INTRODUCTION :
L’asphyxie périnatale du nouveau-né à terme demeure un problème de santé publique dans les pays en voie de développement étant donné la morbidité et la mortalité qu’elle entraîne.
Elle constitue la cause la plus fréquente d’atteinte du système nerveux central d’origine périnatale.
Son incidence est variable selon le niveau sanitaire des pays selon la qualité des équipes obstétricales.
Son estimation demeure difficile à apprécier en raison des problèmes de définition de l’asphyxie périnatale qui gênent la réalisation d’études épidémiologiques à large échelle.
ÉPIDÉMIOLOGIE :
L’incidence reste élevée, estimée à 2-4/1000 naissances selon THORENBERG 1995 dans la population suédoire.
HAGBERG. B rapporte une incidence de 4-9 pour 1000 naissances en Suède.
Elle est estimée à 2cas/1000 naissances vivantes selon GIRE 2000 dans la population française.
BADAWI rapporte une incidence de 2-8 pour 1000 naissances vivantes.
MING CHIALI rapporte une incidence de 1-3 cas pour 1000 naissances.
Le Pr HARIDI rapporte dans sa thèse 11% de cas d’asphyxie néonatale parmi les 550 nouveau-nés hospitalisés chaque année. Durant l’année 2011, il y a eu à Béni-Messous 80 nouveau-nés hospitalisés pour asphyxie néonatale parmi les 12000 naissances vivantes.
Cette incidence reste inchangée malgré les progrès de la médecine périnatale. L’accouchement gardant donc une part des risques difficilement évitables.
La souffrance foetale complique 1,5% das accouchements.
L’encéphalopathie néonatale est estimée à 2-8/1000.
10-20% des IMC sont attribuables à la souffrance foetale.
L’infirmité motrice cérébrale touche 2-2,5 pour 1000 naissances vivantes.
Le pronostic global des nouveau-nés avec asphyxie ne s’est guère amélioré ces 20 dernières années : environ 1/3 de décès, 1/3 de séquelles souvent lourdes, 1/3 de survie sans séquelles.
DÉFINITIONS :
L’académie américaine de pédiatrie définit l’encéphalopathie hypoxo-ischémique par l’association :
– Score d’APGAR < 3 à 5 min.
– pH ombilical acide.
– Détresse neurologique précoce.
– Défaillance multi-viscérale.
En 2002, le collège américain d’obstétrique et de gynécologie rajoute aux critères essentiels : l’existance d’une paralysie cérébrale de type quadriplégie spastique ou dyskinésie et l’exclusion d’une autre cause. D’autres critères suggèrent une anoxie intra-partum avec présence :
– D’un événement sentinelle (rupture utérine, hématome rétro-placentaire, éclampsie, procidence du cordon, rétention de la tête dernière).
– Changement brutal du Rythme Cardiaque Foetal (RCF).
– Imagérie IRM spécifique.
PHYSIOPATHOLOGIE :
Face à une anoxie, le nouveau-né utilise plusieurs phénomènes de compensation pour pallier à cette situation critique, avec redistribution de la masse sanguine vers les organes nobles (Système Nerveux Central SNC++).
Lorsque ces mécanismes sont dépassés, l’anoxie peut avoir des conséquences néfastes sur tous les organes entraînant une défaillance multi-viscérale, la plus étant la souffrance cérébrale avec des séquelles neurologique ultérieures.
Il existe plusieurs phases dans la genèse d’une encéphalopathie néonatale :
1. Etat pré-asphyxique : tels une insuffisance de croissance intra-utérine, un état métabolique maternel anormal, une foetapathie virale, une post-maturité…
2. Phase d’anoxie avec diminution des apports énergétiques, entrée de sodium et d’eau, accumulation de calcium et de neurotransmetteurs, responsable de mort neuronale précoce.
3. Phase de dépression neuronale avec niveau énergétique normal mais une activité neuronale déprimée associée à une libération des radicaux libres et d’oxyde nitrique secondaire à un stress oxydatif déclenché par les phénomènes de reperfusion.
4. Phase de mort cellulaire retardée secondaire au dysfonctionnement des micro-vaisseaux et excito-toxicité glutamatergique par accumulation du calcium.
Ces différentes phases laissent penser qu’il existe une fenêtre thérapeutique de quelques heures (6 heures pour la plupart des auteurs) pendant laquelle une intervention est possible pour prévenir une partie des lésions cérébrales.
CLINIQUE :
– Les troubles neurologiques : sont classés en fonction de la gravité selon les stades de SARNAT et SARNAT :
. Stade I : hyperexcitabilité, tonus et réflexes archaïques normaux, troubles dysautonomiques sympathiques (mydriase, tachycardie, encombrement modéré).
. STADE II : dépression de la conscience, troubles du tonus, réflexes archaïques faibles ou abscents, signes dysautonomiques parasympathiques (myosis, bradycardie, encombrement bronchique, diarrhée), convulsions focales ou multi-focales.
. STADE III : coma, hypotonie globale, absence des réflexes archaïques, signes dysautonomiques, état de mal convulsif ou non, signes de décéréberation.
En plus des troubles neurologiques il existe des signes de défaillance multiviscérale :
– Respiratoire : détresse respiratoire secondaire à une inhalation méconiale sachant que le méconium est toxique pour l’arbre aérien.
– Cardiaque : avec le risque d’insuffisance cardiaque.
– Hépatique : avec cytolyse hépatique et à l’extrême une insuffisance hépatique.
– Rénale : avec oligurie annonçant l’insuffisance rénale, et l’éventuelle hématurie et protéinurie signant l’atteinte glomérulaire.
– Intestinale : avec le risque d’entérocolite ulcéro-hémorragique.
– Hémostase : avec risque de Coagulation IntraVasculaire Disséminée (CIVD).
EXPLORATIONS COMPLÉMENTAIRES :
1. Électroencéphalogramme (EEG) :
Examen de grande valeur pronostique, nécessite une technique d’enregistrement rigoureuse et un lecteur expérimenté.
ALLEST a révisé les critères EEG pour caractériser la gravité de l’encéphalopathie néonatale :
– EEG normal ou subnormal dans l’Encéphalopathie Hypoxo-Ischémique (EHI) de stade I.
– EEG intermédiaire, continu de bas voltage (5-25 uV), continu lent ou discontinu de type A ou B dans le satde II.
– Il est de bas voltage avec rythme thêta, paroxystique, périodique ou inactif < 5 uV dans le satde III.
2. Échographie trans fontanellaire :
Elle permet d’éliminer les autres causes de détresse cérébrale, elle peut retrouver des échogénécités périventriculaires et des lésions des noyaux gris centraux.
Elle peut retrouver des signes indirects d’atrophie corticale.
3. IRM cérébrale :
Réalisée dans les 15 jours de préférence. La classification IRM la plus utilisée est celle de Baenziger :
Type a : hyper signal diffus (T1) des 2 hémisphères avec absence de différenciation SB/SG témoignant d’une atteinte étendue.
Type b : hyper signal para sagital (T2) à la jonction de l’artère cérébrale moyenne, antérieure et postérieure.
Type c : hyper ou hypo signal des noyaux gris centraux.
Type d : leucomalacie périventriculaire.
Type e : AVC ischémique ou hémorragique localisé.
Type f : hypo signaux linéaires (T2) centrifuges périventriculaires dans le centre semi ovale et de la substance blanche des lobes frontaux et occipitaux.
ÉTIOLOGIES :
1. Dystocie dynamique :
– Hypersystolie : contractions plus importantes et plus prolongées avec une intensité > 60 mm Hg.
– Tachysystolie : la fréquence des contractions est supérieure à 5 par 10 mn.
– Hypertonie : correspond à un tonus de base supérieur à 11 mm Hg en début de travail et supérieur à 18 mm Hg en fin de travail.
2. Un travail trio long épuise les réserves d’oxygène.
3. Causes maternelles : pré éclampsie, diabète, grossese prolongée, complications de l’anesthésie générale.
4. Causes annexielles : hématome rétro-placentaire, placenta praevia, chorioangiome, accidents de postion du cordon (procidence, circulaire serrée).
5. Causes foetales : hyptorphie, macrosomie, prématurité, post-maturité, anémies foetales aiguës.
PRISE EN CHARGE :
Deux volets thérapeutiques :
– Neuroressussitation.
– Neuroprotection.
Buts
– Lutter contre l’oedème.
– Maintient d’une pression de perfusion cérébrale (PPC) correcte.
– Éviter toute gêne au retour veineux.
a. Position de la tête :
Tête bien droite, surrélevée à 30° pour favoriser le retour veineux.
b. Restriction hydrique :
– 2/3 des besoins d’entretient normaux (60 cc/Kg Sérum glucosé SG 10%).
– Surveillance du poids, de la diurèse et de l’ionogramme sanguin.
– Maintien d’une pression artérielle (PA) normale :
* Éviter les fluctuations brutales de la TA.
* Corrections des conditions pouvant entraîner une abolition de la régulation du débit sanguin cérébral : hypoxie, hypercapnie, hypoglycémie.
c. Traitement des convulsions :
– Phénobarbital : Ampoule : 40 mg = 1 cc.
* Traitement d’attaque : 20 mg/kg en intraveineuse lente (IVL) diluée dans du sérum salé isotonique (SSI), dose renouvelable sans dépasser 40mg/kg/j.
* Traitement d’entretien : 3-5 mg/kg/j, 24h après la dose d’attaque (DA).
* Effets secondaires : somnolence, hypotonie.
d. Hypothermie contrôlée : son effet protecteur serait lié à la :
– Diminution de la libération des acides aminés excitateurs,
– Diminution de la synthèse d’acide nitrique,
– Diminution de la consommation énergétique cérébrale.
Elle peut être corporelle ou sélective (tête), doit être débutée entre 6 et 72h, la température ciblée : 33-35 degrés.
De nombreuses études ont démontré l’amélioration du pronostic neurologique des nouveau-nés bénéficiant de cette neuro-protection.
PRONOSTIC :
Les éléments du pronostic :
Les convulsions :
– Les crises convulsives font parties des formes modérées et sévères de l4EHI et peuvent être indicatrices de mauvais pronostic.
– Elle constituent un marqueur pronostic défavorable, avec risque de décès de 33% au cours de la première année et un risque de handicap moteur de 55% chez les survivants.
– Leur précocité est un indicateur péjoratif et les crises qui surviennent avant 4 heures de vie sont associées à des évolutions défavorables.
Évolution clinique immédiate :
La rapidité du retour à la normale est l’un des éléments clé du pronostic.
Lorsqu’un examen se normalise au cours de la 1ère semaine de vie ceci est généralement associé à une évolution favorable, par contre un examen anormal ne s’associe à un pronostic défavorable d’une manière significative qu’après 14 jours de vie.
Électroencéphalogramme (EEG) :
C’est un excellent outil pronostic, en effet : entre la 12ème et la 24ème heure, la présence d’anomalies importantes du tracé de fond est constamment associée à une évolution péjorative (décès ou séquelles lourdes).
A l’inverse, la normalité du tracé est un bon pronostic.
La surveillance de l’évolution repose sur des examens cliniques répétés, voire quotidiens en phase aiguë.
L’enfant sera revu tous les trimestres au cours de la première année ou mieux aux âges clés du développement psychomoteur jusqu’à la scolarisation afin de déceler précocement les anomalies neuro-développementales et de les prendre en charge efficacement .
Ces consultations doivent être multidisciplinaires.
PRÉVENTION :
Prise en charge prénatale :
– Surveillance de qualité de toutes les grossesse : ceci permettra le dépistage des grossesses à haut risque.
– Création d’un centre de prise en charge de grossesse à haut risque équipé en personnel et en matériel.
– Amélioration de la prise en charge (PEC) en salle de travail : il est impératif que les matérnités se dotent de :
* Cardio-tocographes : surveillance durant le travail de l’activité cardiaque et de la dynamique utérine.
Il devra être systématique pour toutes les grossesses à risque.
Et pour la primipare, il serait souhaitable que les salles de travail puissent disposer de :
* pH mètre pour pouvoir surveiller le pH dans les accouchements à haut risque de souffrance et de l’apparition d’anomalie du Rythme Cardiaque Foetal (RCF).
* Échographie permettant de faire une échographie d’urgence, surtout chez les femmes non suivies, n’ayant jamais eu d’échographies antérieures.
Prise en charge post natale :
– Formation du personnel : la réanimation du nouveau-né doit être démystifiée. Les principes et techniques doivent êtres diffusés à toutes les personnes qualifiées travaillant en salle de travail.
En effet, pour assurer avec succès la naissance d’un nouveau-né, un pédiare, un anesthésiste ou une autre personne formée et entraînée, doit être disponible à tout moment de la journée pour réanimer le nouveau-né si nécessaire.
– Préparation de la réanimation :
Toutes salle de travail doit comporter une salle de réanimation du nouveau-né avec le matériel et l’équipement nécessaire pour parer au pire des catastrophes.
Au minimum 2 personnes entraînées doivent être disponibles bien avant la naissance du nouveau-né pour prendre connaissance du dossier de la mère.
En effet, la communication entre l’obstétricien et le pédiatre durant le travail ou avant un accouchement par césarienne est une garantie du succès de la réanimation.
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