.
Tableau II. Facteurs de risque échocardiographiques des complications thromboemboliques de l’arythmie complète par fibrillation auriculaire.

Le risque embolique passe de 2,5 % en l’absence de facteur de risque à plus de 17 % lorsqu’il existe 3 facteurs de risque. En d’autres termes, en l’absence de facteur de risque, il faut traiter 417 patients pour éviter un accident embolique ; s’il existe 6 facteurs de risque, il faut traiter seulement 44 patients pour éviter un accident.

L’échocardiographie est le complément indispensable à cette évaluation clinique. Les paramètres à examiner sont répertoriés dans le tableau II. Ces paramètres sont mieux évalués en échographie transoesophagienne qu’en échographie transthoracique.

Traitement :

Ces troubles du rythme nécessitent une prise en charge cardiologique. Le traitement comporte une anticoagulation efficace, la réduction par choc électrique externe ou par médicaments en cas de flutter ou de FA persistante, le traitement antiarythmique pour prévenir les rechutes, et dans certains cas l’ablation endocavitaire par radiofréquence de l’arythmie.

Une anticoagulation efficace d’au moins trois semaines doit précéder la tentative de cardioversion, l’autre solution étant de réaliser une échographie oesophagienne afin de s’assurer de l’absence de thrombus dans les cavités gauches.

La cardioversion peut être médicamenteuse, en utilisant une dose de charge orale d’amiodarone (4 à 6 cp/j pendant 5 jours, pour atteindre 30 comprimés), ce qui peut être réalisé en ambulatoire.

En l’absence de réduction, un choc électrique externe sous anesthésie générale est réalisé au cours d’une brève hospitalisation.

Tableau III. Contre-indications à l’emploi des antivitamines K chez le sujet âgé.
Tableau III. Contre-indications à l’emploi des antivitamines K chez le sujet âgé.

Arythmie complète par fibrillation auriculaire et anticoagulation :

En principe toute arythmie complète par fibrillation auriculaire (AC/FA) soutenue est une indication à un traitement par les antivitamines K.

La stratégie thérapeutique est déterminée en fonction de l’âge du patient, de la tolérance de l’arythmie, et de l’existence ou non de cardiopathie sous-jacente. Le tableau III résume les contre-indications absolues et relatives à l’utilisation des antivitamines K chez le sujet âgé.

En tenant compte de ces contre-indications à l’utilisation des AVK, les recommandations simplifiées du traitement antithrombotique au cours de l’arythmie complète par fibrillation auriculaire sont résumées dans le tableau IV.

Tableau IV. Recommandations du traitement antithrombotique au cours de l’AC/FA.
Tableau IV. Recommandations du traitement antithrombotique au cours de l’AC/FA.

L’indication de ce traitement doit cependant être rediscutée chez chaque patient en mettant en balance le risque d’embolies systémiques et le risque hémorragique. On voit qu’il est particulièrement difficile de décider dans la tranche d’âge 65-75 ans. C’est là que les données de l’échocardiographie peuvent être particulièrement utiles.

Traitement préventif :

Le traitement préventif des récidives est assuré par un médicament antiarythmique : les antiarythmiques de classe Ic ( flécaïnide, propafénone) sont utilisés de préférence aux antiarythmiques de classe Ia (quinidiniques) qui sont moins bien tolérées (troubles digestifs) et comportent le risque de torsades de pointes.

On peut également utiliser le sotalol, qui est à la fois antiarythmiques de classe III et bêtabloquant.

L’amiodarone est la drogue la plus efficace, mais n’est pas utilisée en première intention du fait de ses effets secondaires notamment thyroïdiens. En revanche, elle reste le seul antiarythmique non contre-indiqué en cas de cardiopathie sous-jacente et de dysfonction ventriculaire gauche.

Tachycardies jonctionnelles :

Ces tachycardies surviennent le plus souvent en l’absence de cardiopathie, chez un sujet jeune, mais il n’est pas rare de les rencontrer chez des patients plus âgés. La description clinique est assez caricaturale : le patient décrit des épisodes de palpitations rapides, régulières, à début et fin brutaux. Les circonstances de déclenchement sont très variables d’un sujet à l’autre, mais souvent reproductible chez un même sujet : effort, antéflexion du tronc, période postprandiale.

Les crises ont une durée variable, de moins d’une minute à plusieurs heures, leur tolérance est également variable d’un sujet à un autre. Lorsqu’il a pu prendre son pouls, le patient le décrit comme régulier, rapide, d’une cadence comprise entre 150 et 250/min.

 

Figure 4. Tachycardie jonctionelle (appelée aussi tachycardie de Bouveret). À noter la tachycardie régulière, à complexes fins, sans onde P visible.
Figure 4. Tachycardie jonctionelle (appelée aussi tachycardie de Bouveret).
À noter la tachycardie régulière, à complexes fins, sans onde P visible.

Diagnostic :

Il est parfois difficile de porter le diagnostic lorsque les crises sont brèves et que le patient n’a pas le temps de se rendre chez un cardiologue ou aux urgences pour enregistrer un électrocardiogramme.

Dans ce cas, on peut avoir recours soit à l’épreuve d’effort, pour tenter de provoquer une crise, soit au Holter de 24 heures ou à un enregistreur d’événement (R test) que le patient porte sur lui pendant deux semaines, et avec lequel il peut enregistrer une crise. En dernier recours, l’exploration électrophysiologique avec manoeuvres provocatives permet le plus souvent de porter un diagnostic.

L’ECG lors d’une crise montre une tachycardie le plus souvent à complexes fi ns, les ondes P peuvent être cachées dans les complexes QRS ou visibles derrière les complexes QRS (onde P rétrogrades) (Fig. 4)

Voie accessoire :

Ces tachycardies sont dues à la survenue d’un circuit de réentrée utilisant la voie de conduction auriculoventriculaire normale dans un sens et une voie accessoire dans l’autre sens. Cette seconde voie peut se situer au niveau des anneaux tricuspidien et mitral (faisceau de Kent dans le cadre du syndrome de Wolf Parkinson White) ou dans le noeud auriculoventriculaire (réentrée intranodale).

Certaines voies accessoires peuvent s’avérer dangereuses car très perméables à l’activité auriculaire : ce sont les voies accessoires dites « malignes », qui, en cas de survenue d’une fibrillation auriculaire, peuvent aboutir à une fréquence ventriculaire très élevée, pouvant atteindre 300/min, avec un risque potentiellement létal. C’est pourquoi en cas de découverte même fortuite d’une voie accessoire de type faisceau de Kent, il faut s’assurer de sa non-dangerosité par une épreuve d’effort, et si elle ne disparaît pas lors de l’épreuve d’effort, envisager une exploration électrophysiologique avec ablation endocavitaire par radiofréquence de la voie accessoire.

Traitement :

Ces tachycardies ont le plus souvent un bon pronostic, mais peuvent être gênantes par les symptômes qu’elles produisent. Leur traitement varie selon la fréquence des crises et leur tolérance.

Parfois le patient a pu identifier des manoeuvres d’arrêt des crises : les plus efficaces sont la manoeuvre de Valsalva (expiration forcée glotte fermée), le massage sinocarotidien et le réflexe nauséeux. Ces crises survenant rarement et que le patient arrête tout seul ne nécessitent aucun traitement.

Lorsque la crise ne cède pas spontanément ou après les manoeuvres de réduction, elle nécessite une réduction médicamenteuse (injection intraveineuse de Striadyne® ou de diltiazem) en milieu hospitalier et sous contrôle électrocardiographique.

Parfois le patient décrit une diurèse importante survenue au décours de la crise (crise natriurétique).

En cas de crises plus fréquentes, on propose un traitement bêtabloquant ou inhibiteur calcique, plus rarement un antiarythmique. Si les crises ne sont pas contrôlées par ce traitement, on propose alors l’ablation endocavitaire de la voie accessoire, dont le taux de succès est de 95 %.

Figure 5. Tachycardie ventriculaire soutenue sur coeur sain. À noter les complexes QRS peu élargis.
Figure 5. Tachycardie ventriculaire soutenue sur coeur sain.
À noter les complexes QRS peu élargis.

Tachycardie ventriculaire :

On distingue deux types de tachycardies ventriculaires (TV) : celles qui surviennent sur coeur sain, et celles qui surviennent chez des patients porteurs d’une cardiopathie. Elles se distinguent par leur pronostic, le plus souvent excellent dans le premier cas, alors que les TV survenant sur une cardiopathie peuvent être mal tolérées, voire aboutir à une fibrillation ventriculaire et à un arrêt cardiocirculatoire.

Tachycardie ventriculaire sur coeur sain :

Les TV sur coeur sain ont le plus souvent les mêmes symptômes que les tachycardies jonctionnelles : début et fin brutaux, palpitations rapides et régulières, de tolérance variable, mais ne s’accompagnant ni de malaise ni de syncope.

Elles peuvent être soit soutenues, pouvant durer de quelques minutes à plusieurs heures (Fig. 5), ou en salves plus ou moins longues (Fig. 6).

Figure 6. Tachycardie ventriculaire en salve sur coeur sain.
Figure 6. Tachycardie ventriculaire en salve sur coeur sain.

Le diagnostic de tachycardie ventriculaire « idiopathique » nécessite un bilan cardiologique, comportant ECG, Holter de 24 heures, échographie cardiaque afin d’éliminer une cardiopathie sous-jacente.

Le traitement est d’abord médicamenteux à base de bêtabloquants ou d’inhibiteurs calciques (vérapamil), ou radical par ablation endocavitaire de la zone arythmogène.

Tachycardie ventriculaire survenant sur cardiopathie :

Les TV survenant sur cardiopathie avec fonction ventriculaire gauche altérée (Fig. 7) se traduisent souvent par un malaise, une hypotension, un collapsus, une syncope, voire un arrêt cardiocirculatoire.

Souvent les palpitations ne sont pas perçues par le patient.

Figure 7. Tachycardie ventriculaire sur cardiopathie. À noter les complexes QRS élargis.
Figure 7. Tachycardie ventriculaire sur cardiopathie.
À noter les complexes QRS élargis.

À l’examen clinique, le pouls est rapide, filant.

Ces TV sont une urgence médicale nécessitant une prise en charge par le SAMU et une hospitalisation en soins intensifs de cardiologie. En cas de mauvaise tolérance, un choc électrique externe doit être réalisé sans délai, soit par le SAMU, soit par les pompiers ou secouristes à l’aide d’un défibrillateur semi-automatique qui fait le diagnostic et conseille ou non la réalisation du choc. Ces appareils, implantés dans de nombreux lieux publics et moyens de transport aux états-Unis, commencent à faire leur apparition en France. Ils représentent le moyen le plus efficace de diminuer les morts subites d’origine rythmique. Pendant l’hospitalisation un bilan complet est réalisé, et le traitement qui est proposé est le plus souvent l’implantation d’un défibrillateur automatique implantable (DAI), appareil à peine plus gros qu’un stimulateur cardiaque et qui choque automatiquement le patient en cas de récidive de TV. En effet, en cas de cardiopathie, tous les antiarythmiques exceptés l’amiodarone sont contre-indiqués, et seul le DAI a montré qu’il pouvait prévenir efficacement la mort subite et réduire la mortalité.

Bradycardie :

En général, les symptômes au premier plan dans les bradycardies liées à un trouble conductif (bloc auriculoventriculaire ou bloc sinoauriculaire) sont l’asthénie, la dyspnée d’effort ou les syncopes. Rarement, ces symptômes ne sont pas présents et le patient ne ressent que des palpitations. En effet, le coeur étant plus lent, chaque systole est plus forte et peut donner l’impression que le coeur « cogne fort ».

Le diagnostic est suspecté devant la constatation d’une bradycardie et est confirmé par un électrocardiogramme.

Palpitations en dehors d’une arythmie :

Elles surviennent en général chez des patients anxieux, dans un contexte de stress et de surmenage.

Elles sont décrites comme régulières, en général peu rapides (le pouls est rarement supérieur à 110/minute), avec l’impression d’un coeur qui « tape fort », semblable à ce que n’importe qui peut ressentir en cas de stress brutal ou d’émotion. Elles s’associent en général à d’autres signes fonctionnels ( angoisse, douleurs de type punctiforme dans la poitrine rattachées par le patient à une origine cardiaque). Ces palpitations cèdent le plus souvent après que le patient ait été rassuré sur son état cardiaque, et par la suppression des facteurs favorisants.

En cas de persistance, on peut proposer à titre temporaire un traitement sédatif léger ou un traitement bêtabloquant. Toutefois, ce diagnostic ne doit être porté qu’après avoir éliminé les autres causes possibles.

CONCLUSION :

Les palpitations sont un motif fréquent de consultation en cardiologie. Les troubles du rythme qui les provoquent sont extrêmement variés : simple éréthisme cardiaque lié au surmenage, extrasystoles auriculaires ou ventriculaires bénignes, tachycardie jonctionelle ou ventriculaire sur coeur sain, fibrillation auriculaire ou flutter auriculaire survenant en présence ou non d’une cardiopathie, jusqu’aux tachycardies ventriculaires survenant sur une cardiopathie ischémique, dilatée, valvulaire ou hypertrophique, et qui comportent un risque de mort subite.

L’interrogatoire est fondamental pour orienter le diagnostic.

Tout patient consultant pour palpitations doit bénéficier d’un bilan cardiologique et d’examens complémentaires pour établir un diagnostic et proposer un traitement.

La survenue de malaise ou de syncope, les antécédents de mort subite familiale, la présence d’une cardiopathie connue, lorsqu’ils sont associés aux palpitations, doivent alerter le médecin qui doit orienter rapidement le patient en milieu cardiologique spécialisé.

Le diagnostic de palpitations bénignes n’est porté qu’après élimination des autres causes.