La diarrhée est un symptôme qui se définit de plusieurs manières, le plus souvent par le nombre de selles quotidiennes, mais également par leur consistance, leur volume ou leur poids. Le patient se focalise surtout sur la consistance de ses selles et sur leur nombre, l’aspect quantitatif étant plus difficile à apprécier. Le volume ou le poids des selles constituent la meilleure définition de la diarrhée (d’une manière générale poids supérieur à 250 g/j pour un sujet ayant une diététique occidentale). Le poids des selles est néanmoins une valeur difficile à obtenir en dehors d’une hospitalisation de sorte que le nombre et la consistance des selles sont généralement utilisés en première analyse pour définir l’existence d’une diarrhée.
On parle de diarrhée chronique si les troubles persistent depuis plus de trois à quatre semaines, délais au-delà duquel les hypothèses infectieuses sont moins envisageables chez les sujets immunocompétents.
Cette définition ne tenant compte que du nombre et de la consistance des selles a néanmoins l’inconvénient d’inclure dans le cadre de la diarrhée chronique le syndrome du côlon irritable qui reste la plus fréquente cause de trouble du transit dans nos contrées.
Les étiologies de la diarrhée chronique sont très nombreuses (voir Encadré 1). Elles rendent difficile l’établissement d’une stratégie simplifiée, mais si les données de la clinique et une première ligne d’examens biologiques n’orientent pas rapidement vers un diagnostic précis, la logique actuelle est de réaliser en première intention des explorations morphologiques centrées sur un bilan endoscopique comportant une gastroscopie et une coloscopie avec biopsies étagées. Cette attitude est d’une grande rentabilité diagnostique et permet d’expliquer un grand nombre de diarrhées chroniques.
DIAGNOSTIC :
Interrogatoire :
L’histoire bien reconstituée de la diarrhée chronique permet souvent de distinguer un tableau fonctionnel d’une situation à l’évidence organique.
Les arguments en faveur d’une organicité sont : diarrhée évoluant depuis au moins deux à trois mois ;
– diarrhée continuelle, en particulier nocturne ;
– perte de poids importante.
Les caractères de la diarrhée sont importants à définir :
– horaire : matinal, postprandial, sans horaire aussi bien le jour que la nuit ;
– caractère impérieux des selles ;
– aspect des selles : afécales, grasses, décolorées, présence éventuelle d’aliments non digérés ingérés le jour même, présence de glaire, de pus ou de sang.
La recherche d’un facteur déclenchant au début des symptômes est essentielle, comme, un séjour en pays tropical, la prise d’un nouveau médicament, notamment d’un antibiotique, d’un anti-inflammatoire non stéroïdien ou de tout autre médicament récemment introduit.
Le contexte pathologique est à définir : existence d’un diabète, d’une maladie du système, un éthylisme chronique, une toxicomanie, des antécédents transfusionnels. Il faut noter l’origine ethnique, une homosexualité éventuelle, les antécédents familiaux de cancer, de maladie inflammatoire intestinale ou de maladie coeliaque.
Les antécédents chirurgicaux sont importants à préciser surtout s’ils sont digestifs : résection intestinale, vagotomie, cholécystectomie, etc.
La diarrhée chronique ne résume en général pas l’ensemble du tableau clinique et d’autres symptômes digestifs ou extradigestifs sont importants à reconnaître :
– des douleurs abdominales ou une fièvre sont parfois présentes, continues ou intermittentes ;
– l’existence de vomissement, d’anorexie ou de polyphagie ;
– le syndrome de Koenig qui témoigne d’une sténose du grêle doit être recherché lors de l’interrogatoire ;
– les rectorragies ou un ténesme peuvent orienter vers une origine intestinale basse ;
– l’existence d’une fièvre, d’arthralgies, d’une éruption cutanée (érythème noueux) peut évoquer une colite inflammatoire, un flush un syndrome sécrétoire ( carcinoïde), la constatation d’oedème des membres inférieurs, une hypoprotidémie secondaire à une entéropathie exsudative ;
– des signes en faveur d’une endocrinopathie en particulier thyroïdienne sont à rechercher mais leur absence n’élimine pas le diagnostic.
Examen clinique :
L’examen clinique reste bien sûr une étape essentielle :
– la palpation abdominale recherche une masse, une hépatosplénomégalie, un épanchement péritonéal ;
– le toucher rectal permet d’éliminer une pathologie tumorale anorectale ;
– l’examen proctologique en position genupectorale lorsqu’il est possible est important pour rechercher une fistule, une fissure, une dermite périanale ou une anomalie de la statique anopérinéale ;
– le reste de l’examen clinique s’attache à rechercher des signes extradigestifs pouvant orienter vers une étiologie particulière (cf. infra).
Examens biologiques :
Un premier bilan biologique permet souvent de clarifier la situation : celui-ci doit comporter numération formule sanguine, vitesse de sédimentation et protéine C-réactive, un ionogramme sanguin, une urée, créatinine, un bilan hépatique complet. La coproculture et la parasitologie des selles doivent être prescrites si elles n’ont pas été faites initialement lors du début du syndrome diarrhéique. Un bilan martial, une TSH, une électrophorèse des protéines sont également à prévoir.
La recherche d’une immunodépression est importante et, en cas de suspicion clinique, une sérologie VIH est à prescrire avec l’accord du patient.
Au terme de cette enquête, il est possible dans la majorité des cas de suspecter l’étiologie et le mécanisme de la diarrhée.
Examens endoscopiques :
Le stade d’exploration suivant est représenté par le bilan endoscopique comportant une fibroscopie oesogastroduodénale et une iléocoloscopie, le plus souvent pratiquées en même temps lors de la même anesthésie. Ce bilan permet de déceler une lésion pariétale au niveau du grêle proximal et terminal et au niveau du côlon.
Coloscopie :
Elle permet la découverte des pathologies pariétales du cadre colique et de l’iléon terminal.
Le premier diagnostic toujours craint par les patients est celui de cancer. Le cancer du côlon peut être en effet responsable d’une diarrhée chronique. Si on connaît la prévalence des adénomes coliques lors de coloscopies systématiques réalisées à partir de l’âge de 50 ans (de l’ordre de 14 à 37 %) la prévalence des polypes ou des cancers chez les patients subissant une coloscopie pour diarrhée chronique n’est pas connue. Celle-ci pourrait être de l’ordre de 33 % en cas de rectorragies associées.
La coloscopie permet également le diagnostic des colites inflammatoires (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique) et des colites microscopiques (colite collagène ou lymphocytaire).
L’iléoscopie rétrograde systématique augmente la rentabilité diagnostique de la coloscopie.
Chez les patients présentant une diarrhée chronique avec coloscopie normale, une iléite terminale est découverte dans un tiers des cas.
Globalement, l’iléocoloscopie permet un diagnostic étiologique chez 15 à 20 % des patients porteurs d’une diarrhée chronique, ce chiffre pouvant monter à 40 % en cas de suspicion de colite inflammatoire.
Fibroscopie oesogastroduodénale :
La fibroscopie oesogastroduodénale permet la recherche d’une maladie ulcéreuse, mais surtout la réalisation de biopsies duodénales distales qui sont indispensables pour le diagnostic de syndrome de malabsorption avec la recherche d’une atrophie villositaire ou d’une infiltration cellulaire anormale du chorion.
Au premier rang de ces maladies, il faut citer la maladie coeliaque, mais également la maladie de Whipple beaucoup plus rare, la sprue tropicale, la gastro-entérite à éosinophiles bien documentés par ces biopsies.
Examens radiologiques :
Scanner abdominopelvien :
Le scanner abdominopelvien avec opacification du grêle ou du côlon selon l’orientation diagnostique est à prévoir, avant le transit du grêle qui termine le bilan morphologique. Le scanner permet notamment d’apprécier l’état du pancréas (tumeur, calcifications), de découvrir des métastases hépatiques, une masse intra-abdominale, une anomalie pariétale au niveau du grêle, un épanchement péritonéal infraclinique.
Imagerie de l’intestin grêle :
L’examen de référence reste le transit du grêle.
Toutefois dans sa technique standard, sa sensibilité reste faible. Il peut être remplacé de façon plus récente par un entéroscanner réalisé après ingestion d’eau ou de produit de contraste dans le grêle avec une sonde placée au-delà de l’angle de Treitz.
L’entéroscopie de l’intestin grêle est d’usage peu courant, car de réalisation longue, difficile et ne permet pas une exploration complète du grêle. Une nouvelle technique (en évaluation) d’entéroscopie à double ballonnet pour faciliter la progression pourrait néanmoins changer cette situation. La vidéocapsule peut avoir une place dans certaines maladies du grêle responsables de diarrhée chronique, notamment dans le bilan d’extension d’une maladie de Crohn.
Autres examens complémentaires :
En l’absence de diagnostic au terme des examens suscités, l’examen suivant à prévoir est un fécalogramme, de préférence sur trois jours qui permet :
– de confirmer la diarrhée : poids supérieur à 300 g ;
– de doser la stéatorrhée (inférieure à 6 g) ;
– de faire une clairance de l’alpha-1 antitrypsine en cas d’hypoprotidémie à l’électrophorèse pour documenter une éventuelle entéropathie exsudative.
Fausse diarrhée :
En cas de fausse diarrhée, il faut sur les données du fécalogramme :
– réévaluer l’hypothèse d’une diarrhée fonctionnelle ;
– rechercher une diarrhée factice par le dosage des laxatifs dans les selles ou dans les urines.
En cas de signes de malabsorption :
En cas de signes de malabsorption suggérée par un amaigrissement massif, une asthénie importante et le fécalogramme, il faut rechercher une carence vitaminique que l’examen clinique peut suggérer : syndrome anémique, lésions cutanées, muqueuses, osseuses ( ostéomalacie) ou neurologique (neuropathie carentielle). Il faut doser les folates, la vitamine B12, pratiquer un bilan phosphocalcique, un dosage de la vitamine D.
Une stéatorrhée supérieure à 30 g ne s’observe qu’en cas de lésion pariétale étendue du grêle, ou d’insuffisance pancréatique exocrine sévère.
Le test au D xylose qui explore l’absorption des sucres au niveau du grêle proximal n’est plus très utilisé, les renseignements donnés par les biopsies duodénales facilement obtenues à l’aide de l’endoscopie remplaçant avantageusement ce dosage. Le test de Schilling qui étudie l’absorption de la vitamine B12 avec ou sans facteur intrinsèque est rarement utile du fait des progrès des autres explorations fonctionnelles et morphologiques.
Pullulation microbienne intestinale :
En cas de suspicion de pullulation microbienne intestinale (carence en vitamine B12, stéatorrhée), l’examen à réaliser est un test respiratoire au glucose dont la sensibilité est excellente avec une bonne spécificité en l’absence d’antibiothérapie préalable dans les 15 jours précédant l’examen. Cet examen n’est toutefois disponible que dans les services spécialisés.
Investigations du pancréas :
Pour qu’une insuffisance pancréatique exocrine chronique soit parlante cliniquement, il faut au moins une destruction de 90 % des acini pancréatiques.
Ce phénomène est donc tardif dans l’histoire naturelle de la pancréatite chronique.
L’étude de la sécrétion pancréatique après stimulation (sécrétine ou cholécystokinine) est peu usitée en pratique courante en raison de son caractère très invasif.
L’imagerie pancréatique comporte en premier lieu une échographie, puis surtout un scanner qui permet de connaître l’état morphologique de la glande (hypertrophie, calcifications) et en déduire son état fonctionnel. Cette approche morphologique peut être complétée par une échoendoscopie, qui peut détecter précocement des signes de pancréatite chronique et surtout mettre en évidence une tumeur de petite taille, endocrine.
La wirsungographie rétrograde par cathétérisme sélectif du Wirsung peut détecter précocement la pancréatite chronique en objectivant un Wirsung dilaté, la présence de lithiases intracanalaires et une dilatation à la fois du Wirsung et des canaux secondaires. Il existe toutefois un risque de poussée de pancréatite lié à l’examen.
Les images obtenues par wirsungo-IRM sont également intéressantes et sans risque iatrogène, ce qui le fait préférer actuellement en première intention.
Il existe une excellente corrélation entre les données de la wirsungographie et les données de l’étude de la sécrétion pancréatique par tubage.
L’étude des enzymes sériques (amylasémie et lipasémie) ne donne pas un reflet des capacités sécrétoires du pancréas exocrine.
En revanche, le dosage dans les selles de certains enzymes pancréatiques, et notamment l’élastase, semble intéressant. En effet, un simple échantillon de selles est nécessaire pour permettre ce dosage par technique Élisa. La sensibilité de ce test est bonne, mais elle ne reconnaît l’existence d’une insuffisance pancréatique qu’à un stade déjà évolué.
Le PABA-test est une technique indirecte pour mettre en évidence le défi cit enzymatique exocrine, mais nécessite un recueil d’urine de 6 heures après un repas test, le malade étant à jeun depuis la veille. Sa sensibilité reste bonne, mais il est peu utilisé en pratique courante en raison de ses impératifs techniques.
ÉTIOLOGIE DES DIARRHÉES CHRONIQUES :
Les principales causes des diarrhées chroniques sont présentées dans l’encadré 1.
Encadré 1. Principales causes des diarrhées chroniques
Origine colique
Cancer du côlon
Rectocolite hémorragique
Maladie de Crohn
Colites microscopiques
Origine grêlique
Maladie coeliaque
Maladie de Crohn
Maladie de Whipple
Sprue tropicale
Amylose
Gastroentérite à éosinophiles
Lymphangiectasie intestinale primitive
Pseudo-obstruction chronique intestinale
Malabsorption des sels biliaires
Carence en lactase
Pullulation microbienne intestinale
Grêle radique
Lymphome
Giardiase
Origine pancréatique
Pancréatite chronique
Cancer du pancréas
Mucoviscidose
Origine endocrinienne
Hyperthyroïdie
Diabète
Hypoparathyroïdie
Maladie d’Addison
Tumeur secrétant des hormones ( vipome, gastrinome, carcinoïde)
Autres étiologies
Diarrhée factice
Causes chirurgicales : résection intestinale, fistule intestinale interne
Causes médicamenteuses
Éthylisme
Neuropathie du système nerveux autonome
Les mécanismes de la diarrhée peuvent être :
– motrice ;
– osmotique ;
– sécrétoire ;
– volumogénique ;
– exsudative.
Diarrhée motrice :
Le diagnostic clinique de la diarrhée motrice n’est pas toujours facile. Le test au rouge carmin (selles colorées en moins de huit heures après l’ingestion du rouge carmin, disparaissant en moins de 24 heures) peut y aider. Le volume des selles est souvent peu augmenté, mais en revanche elles sont nombreuses avec présence d’aliments ingérés le jour même. Les selles sont souvent impérieuses, sans douleur abdominale associée, sans altération de l’état général, sans perte de poids. La stéatorrhée peut être modérément augmentée, en règle inférieure à 15 g. Les étiologies de ces diarrhées motrices sont listées dans l’encadré 2. À noter que le diagnostic de loin le plus fréquent de diarrhée motrice est celui de côlon irritable survenant souvent chez les sujets de moins de 45 ans.
Encadré 2. Principales causes des diarrhées motrices
Origines endocriniennes
Hyperthyroïdie
Cancer médullaire de la thyroïde
Syndrome carcinoïde
Origines neurologiques
Vagotomie tronculaire
Neuropathie diabétique
Syndrome Shy-Draper (hypotension orthostatique)
Origines digestives
Résection du grêle
Atteinte du grêle étendue ( postradique, Crohn)
Colon irritable ++
Diarrhée osmotique :
Les diarrhées osmotiques sont souvent difficiles à distinguer d’une diarrhée motrice et sont dues à l’ingestion de solutés peu ou pas absorbables.
L’exemple de ce type de diarrhée est celle provoquée par l’ingestion de polyéthylène glycol (PEG) pour obtenir une vacuité colique avant la coloscopie.
En pathologie, les substances peu ou pas absorbées entraînent un appel osmotique d’eau et d’électrolytes qui augmentent le débit liquidien intraluminal.
Si la substance qui provoque la diarrhée est fermentescible, la selle est acide, mousseuse, brûlante, déterminant souvent une dermite périanale très gênante. La diarrhée s’interrompt en cas d’épreuve du jeûne.
Les étiologies de ces diarrhées osmotiques sont listées dans l’encadré 3.
Encadré 3. Principales causes des diarrhées osmotiques
Déficit en disaccharidases
Lactase et saccharase-isomaltase
Laxatifs osmotiques
Sulfate de magnésie et de soude
Macrogol (PEG)
Lactulose
Lactitol
Antiacide
Oxyde de magnésie
Hydroxyde de magnésie
Diarrhée sécrétoire :
Les diarrhées sécrétoires sont le plus souvent des diarrhées très abondantes supérieures à 500 g ou 1 kg/24 h parfois associées à une hypokaliémie, à une acidose métabolique, voire une insuffisance rénale fonctionnelle. Elle persiste en cas de jeûne.
Les étiologies sont notées dans l’encadré 4.
Encadré 4. Principales causes des diarrhées sécrétoires
Laxatifs irritants
Anthraquinoniques
Phénolphtaléine et bisacodyl
Autres médicaments
Colchicine
Digitaline
Biguanide
Lésions organiques coliques
Colite collagène et lymphocytaire
Maladie inflammatoire intestinale chronique
Adénome villeux (hypokaliémie)
Polypose adénomateuse familiale
Causes infectieuses
Lambliase (hypogammaglobulinémie commune variable)
Amibiase
Campylobacter
Salmonelle
Cryptosporidiose et microsporidiose (si immunodépression)
Cytomégalovirus et virus herpès
Tumeurs endocrines
Choléra endocrine (Vipome, phéochromocytome)
Diarrhée volumogénique :
Les diarrhées volumogéniques sont dues à une inondation de l’intestin par une augmentation des débits sécrétoires digestifs en particulier gastrique dans le cadre du syndrome de Zollinger et Ellison.
Le contrôle de la sécrétion acide par les inhibiteurs de la pompe à protons stoppe la diarrhée.
Diarrhée exsudative :
Les diarrhées exsudatives n’ont des signes cliniques évocateurs qu’en cas de perte protéique majeure : oedèmes déclives blancs, mous et indolores, parfois anasarque ou épanchement chyleux péritonéal (si obstacle lymphatique). Le signe biologique est l’hypoalbuminémie, parfois profonde, évocatrice si elle est associée à une hypogammaglobulinémie.
Les principales étiologies des diarrhées chroniques exsudatives sont notées dans l’encadré 5.
Encadré 5. Principales causes des diarrhées exsudatives
Obstacle au drainage lymphatique
Lymphome
Cancer du pancréas
Maladie de Whipple
Lymphangiectasies intestinales primitives (maladie de Waldmann)
Rupture de la barrière épithéliale
Colite bactérienne ou virale (VIH)
Colite inflammatoire ( maladie infl ammatoire chronique intestinale)
Entérite radique
Tumeur digestive ulcérée
Pullulation microbienne
Polypose de Cronkhite-Canada
Maladie de Ménétrier
Lupus
Malabsorptions :
Les principales causes des malabsorptions sont présentées dans l’encadré 6.
Encadré 6. Principales causes des malabsorptions
Atrophie villositaire
Maladie coeliaque
Sprue tropicale
Maladie du greffon contre l’hôte GVH (Graft Vs. Host Disease)
Atrophie iléale primitive
Lambliase
Autres lésions pariétales du grêle
Maladie de Whipple
Mycobacterium avium ( sida)
Lymphome du grêle
Maladie de Crohn étendue
Grêle radique
Gastroentérite à éosinophile
Parasitoses
Giardia lamblia
Cryptosporidiose (sida)
Microsporidiose (sida)
Post-chirurgicales
Grêle court (inférieur à 1 mètre)
Résection iléale supérieure à 1 mètre
Gastrectomie
Colonisations bactériennes chroniques du grêle
Anses borgnes
Sténoses du grêle post-chirurgicales ou non
Diverticulose du grêle
Troubles de la motricité du grêle
Sclérodermie
Pseudo-obstruction intestinale chronique
Amylose
Insuffisance pancréatique exocrine
Pancréatite chronique
Cancer de la tête du pancréas
Mucoviscidose
Insuffisance en sels biliaires
Cholestase intra- ou extrahépatique
Fistule biliaire
Résection iléale
ÉTIOLOGIES LES PLUS FRÉQUENTES :
Parmi les étiologies des diarrhées chroniques, certaines doivent être évoquées de façon prioritaire.
Intolérance au lactose de l’adulte :
Les déficits en lactase de l’adulte doivent être classés en deux types bien distincts :
– carences primitives d’origine génétique surtout ;
– carences secondaires à de nombreuses affections digestives, infectieuses ou liées à une atrophie villositaire.
En cas de carence primitive, le défi cit porte sur la lactase de la bordure en brosse de l’entérocyte, mais il n’existe aucune altération histologique décelable. Cette carence est définitive et sa prévalence varie beaucoup selon les ethnies : rare chez les sujets de race blanche (5 à 15 %), elle est beaucoup plus fréquente chez les méditerranéens et surtout chez les noirs et les Asiatiques. La carence qui s’installe dès l’enfance, s’aggrave à l’âge adulte. Chez l’adulte sous nutrition occidentale, ce défi cit ne s’accompagne habituellement pas de retentissement nutritionnel, le lactose ne représentant qu’une faible part de l’apport calorique total.
Le lactose ingéré, présent dans la lumière intestinale détermine une diarrhée osmotique postprandiale, souvent acide, irritante et une fermentation colique responsable de flatulences.
Parfois les symptômes peuvent simuler un banal côlon irritable et c’est l’interrogatoire alimentaire orienté qui permet d’évoquer le diagnostic.
Quoi qu’il en soit il existe en pratique une dissociation fréquente entre le déficit en lactase et les symptômes d’intolérance, l’administration de quantité modérée de lait étant souvent bien tolérée et asymptomatique.
Le diagnostic de certitude, s’il est nécessaire, peut recourir soit au test de charge orale de lactose avec courbe glycémique, soit au test respiratoire à l’hydrogène après administration de lactose. Le traitement consiste, bien sûr, dans l’éviction des produits lactés de l’alimentation.
Maladie coeliaque de l’adulte :
Maladie réputée rare chez l’adulte, des enquêtes épidémiologiques récentes basées sur des études sérologiques désormais disponibles donnent une prévalence oscillant entre 1 pour cent à un pour 500 sujets selon les pays. Cette fréquence contraste avec la relative rareté de son diagnostic et suggère à la fois l’existence de forme peu ou non symptomatique ainsi que des maladies coeliaques insuffisamment reconnues.
Tableau clinique :
La forme classique (50 %) correspond à une atteinte étendue du grêle avec diarrhée chronique, perte de poids, météorisme abdominal.
Des formes à présentation extra-digestive sont fréquentes chez l’adulte et correspondent à des atteintes plus limitées du grêle : anémie macroou microcytaire, ostéomalacie, carence martiale, aphtose récurrente, élévation inexpliquée des transaminases, etc. Les formes silencieuses, méconnues, correspondent à des atrophies villositaires totales ou partielles sans aucun symptôme digestif. Cette forme est à rechercher préférentiellement chez les diabétiques, les hypothyroïdiens, en cas cirrhose biliaire primitive, de déficit en anticorps sériques antigliadines (IgA), chez les trisomiques et les parents au 1er degré des malades coeliaques.
Examens :
Si la maladie est évoquée, il faut rechercher les anticorps anti-gliadines, surtout les IgA, plus spécifiques, qui sont actuellement supplantés par les anticorps anti-endomysium et antitransglutaminases très spécifiques. Le critère diagnostique indispensable reste la mise en évidence de l’atrophie villositaire associée à une lymphocytose intraépithéliale sur les biopsies de la muqueuse duodénale obtenues lors d’une gastroscopie (Fig. 1, voir également figure dans le cahier couleur). Le diagnostic définitif doit exiger la repousse villositaire après un régime sans gluten bien suivi pendant 6 mois. Le traitement est uniquement basé sur l’éviction complète et définitive du gluten présent dans les céréales (blé, seigle, orge). Il existe fréquemment des maladies auto-immunes associées. Le risque de lymphome (intestinal surtout) est augmenté, de même que celui de certains cancers épithéliaux (grêle, pharynx, oesophage). Le taux d’anticorps antiendomysium diminue en cas de régime sans gluten bien suivi et peut constituer un mode de surveillance pour apprécier la bonne adhésion au régime.
Maladies inflammatoires chroniques intestinales :
La rectocolite hémorragique et la maladie de Crohn sont des maladies inflammatoires de l’intestin dont l’étiologie reste inconnue. La fréquence de la maladie de Crohn est en nette augmentation depuis un demi-siècle (× 6) alors que la prévalence de la rectocolite hémorragique est restée stable. Le pic d’incidence de ces maladies se situe autour de la 3e décade.
Diagnostic :
Tableau clinique :
L’évolution, imprévisible, se caractérise par des poussées de gravité variable entrecoupées de rémission.
La symptomatologie dans les deux maladies est souvent proche, mais les rectorragies sont souvent révélatrices dans la rectocolite hémorragique, une fistule anale évoquant plutôt une maladie de Crohn. La diarrhée chronique est très fréquente, souvent inaugurale. Des manifestations extradigestives, rhumatologiques (arthralgies, lombalgies) cutanées (érythème noueux) ou muqueuse (aphtose buccale) peuvent précéder ou s’associer aux signes digestifs.
Les douleurs abdominales sont d’intensité variable, souvent localisées au niveau de la fosse iliaque droite en cas de maladie de Crohn : une iléite terminale peut simuler une appendicite.
Il faut rechercher à l’interrogatoire l’existence d’un syndrome de Koenig, témoin d’une sténose du grêle. Une diarrhée chronique associée à une fistule anale évoque une maladie de Crohn.
Examens :
La rectoscopie permet le diagnostic de rectocolite hémorragique, l’atteinte rectale étant constante dans cette maladie. En poussée il existe toujours un syndrome inflammatoire qu’il faut rechercher devant une diarrhée chronique.
Les coprocultures et la parasitologie des selles sont indispensables pour éliminer une colite infectieuse, principal diagnostic différentiel.
La coloscopie avec iléoscopie permet dans tous les cas le diagnostic et distingue la plupart du temps la rectocolite hémorragique dont l’atteinte inflammatoire est continue à partir du rectum, de la maladie de Crohn dont l’atteinte est souvent discontinue. L’atteinte du grêle n’existe que dans la maladie de Crohn (Fig. 2 et 3, voir également figure 3 dans le cahier couleur). Les biopsies perendoscopiques peuvent mettre en évidence des granulomes (30 à 50 % des maladies de Crohn) qui permet de différencier les deux maladies. Le risque évolutif à terme, après 10-15 ans d’évolution est la cancérisation, risque commun aux deux maladies.
Traitement :
Le traitement médical des formes modérées a recours aux 5 aminosalycilés. En cas de poussée plus grave les corticoïdes dont l’action est rapide par voie générale sont nécessaires. Dans les formes corticodépendantes, les immunosuppresseurs (azathioprine, Imurel®) doivent être utilisés. En cas de forme très évolutive ou fistulisante de maladie de Crohn, les anticorps anti-TNF alpha (par exemple, infl iximab, Remicade®) donnent des résultats souvent spectaculaires, mais malheureusement transitoires, ce qui nécessite un traitement d’entretien. Le traitement chirurgical ne s’envisage qu’en cas d’échec des traitements médicaux. Il peut être indiqué en urgence si survient une colite fulminante (colectasie) parfois révélatrice de la maladie.
Colites microscopiques :
Diagnostic :
Elles sont responsables d’une diarrhée sécrétoire chronique, aqueuse parfois sévère (15 à 20 selles par jour) fluctuante. Ce tableau bruyant contraste avec un état général souvent peu altéré et avec une coloscopie macroscopiquement normale. Seules les biopsies étagées permettent de reconnaître le diagnostic. On distingue la colite collagène du fait de la présence d’une bande collagène épaissie sous l’épithélium de surface et la colite lymphocytaire qui se traduit par une augmentation du nombre de lymphocytes intraépithéliaux dans l’épithélium de surface.
Les deux maladies donnent un tableau clinique similaire et ne peuvent être distinguées que par les biopsies coliques. Biologiquement, il n’existe pas de syndrome inflammatoire et les coprocultures sont négatives. L’évolution spontanée est parfois résolutive, mais peut également être chronique avec des poussées entrecoupées de rémissions. Il existe une forte prédominance féminine dans la colite collagène. Des maladies auto-immunes (thyroïde ++, collagénose) sont souvent associées. Les colites lymphocytaires sont parfois provoquées par des médicaments (veinotoniques, ranitidine, inhibiteurs de la pompe à protons, etc.) et dans ce cas résolutives à l’arrêt du produit incriminé.
Traitement :
Le meilleur traitement actuel semble être la budésonide sous forme orale (Entocort®) ou les corticoïdes à faibles doses. Les 5-aminosalycilés sont moins constamment efficace.
Colon irritable et diarrhée fonctionnelle :
Le colon irritable comprend un ensemble de symptômes intestinaux fonctionnels comportant des douleurs ou un inconfort abdominal associés à des troubles du transit (constipation ou diarrhée), l’ensemble évoluant depuis au moins 12 semaines selon les critères établis lors d’une réunion de consensus à Rome (cf. Constipation).
Parmi les signes évoquant ce diagnostic, il faut citer l’impériosité des selles, leur caractère souvent postprandial, la sensation d’évacuation incomplète, les ballonnements, l’émission de glaires associées aux selles (la classique colite mucomembraneuse).
On parle de colon irritable à tendance diarrhéique s’il existe plus de 3 selles par jour, et de colon irritable avec constipation prédominante s’il existe moins de 3 selles par semaine. Les troubles sont souvent inconstants avec des périodes de rémission spontanée. Le colon irritable à forme diarrhéique constitue la cause la plus fréquente de diarrhée chronique et doit donc être évoqué rapidement surtout chez les sujets jeunes pour éviter un excès d’examens complémentaires.
Traitement :
Les ralentisseurs du transit type lopéramide sont efficaces, mais la rechute est la règle dès l’arrêt du traitement.
Les mucilages, par leur propriété hydrophile, peuvent augmenter la viscosité des selles et donc leur impériosité.
Les mesures diététiques sont souvent indispensables : le recours à un régime sans résidu plus ou moins élargi est à recommander, souvent suivi spontanément par les patients.
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