Définition :
Psychiatrie Périnatale de la psychiatrie du nourrisson s’était déroulé à Cannes. Tous les grands noms (pédiatres, pédopsychiatres, psychanalystes) étaient présents ; les pédopsychiatres français y découvraient des pistes intéressantes et pouvaient exposer les travaux qu’ils entreprenaient.
Par la suite, un lien conceptuel et pratique s’est fait entre l’abord des pathologies maternelles autour de la naissance et leur impact perçu sur le développement du bébé. L’intérêt suscité, dans la suite des travaux de Brazelton, sur les compétences du nourrisson a permis de redécouvrir les théories de l’attachement de Bowlby, puis d’élaborer avec Stern les théories de l’interaction entre le nouveau-né et son entourage.
Les psychanalystes postkleiniens se formaient à l’observation du nourrisson selon la méthode de Bick et peu à peu se construisait une psychopathologie du bébé. Les pédopsychiatres français, à la suite de Lebovici, ont enraciné leur pratique dans cette découverte du monde psychique de l’enfant au sein de son histoire familiale (le mandat transgénérationnel) en même temps qu’ils s’intéressaient au phénomène de parentalisation.
La PPN s’est ainsi créée et le terme fut consacré lors de colloques pour enfin prendre ses lettres de noblesse avec le titre « Psychiatrie périnatale » du livre de Lebovici et de Mazet publié aux PUF en 1998.
Le champ de la PPN s’étend de la grossesse à la fin de la première année de l’enfant. L’évolution des connaissances pose aujourd’hui la question de la nécessité de se pencher encore plus précisément mais aussi avec plus d’acuité et de continuité sur les 6 premières semaines de vie qui constitueraient, en quelque sorte, le temps d’une psychiatrie néonatale. Cette période reste encore inconnue et mystérieuse. Nous pensons qu’elle est à prendre en considération sans pour autant la détacher de l’avant et de l’après.
Pour les pédiatres et les gynéco-obstétriciens, le temps de la périnatalité est divisé en une période prénatale qui couvre la phase préconceptionnelle jusqu’à la naissance (hors interruption volontaire de grossesse) et d’une période postnatale à 28 jours ou jusqu’à la fin de l’hospitalisation lorsque les nouveau-nés sont hospitalisés.
Histoire et contexte :
La psychiatrie s’est penchée sur ce temps de la vie par l’intermédiaire des pathologies mentales des mères qui sont apparues comme spécifiques : la psychose puerpérale, la dépression du post-partum. Si dans les autres pays et en particulier au Royaume-Uni ce sont les psychiatres d’adultes qui ont maintenu cet intérêt et qui sont responsables d’unités mère-bébé, en France en revanche (comme en Suisse et en Belgique) ce sont les pédopsychiatres qui ont repris ce champ à leur compte mettant ainsi l’accent sur la relation et sur les effets de la pathologie maternelle sur le bébé. Le regard s’est déplacé de la mère sur l’entre-deux (mère-bébé, parents-bébé) pour remonter dans la lignée transgénérationnelle puis redescendre à nouveau pour vraiment découvrir le bébé. Nous pouvons dire qu’en France nous en sommes à cette étape et qu’elle est, comparée à la PPN internationale, particulièrement originale. Le regard du soignant rebrousse chemin, du bébé vers les parents et à travers eux vers les grands-parents. La PPN amorce également une remontée dans le temps de la vie. En effet, depuis une à deux décennies elle s’est familiarisée avec le beau bébé de 9 mois, a découvert celui de 3 mois et commence à s’interroger sur celui de moins de 40 jours, temps qui correspond en partie à celui du congé maternité pour la mère et durant lequel elle est chez elle, souvent seule avec lui. Le profond désarroi dans lequel sont plongés la mère et le père face à ce nourrisson aux manifestations déroutantes est trop méconnu. Il serait désormais souhaitable (et nous nous y employons) de se pencher sur cette souffrance familiale périnatale constituante qui peine à s’appuyer sur les ressources des familles dispersées. Ces souffrances trouvent normalement une résolution mais elles peuvent devenir pathogènes dans cette période vécue sous tension, confuse, envahie par le corps et ses productions, soumise à un sentiment de « vidange » psychique et d’un épuisement dans lequel le temps et l’espace, les limites psychiques et corporelles se diluent.
La psychopathologie maternelle et paternelle présente une spécificité qui est à l’origine d’interrogations, de recherches centrées sur ce temps de la vie. Le lien fort qui existe entre devenir parent et être bébé, les capacités de remaniement observées, la grande fragilité mais aussi la richesse de cette période ont mobilisé les psychiatres afin d’apporter un soin qui tienne compte de ces facteurs. Mais le trouble du parent, s’il englobe son histoire d’enfant, présente aussi une force considérable pour le bébé, impact dont il serait réducteur de penser qu’il est direct, systématique, linéaire, unicausal. En regard de cette complexité, nous retrouvons sur ce temps de la vie un grand nombre de professionnels qui sont de véritables partenaires des psychiatres de bébés. Sont conviés autour du berceau ceux qui entourent la femme devenant mère, ceux qui attendent le bébé, professionnels du soma, du psychisme, représentants de la société. La PPN est le lieu d’une transdisciplinarité intense et indispensable.
Les confrontations d’approches très diverses sont à l’image de celles qui se jouent chez le bébé et les parents où tout ce qui est psychique s’exprime préférentiellement par le corps, obligeant chacun à un retour sur son propre corps et à ses propres émotions. La compréhension de ce qui se construit s’appuie sur l’observation et l’appréhension des éprouvés avant même l’utilisation de la parole.
Objet de la psychiatrie périnatale et moyens thérapeutiques :
Cadre :
La PPN a pour objet les modifications que vit un couple lorsque le projet de devenir parent se réalise : les transformations vécues par la future mère et le futur père durant la grossesse, les représentations durant cette période et la relation qui se vit avec le foetus, le moment de la naissance et les bouleversements qui ont lieu à ce moment-là, enfin la construction psychique du bébé incluant la dimension somatique, dans une dimension développementale et psychodynamique en relation avec l’environnement. Elle considère qu’il y a une continuité entre ces différentes étapes et en tient compte dans les réponses préventives, thérapeutiques qu’elle met en oeuvre.
Elle a développé des outils d’appréhension et de compréhension en référence à diverses théories : expérimentales, des neurosciences, des compétences du bébé, de l’attachement, de la psychanalyse et des théories systémiques pour l’étude de l’interrelation et des interactions.
La PPN intervient lors de la présomption de risques pour le bébé lorsqu’une pathologie parentale existe ainsi qu’une pathologie ou une souffrance du bébé. Sa fonction est préventive et thérapeutique.
Nous nous centrons, dans ce travail, sur la période immédiate après la naissance, période que nous appellerons néonatale et l’envisageons jusqu’à la fin de la première année faute de données actuelles suffisantes concernant les 6 premières semaines de vie. Nous n’abordons pas la question des problèmes somatiques, des pathologies de la grossesse, de l’accouchement, du bébé, qui à eux seuls mériteraient l’élaboration d’un article, en sachant que la PPN y apporte sa contribution. Enfin, nous ne traitons pas la prescription médicamenteuse dont les caractéristiques sont particulières durant la grossesse et lors de l’allaitement.
Premiers outils thérapeutiques :
Ce sont ceux qui passent par les parents et plus particulièrement par la mère, ceux qui portent et enveloppent les interrelations parents-bébé sont issus de l’observation selon Bick, ceux qui envisagent plus encore le bébé sont dans la lignée de Pikler.
Ainsi, la PPN est transdisciplinaire, le bébé et ses parents sont le lieu de rencontre des sages-femmes, puéricultrices, gynécoobstétriciens, pédiatres, psychiatres… qui se posent la question du comment s’effectue le mystère de la vie et du comment surviennent les « avatars » dans la relation. Ce modèle polyfactoriel, jamais clos, s’appuie sur une confiance indispensable entre professionnels afin que chacun interroge l’autre, non pour se renvoyer l’énigme mais pour la dénouer ensemble. Cette mutualité est une condition pour créer une alliance thérapeutique avec les parents et leur bébé afin d’entrer dans leur monde interpersonnel.
Clinique des pédopsychiatres :
C’est celle du récit, du discours et du corps en relation, alliant description, témoignage et remémoration. Comment faire pour que cette clinique ne soit pas engloutie par le récit parental si riche à ce moment de la vie, récit qui masque l’observation et altère les capacités de description de l’interrelation et encore plus celles de la perception de l’expression corporelle du bébé ?
La PPN est certes celle du passé qui se représente dans cette nouvelle histoire en présence d’un bébé, elle l’est également dans la mise en route d’une nouvelle histoire qui ne peut se dire qu’à travers le corps de l’enfant, d’autant plus qu’il est jeune. Dans ce corps se déroule l’histoire de sa construction, il est le théâtre du vécu psychique du bébé.
La richesse de la PPN vient de l’obligation faite, devant le berceau, d’intégrer ces différentes approches. La pédopsychiatrie se doit de développer des outils d’approche où la clinique est essentielle. L’enseignement de Bick transmis par des collègues comme Geneviève et Michel Haag repose très clairement sur cette base. L’observation du nourrisson en est le noeud, elle se comprend comme une attention contenante, porte d’entrée pour une compréhension et une action soignante respectueuses des capacités et des sensibilités de chacun. L’étude des interactions et l’analyse des formes d’attachement ne sont pas exclues de cette observation qui tient compte également du ressenti et des éprouvés de l’observateur. Celui-ci est en position de témoin participant à un moment de vie où le bébé comme ses parents sont dans des mécanismes de projection et de régression puissants qui l’englobent lui aussi.
Rôle du pédopsychiatre :
Le pédopsychiatre, face aux futurs parents, est attentif à leur état psychique. Il se préoccupe de leur devenir avec le sentiment d’un risque encouru et, simultanément, d’une chance de mobilisation possible. Il connaît les facteurs de décompensation mais aussi les promesses d’une reprise des capacités structurales. Il est également attentif pour le foetus (encore trop négligé car pensé comme relativement protégé), puis pour le bébé compte tenu de la richesse des échanges et leur impact sur le développement à cet âge. Les effets du bébé sur la pathologie maternelle sont, sans doute, sous-estimés car ils s’expriment de préférence soit en présence du bébé, soit lorsqu’on s’adresse à la partie maternelle de la femme. Cette dimension pathologique reste souvent méconnue de nos collègues psychiatres d’adultes lorsqu’elle n’envahit pas entièrement le champ psychique. En revanche, le pédopsychiatre y est particulièrement sensible car il reste en relation avec le bébé et la partie bébé de la mère. Il est attentif aux conséquences de la pathologie maternelle sur la construction psychique du bébé dans une sorte de boucle interactive pathologique. Sa position est cependant ouverte, réceptive pour devenir descriptive (comme il pourrait l’être lors de la contemplation d’un paysage), mettant de côté les théories afin d’approcher chaque dyade dans la richesse et la nouveauté créative des premières relations. L’attitude descriptive met de côté, dans un premier temps, le repérage d’indices, c’est-à-dire le repérage de critères négatifs (signes ou symptômes) base de l’enseignement en médecine. La PPN a pour but de laisser chaque bébé et ses parents découvrir leurs propres modalités d’échanges, leurs appuis, leur place dans l’histoire familiale afin qu’il puisse se construire harmonieusement dans sa double lignée.
Présence parentale :
Une des composantes majeures serait la possibilité pour le père et la mère d’être ensemble autour du berceau, de devenir parents pour cet enfant-là. Pour beaucoup de nos consultants, ce « simple » fait est trop complexe, demande une structuration des liens sous une autre forme que l’identification adhésive.
Une partie des parents, qui nous consultent, ont une altération des possibilités de solidarité qui malheureusement rencontre nos difficultés institutionnelles à prendre en compte le père et la mère dans leur individualité et leur complémentarité autour du berceau. Le psychiatre se pose la question de sa position à la fois ouverte à la créativité spécifique de chaque constellation tout en tenant compte des dysfonctionnements et des voies à trouver pour leur résolution.
L’observation participante inclut la perception des diverses interactions (biologique, comportementale, affective, fantasmatique, symbolique) et des compétences du bébé. Le souci est celui de sa construction psychoaffective, dans ses bases et ses différentes fonctions, ou lieux d’expression, que sont les développements psychomoteur, cognitif et le langage. Les mécanismes en jeu sont nombreux et nous parvenons à les appréhender en observant le bébé, certes dans son environnement immédiat, mais en étant aussi sensible à son histoire à travers celle de ses parents. Nous considérons les interrelations précoces, l’importance des mécanismes projectif, intersubjectif et intrapsychique qui se manifestent par le corps, les phénomènes de transmissions transgénérationnelles, l’étude de la psychopathologie parentale et son retentissement, les représentations d’attachement des parents (ou modèles internes opérants) et leur effet sur l’attachement en cours du bébé.
Théories :
Nous ne reprenons pas en détail les théories concernant les compétences interactives précoces, ni de l’accordage, ni enfin de l’attachement et de sa représentation chez l’adulte. Elles sont toutes essentielles et complémentaires. Leur intérêt actuel se situe dans les ponts entre elles, les liens entre ces concepts ouvrant à une meilleure compréhension du fonctionnement du bébé.
Les grands points à retenir sont l’étroite relation entre le bébé et l’adulte qui lui prodigue des soins, leurs compétences réciproques, la capacité d’y avoir accès et d’engager un accordage qui soutient la transmission transgénérationnelle. Les questions qui se posent devant un bébé sont : comment s’opère le passage d’un monde représentationnel d’un adulte à celui d’un enfant, par quel génie le monde du bébé s’organise et prend sens dans cette histoire qu’il prolonge ?.
Attachement :
Il se réfère aux cinq critères de Bowlby : échange de sourire, solidité du portage, chaleur de l’étreinte, douceur du toucher et interaction lors de l’allaitement auxquels Anzieu ajoute la concordance des rythmes. Ce besoin d’attachement du bébé réactive chez la mère ses expériences précoces de lien avec sa propre mère et les représentations qu’elle s’en est faite. C’est sur cet arrière-plan qu’elle s’appuie pour offrir à l’enfant une base de sécurité propre à laisser se créer des modalités d’interaction comportant un style personnel fait d’invariants et d’écarts.
Interaction :
Elle a un support bien physique, il est sensoriel et moteur (tonique). Bullinger montre comment, à travers le concept de régulation tonique, un sens est donné aux états tonicoémotionnels, qui va constituer la face externe de l’enveloppe corporelle.
Il cite Wallon pour qui l’activité de répétition permet l’élaboration de noyaux représentatifs, points d’appui pour de nouvelles émotions qui vont progressivement se diversifier. Ces apports concernant les aspects toniques et émotionnels, comme celui d’équilibre sensoritonique, reliant les dimensions biologiques, physiques, sociales et cognitives sont indispensables pour comprendre le bébé. Ajuriaguerra a décrit le « dialogue tonique », interaction entre le bébé et la personne qui le porte, conception que nous retrouvons chez Winnicott et qui est manifestement primordiale, ce dont nous faisons l’expérience quotidiennement dans les unités mère-bébé. Dans cette situation, les échanges, qui prolongent ceux perçus par le foetus pendant la grossesse, sollicitent les flux vestibulaires, tactiles, olfactifs, auditifs et visuels. Les modulations produites par l’adulte donnent sens aux variations inévitables. Le bébé a la capacité, dans une situation d’accordage affectif, de reproduire l’état émotionnel de l’adulte transmis suivant un mode sensoriel en le transposant en une autre modalité sensorielle : c’est ce que Stern appelle la transmodalité. La perception amodale contribue à former un sens du soi et de l’autre émergent.
Piaget insiste sur cette continuité entre le biologique et le psychologique. Nous pensons le comprendre comme un matériau sur lequel la subjectivité se construit. Ajuriaguerra s’est appuyé sur cette double compréhension du développement enraciné sur des bases physiologiques mais aussi sur les notions d’émotion et de tonus.
Psychomotricité :
Elle s’est ainsi développée en reposant sa théorie sur les articulations entre le corps et le développement du psychisme comme première expression cognitive et fondement indispensable à l’intelligence. La sensorimotricité tient une place centrale en PPN et les psychomotriciens sont des partenaires clés.
Winnicott situe le développement du bébé dans la relation à la mère (celle donneuse de soins), celle qui assure trois fonctions : de holding comme facilitateur de l’intégration sensorimotrice ; de handling facilitateur de l’autonomie ; de personnalisation et de relation d’objet comme base de toute relation humaine.
C’est la préoccupation maternelle primaire qui confère à la mère une sensibilité accrue au corps du bébé et au sien propre. Nous retrouvons la sensorimotricité, le dialogue tonique, à la base de l’attachement et de la relation d’objet qui se manifestent dans les interactions. L’un s’origine dans l’autre sans que nous puissions les séparer. Winnicott met l’accent sur l’importance de soins parentaux appropriés. La qualité sensorimotrice de l’enveloppe, la qualité tonique du portage assurent un sentiment de continuité à l’enfant d’où peu à peu émergera le sentiment de la séparation du « soi ». Cette dernière phase exige l’instauration d’une sécurité interne fondatrice d’un narcissisme de qualité.
Le corps sert de vecteur relationnel entre l’adulte et le bébé.
Ce dernier éprouve ses ressentis suivant des rythmes, des variations de ces rythmes, des répétitions associées à des éprouvés. Il en détache des structures sous forme d’éléments invariants mais aussi des différences auxquelles il raccorde des éprouvés de tonalités variées. Pour qu’il parvienne à cette performance, il faut certaines conditions de sécurité, de prévisibilité.
L’adulte maternant joue cette fonction en puisant en lui une sensibilité à la hauteur de celle du nourrisson. Entre la mère et le bébé, l’accordage affectif se dote d’un style, coloration de la communication émotionnelle entre eux deux. Ces interrelations ont en premier une représentation et une expression motrice. Les liens de connaissance sont des liens émotionnels exprimés à travers le corps. Selon Fonagy, la concordance des états entre le donneur de soin et l’enfant permet une internalisation de l’état mental de l’adulte dans le contexte où cela se produit. Sur cette base, il peut progressivement comprendre les états mentaux (thymiques et cognitifs) de l’interlocuteur et développer ce que Fonagy appelle une fonction réflexive qui caractérise l’accès à l’intersubjectivité.
Cet aspect en PPN est passionnant car il est source de fascination devant la beauté de ce qui se déroule dès lors que nous acceptons de nous situer dans une attention observante.
Nous découvrons simultanément les possibilités thérapeutiques qui s’ouvrent à partir de cette présence attentive. Cet émerveillement ne va pas sans douleur muette face aux ruptures d’accordage, au non-respect des besoins et des éprouvés archaïques que nous observons et qui font écho fortement en nous compte tenu de l’état de réceptivité dans lequel nous sommes.
Le bébé a besoin de cette fonction maternelle contenante de l’objet primaire, fonction qui maintient une continuité indispensable grâce à la présence d’une mère physiquement présente et malgré ses absences ou distances relationnelles. Le bébé peut, en la présence de la mère, vivre les échanges à travers son corps par le mécanisme d’identifications intracorporelles décrites par Haag.
Régulation tonicoposturale :
La régulation tonicoposturale selon Bullinger intègre parfaitement les théorisations de Haag. Il décrit la nécessité de l’objet d’arrière-plan primaire introjecté par le bébé pour constituer les premiers marqueurs de solidité interne. Celle-ci s’associe à l’interpénétration des regards et à la liaison visuomanuelle. Le jeune enfant, pour lancer la main vers l’objet et maintenir son attention vers celui-ci, a besoin de cette solidité interne. Le tonus de la mère soutient celui de l’enfant grâce à un ajustement postural et un dialogue tonique harmonieux.
Cette harmonie est vite atteinte par des altérations thymiques de la mère ; on comprend alors comment la thymie maternelle s’exprime par son corps et ses modulations posturales et toniques. Par ce canal, le bébé perçoit la nature des variations thymiques et les intériorise.
Relation mère-bébé :
Chaque relation entre une mère et son bébé est spécifique, comporte ses propres structures rythmiques détachables par l’enfant au milieu de toutes les perceptions sensitivosensorielles dans un contexte émotionnel particulier. Les soins maternels tissent ce langage corporel interactif permettant de construire un sentiment d’« appartenance mutuelle ». Le bébé en bonne santé, dans une relation suffisamment satisfaisante, grâce à la maturation de son système sensitivomoteur, se lance à la « conquête des capacités actuelles et nouvelles ». Il apprend par lui-même, montre le chemin à l’adulte, initie des échanges intéressants. Ses activités motrices sont à la source de son activité mentale, elles en sont le reflet, langage qui se construit au même rythme que le développement sensorimoteur. On observe une spirale entre l’activité motrice, la différenciation progressive des sensations et l’activité mentale. Au milieu d’un apparent magma de tensions internes, d’affects confus, d’angoisses primitives et de désorganisations apparaissent peu à peu des attitudes diversifiées. L’enfant se les répète, les exprime seul et dans l’interaction, semble en devenir maître et en faire sa coloration personnelle. Cette maîtrise progressive associée à une forme d’émergence de prise de conscience est très subtile, elle demande de la part de l’observateur une grande connaissance de cet enfant (de ses parents et de la relation qu’ils ont entre eux) obtenue grâce à une attention et une observation respectueuses des modalités relationnelles et de son climat.
L’enfant construit, élabore son espace mental à travers son corps : « à cet âge tout passe par le corps pour être peu à peu élaboré dans un espace mental ; toutes les grandes fonctions, cognitives, affectives, relationnelles, prennent racine et se construisent à partir de ce fonctionnement comportemental sensorimoteur préverbal du bébé ».
L’existence de la PPN vient de la prise en compte des aléas survenant dans ces processus. Aléas d’origines multiples et dont l’importance modifie fondamentalement la construction du bébé mais pas irrémédiablement. La PPN s’appuie sur ces nouvelles connaissances pour créer des réponses souples, diversifiées et multidisciplinaires afin de répondre aux besoins des enfants et de leurs parents. Le projet est de modifier le cours des évènements, non pas vers une histoire normée ou normative, mais vers une histoire personnelle structurante. Les formes de réponses thérapeutiques qui se sont mises en place se fondent sur l’expérience des secteurs de pédopsychiatrie et tiennent compte des facteurs particuliers liés à l’âge des enfants.
Pathologies :
À quels types de pathologies s’adressent ces soins ? Comment s’inscrivent dans le bébé les dysfonctionnements interactionnels pathologiques ? Bullinger nous éclaire sur ces processus chez le tout-petit lorsqu’il nous décrit le fonctionnement d’une « boucle archaïque ». Lors de dysfonctionnements interactionnels, que ce soit dû à la mère, au bébé ou aux deux, nous percevons une atteinte des capacités de dialogue qui s’exprime dans la synchronisation tonicoémotionnelle. L’équilibre entre la régularité (de la vigilance, des flux sensoriels, du milieu humain, des représentations), la régulation tonique (dans les échanges physiques) et le fonctionnement de ces capacités de dialogue et de synchronisation tonicoémotionnelle constituent ce que Bullinger appelle la « boucle archaïque » sur laquelle (et à laquelle) s’appuie (s’intrique) la boucle cognitive. Les aspects tonicoémotionnels et cognitifs sont entièrement liés.
Dépression maternelle :
Ainsi, la dépression maternelle peut rendre inadéquate la synchronisation de l’accordage qui s’appuie sur le dialogue tonique. Le partage émotionnel est pauvre dans ces cas et le bébé ne peut développer l’attention conjointe nécessaire au développement cognitif. Il ne peut être indifférent à la thymie maternelle qui s’exprime autant à travers le tonus utilisé dans l’ajustement postural que dans les échanges de mimiques et de sons. Le dialogue tonique, associé à un échange de regard pauvre, non centré sur la fovea, dessine une interaction spécifique. Un des premiers signes de souffrance chez le bébé est son expression tonique associée à un évitement fréquent du regard (signe de retrait affectif avant d’être signe d’un ensemble diagnostique). Cette question de la dépression maternelle est tout à fait centrale en PPN, même si la question de la carence, des négligences et de la discontinuité est finalement plus problématique et plus délicate encore dans son approche thérapeutique.
L’inadéquation maternelle aux besoins psychiques du bébé dans cette constellation dépressive crée des dysfonctionnements dans l’accordage affectif. Le retrait émotionnel dans les échanges, l’absence de plaisir partagé, la dimension opératoire, « figée », des soins, prenant une dimension technique, n’alimentent pas la psyché naissante de l’enfant. Le portage est souvent inadéquat, les interactions pauvres, les mimiques succinctes, la parole non seulement réduite mais dotée de caractéristiques mélodiques et rythmiques qui ne permettent pas de soutenir les échanges, si bien que le bébé s’en détourne fréquemment. Ces mères réagissent peu ou douloureusement aux manifestations de leur bébé qu’elles ne peuvent consoler puisque rien en elles ne les console. La mère est présente mais son objet intérieur est mortifère, l’enfant s’en détourne ou se l’approprie, ce qui met en danger réel son potentiel de vie psychique.
Dépression du bébé :
Le bébé peut être lui aussi déprimé, cette expression peut être le résultat de la dépression maternelle (ce qui n’en est pas l’unique issue cependant). Le retrait interactif et la perte du plaisir s’expriment à travers une pauvreté psychomotrice qui, avec les troubles somatiques et les troubles de l’attachement, sont les manifestations premières dont la nature peut être relevée grâce à une observation descriptive fine s’appuyant également sur le contre-transfert de l’observateur. Les assises narcissiques de l’enfant sont profondément touchées et menacent son développement ultérieur.
Mère psychotique :
Dans les situations où la mère est psychotique, malgré une prégnance forte des mécanismes psychotiques dans les interactions, nous pouvons constater dans un premier temps (1 à 2 mois) un maintien de la fonction maternelle apparemment bénéfique pour le bébé. La dépendance totale du bébé et la relation fusionnelle qu’il établit rencontrent des capacités maternelles adéquates à ses besoins. C’est parfois une insuffisance de notre connaissance clinique du bébé durant cette période qui nous laisse le penser. Nous avons encore à travailler sur ce temps spécifique des 40 premiers jours du bébé. Dès que le bébé commence à manifester une ébauche d’individualisation (lors de l’apparition du sourire, du décollement de la tête du corps de la mère, de l’augmentation des plages d’éveil) apparaissent des perturbations. L’individuation (son ébauche), les demandes plus grandes d’interactions révèlent de nombreuses perturbations : réponse inadéquate et inversée de la mère aux sollicitations de l’enfant, projection du délire ou des fantasmes maternels, séduction primaire, excitation, intrusion psychique ou retrait. L’enfant exprime sa souffrance par un évitement du regard, une hyper- ou hypotonie, une vigilance visuelle, une recherche d’appui sur le soignant (dans un cadre thérapeutique).
L’enfant « apprend » à connaître les états maternels et à s’y adapter. Il exprime ou réprime ses besoins en fonction de l’état psychique de sa mère. Il devient « économe », « hypermature » si la relation n’est pas trop désorganisante, intrusive, imprévisible.
L’enfant dans ce dernier cas est en danger, les angoisses deviennent inaménageables lors des rapprochés intrusifs ou des lâchages successifs. Ces perturbations sont parfois compensées par la relation au père s’il parvient à reconnaître la pathologie de la mère et l’impact que celle-ci a sur son bébé. Il n’est pas rare cependant que, malgré un discours sur la réalité de la maladie maternelle, le père la dénie au quotidien et laisse, trop volontiers, l’enfant seul avec elle.
Les perturbations des relations entre les parents et le bébé, les défauts de stimulation, les carences, ont un impact sur le fonctionnement des enfants. Ce sont les plus fréquentes et pas les moins complexes à soutenir et à traiter.
Carences de maternage :
Quand nous parlons de carences de maternage, nous regroupons les carences affectives et les carences de stimulation. Elles ne sont jamais seules, l’enfant peu stimulé peut être dans une relation fusionnelle narcissique à la mère qui ne perçoit pas son existence en dehors d’elle ou être, à l’inverse, dans une carence d’amour.
L’objet maternant est absent ici, non pas par dépression mais faute d’être investi souvent par des parents eux-mêmes carencés, sans appui sur des expériences infantiles affectives personnelles.
Ils ne peuvent puiser dans des images parentales suffisamment bonnes pour s’identifier à leurs parties bébé qui ouvriraient la voie vers leur bébé réel.
Plus fréquemment, associées à ces carences, se retrouvent les inadéquations, l’absence de continuité, la surstimulation et la submersion du bébé par les projections parentales qui provoquent nombre de manifestations corporelles et somatiques.
Les parents ne peuvent respecter le rythme du bébé dans l’interaction, durant ses retraits cycliques. Le jeune enfant répond également à ces débordements ou à ces dyschronies par des retraits, un vide psychique, un désinvestissement de la fonction motrice d’exploration.
Le bébé ne peut anticiper les modalités relationnelles, les soins qui lui seront donnés. La capacité maternelle de pareexcitation ne lui est que rarement offerte, si bien qu’il ne peut réellement l’intégrer. Cette fonction habituelle de pareexcitation s’appuie sur la capacité qu’a la mère de régresser durant cette période néonatale, sous la forme d’une crise d’identité précoce nécessaire qui lui permet d’avoir accès aux parties enfouies de son psychisme en lien avec sa propre petite enfance et à ses relations à sa mère. Cette régression, qui n’est cependant pas totale, la rend apte à offrir son appareil psychique comme contenant capable de métaboliser les émotions, le vécu du bébé et d’y répondre de façon adéquate.
Ce qui caractérise ces interactions, c’est l’imprévisibilité dans la discontinuité, laissant l’enfant en état d’insécurité. Cette discontinuité est souvent marquée par une proximité corporelle alliée à des lâchages sans qu’une bonne distance ne soit trouvée pour des échanges de regard soutenus par un « bon portage ».
Les soins corporels sont défaillants, non enveloppants, parfois ils évitent les zones sexualisées dans une attitude phobique ou au contraire trop insistants donnant le sentiment d’une fascination par une sexualisation crue.
Les échanges verbaux suivent les états émotionnels des parents, de la relation du couple. Ils peuvent devenir crus et violents.
Le bébé a à se construire au milieu de ce qui ressemble à un chaos, il peut paraître très attaché à sa mère, cherchant à lui plaire et développant des stratégies pour survivre. Rapidement, il retourne l’agressivité contre lui et met en place des rythmies pour y faire face. Fréquemment, l’observation révèle des enfants atoniques, avec une activité exploratoire particulièrement pauvre, une absence d’investissement du corps qui semble sans perception de l’inconfort et de la douleur dans lesquels il est.
Les troubles de l’attachement signent plus objectivement l’installation de ces modalités relationnelles. L’attachement insécure-évitant qui se dessine révèle la pauvreté du développement de la pensée, des affects, du récit, de la capacité de rêverie, de celle d’être seul à côté d’un adulte. Le nourrisson annule parfois ses mouvements créatifs dans ce type de relation à des parents préoccupés où l’environnement fait défaut.
Maltraitance :
L’enfant maltraité n’a pas de sécurité interne, si bien qu’il ne peut se fier à son ressenti interne lors d’interactions comportant des messages rassurants. Il reste vigilant, surveillant le monde physique, il ne peut ainsi se laisser aller au jeu et plus tard au faire semblant, et lorsqu’il l’ébauche, il laisse découvrir un monde interne terrifiant. Lors de violence parentale, l’enfant est sous une double emprise, celle de la violence de l’un et celle de la terreur de l’autre. Le monde est alors doublement effrayant.
La maltraitance, la violence atteignent la possibilité de jouer, de mettre en scène ses émotions et ses idées, de les relier avec les évènements extérieurs. Avec une mentalisation pauvre, l’enfant a tendance de ce fait à la répétition.
Très souvent, nous percevons chez ces très jeunes enfants l’ébauche de représentations, mais elles sont inadéquates, globales, sans souplesse et vite court-circuitées. La vie psychique interne est restreinte, l’expérience de soi est discontinue.
L’observation de ces bébés est difficile car les parents prennent le devant de la scène, leur histoire « fascine », fait écran à l’attention que nous devons porter à ces jeunes enfants. Une observation très soigneuse et continue permet une évaluation de ses atteintes et de ses besoins. L’illusion serait de croire qu’un simple changement de l’environnement pourrait modifier et faire disparaître les manifestations. Mais l’enfant s’est construit avec ces formes relationnelles, il les a déjà intériorisées. La pathologie du lien demande de l’attention contenante, un soutien des capacités parentales (même si elles sont succinctes), une continuité sécurisante afin que des modifications puissent voir le jour.
Traitement :
Le soin en PPN a plusieurs axes d’intervention.
Grossesse :
Pour les femmes enceintes (chapitre que nous traiterons rapidement et qui pourrait donner lieu à un autre travail), l’approche est diverse, et fonction des symptômes et des pathologies. Les sages-femmes sont les premiers interlocuteurs avec les médecins généralistes, les gynéco-obstétriciens. Les psychiatres et les pédopsychiatres interviennent soit en continuité des soins antérieurs (femme déjà suivie par un psychiatre), soit indirectement par l’intermédiaire de reprise ou analyse de pratique, soit en second à la demande des professionnels concernés par la grossesse.
Lorsque la grossesse se déroule sans aggravation ou sans perturbation du déroulement habituel, les sages-femmes sont à même de soutenir la femme et le couple. En revanche, dès que des inquiétudes particulières apparaissent, il n’est pas rare que les psychiatres soient interrogés, consultés. C’est le cas lors d’insomnies précoces non résolutives, associées à une dimension obsessionnelle vis-à-vis du symptôme, lors de fatigues ou douleurs somatiques envahissantes en particulier musculaire. Il en est de même lors de dépression, de délire, de troubles de l’identité, de dépersonnalisation, toutes manifestations psychotiques qui s’aggravent, d’addiction que les futurs parents ne parviennent pas avec les sages-femmes à contrôler suffisamment.
Enfin, les situations de grande vulnérabilité demandent un étayage supplémentaire afin de faciliter le lien avec le futur bébé.
Les traitements sont le plus souvent ambulatoires, en collaboration avec les partenaires concernés et choisis par le couple.
Les sages-femmes doivent adapter leur suivi à ces futures mamans en tenant compte de leurs angoisses, de leur représentation de la grossesse, du bébé, de la projection possible ou non dans le futur, des angoisses de mort et dans le troisième trimestre de l’anticipation de l’après-naissance avec présentation des professionnels de la petite enfance (infirmière puéricultrice de protection médicale et infantile [PMI] par exemple). Vers 6-7 mois de grossesse et parfois avant, nous réalisons des indications d’hospitalisation (temps plein, de jour, partielle) dans les unités mères-bébés où une sage-femme intervient. Ces hospitalisations permettent à certaines femmes de calmer une angoisse massive, de retrouver le sommeil, de s’apaiser, de voir leurs douleurs diminuer. La relation de confiance qui se construit alors facilite grandement la préparation à la naissance, le retour à la maison ou une hospitalisation mère-bébé à la sortie de la maternité. Les résultats sont nettement meilleurs dans ces cas en comparaison avec les hospitalisations décidées lors du séjour à la maternité. Elles permettent une continuité et une cohérence dans les soins, le soutien dans l’avant et l’après qui concerne la périnatalité.
Période postnatale :
Après la naissance, l’intervention la plus classique est celle des entretiens psychothérapeutiques développés par Palacio-Espasa. Si le processus thérapeutique vise l’espace entre la mère et le bébé, c’est par l’intermédiaire de la mère qu’il est atteint. Il s’agit de modifier les investissements de la mère sur le bébé uniquement dans ce secteur et non tout le fonctionnement psychique de la mère. Les représentations mentales de la mère, de sa relation à sa propre mère et de celle au bébé sont touchées. Très fréquemment, ce travail thérapeutique sur la relation ne donne pas lieu à interprétation sur le transfert. Le thérapeute aide la mère à reconnaître les manifestations, les expressions de l’enfant et leur retentissement en elle-même tant au niveau de ses perceptions, de ses émotions que de ses représentations mentales. Il atteint alors la question des identifications maternelles et des projections dont le bébé est le support dans une dynamique transgénérationnelle. Cette notion d’identification est particulièrement sensible à cette période de la vie où la préoccupation maternelle primaire est le reflet de ces identifications régressives indispensables qui touchent d’ailleurs aussi les soignants, mais dans une moindre mesure.
Le système dyadique est malléable, il permet un jeu entre réception des projections du bébé et leur transformation grâce à une ouverture suffisante de la mère. Cette ouverture est maintenue par l’identification régressive et cette transformation est possible grâce au lien conservé, chez la mère, entre processus primaire et processus secondaire. La mère joue une fonction organisatrice du monde interne de l’enfant à partir de l’attention qu’elle lui porte. Elle donne ainsi une figuration aux éprouvés infantiles, elle dessine les contours de l’affect dans la relation qu’elle crée, processus ancré dans la relation corporelle. Lorsque la mère ne peut remplir cette fonction soit par défense contre une régression trop risquée, soit par identification projective pathologique, soit par absence de capacité de mise en relation, c’est le soignant qui prête à la dyade cette fonction d’attention. Il met en marche une fonction de filtre entre les deux ayant pour but de protéger la mère des projections et des pulsions infantiles en lui offrant les éprouvés infantiles sous des formes plus nuancées et d’autre part protégeant l’enfant des retours non transformés des émotions maternelles. Le soignant vient comme un réceptacle aidant au transcodage de l’histoire qui s’écrit. Le partage des affects passe par le soignant qui aide les deux partenaires à intérioriser cette fonction grâce à une reconnaissance commune progressive.
Observation thérapeutique :
En PPN, suivant le courant de l’observation psychanalytique du bébé de Bick et les effets thérapeutiques de la méthode qui ont été constatés puis théorisés par Houzel, l’observation thérapeutique s’est développée comme un instrument privilégié d’approche chez le nourrisson. Cette technique demande beaucoup de qualités chez le soignant et en particulier celles de l’attente, de l’attention, de la capacité à tolérer les projections et à ne pas se protéger systématiquement par les défenses liées au savoir qui justifierait une explicitation trop rapide, trop immédiate. Elle nécessite la capacité à se laisser imprégner par l’ambiance fortement émotionnelle de ces moments de la vie sans intervention brutale pour en sortir.
L’espace ouvert par la présence bienveillante et respectueuse du soignant atténue les projections sur le bébé, dévie sur le soignant les éléments négatifs et agressifs, soutient le parent dans sa fonction grâce à une identification du parent à cette personne. De même, on constate que le bébé s’appuie sur l’attention psychique de celle-ci. L’observateur fait le tri, atténue, transforme et clarifie le contenu des interactions, rendant ainsi la relation plus harmonieuse.
Les soins diffèrent suivant les pathologies interactionnelles et leur origine. En PPN, les réponses sont majoritairement ambulatoires, réalisées sous forme d’entretiens thérapeutiques, de consultations conjointes, d’observation thérapeutique à domicile ou sur le lieu de vie de l’enfant, de travail en réseau direct et indirect avec les professionnels de la petite enfance, de soins en psychomotricité. Les hospitalisations mères-bébés se sont multipliées ces dernières années à temps plein, à la semaine et à la journée.
Familles carencées :
La dynamique interactionnelle diffère suivant les difficultés parentales. Dans le cas des familles carencées, la défaillance parentale est au premier plan, avec une parentalité mal intégrée qui s’exprime par une discontinuité des échanges, une trop grande proximité lors des interactions ne respectant pas les besoins émotionnels et le rythme du bébé, enfin une défaillance des soins corporels. Les nourrissons sont en insécurité, vivent dans un monde chaotique et développent des stratégies pour survivre, mais ces défenses altèrent leur développement. Ils sont atoniques ou hypertoniques, vigilants, ont peu d’activité exploratoire du monde des objets et de leur corps.
Rapidement, ils manifestent des troubles de l’attachement bien observés dans les troubles de la régulation des affects.
Le traitement, très bien décrit par Lamour, se situe en premier dans l’accompagnement des parents : travail à domicile, observation thérapeutique. La stabilité du cadre, le maintien du lien, l’appui sur les compétences parentales, l’aide parallèlement apportée sur le plan social et quotidien (intervenantes sociofamiliales par exemple) rendent possibles des modifications relationnelles.
Durant les 2 premiers mois, des dispositifs liés à la PMI, comme celui mis en place par Rochette à Lyon, peuvent être préventifs d’une évolution apparemment répétitive et inéluctable.
Il s’agit de ritualiser ce passage et de soutenir ainsi ce travail de naissance par une métabolisation-transformation du vécu complexe du post-partum grâce au groupe. « Ces groupes soutiennent le travail psychique de la mère et la croissance psychique du bébé en créant les conditions d’une relance fantasmatique et identificatoire via le groupe notamment à travers les phénomènes de départicularisation du vécu, de diffusion des anxiétés et de diffraction sur les soignants ».
Il est cependant très difficile de faire face aux fréquentes crises que ces familles traversent. Elles mettent à mal le travail en réseau, et la cohérence est toujours à maintenir et même à rétablir, aidés par l’analyse des projections et des clivages vécus puis agis par les professionnels ; ceci pour prévenir les lâchages, les ruptures et les séparations répétitives infligées à ces enfants.
Toutes les autres formes de soins peuvent être envisagées suivant les manifestations constatées : groupes mères-bébés, suivi psychomoteur…
Mère psychotique :
Les bébés dont la mère est psychotique et qui n’ont pas de suppléances intrafamiliales (père, grand-mère…) sont soumis à une autre forme d’interaction. Durant les 40 premiers jours de vie de l’enfant, il n’est pas rare que la mère offre un contenant de qualité en fournissant une fusion qui satisfait les deux partenaires. Les signes commencent à apparaître dès que le bébé commence à s’éveiller, à entrer dans une relation avec une ébauche d’individuation.
Les observateurs montrent que les interactions visuelles sont difficiles dans ces cas. La mère n’entre pas dans l’échange de regard ou son regard est ailleurs, le bébé répond alors rapidement par l’évitement afin de se protéger du monde interne maternel. Nous constatons et favorisons le fait que le bébé s’appuie sur le regard du soignant familier lors des hospitalisations ou lors des entretiens thérapeutiques. À l’absence d’échange mutuel s’associent des paroles dont la modulation n’est pas liée au contexte, elle est souvent répétitive et ne s’accorde pas aux échanges qui passent par d’autres canaux. Le plus souvent, les interactions vocales sont pauvres. Le portage, les interactions corporelles ne sont pas en harmonie avec les autres interactions dès lors qu’il s’agit d’autre chose que d’avoir le bébé contre soi. Le bébé glisse sur les genoux maternels, la tête bascule hors des bras. L’enfant doit s’adapter et souvent il le fait. Il sait attendre, être passif, se mouler à sa mère, ne pas être intrusif à son égard mais à quel prix ! Le soignant déploie sa fonction d’arrière-plan ou d’enveloppe afin d’atténuer ces phénomènes. Parfois, à l’inverse, le rapproché est intolérable et le bébé est mis à distance. Dans ce cas, l’alerte est plus rapide et mène à une décision de soins plus intense, de relais ou à l’extrême de placement.
La question qui se pose alors est celle de la reconnaissance ultérieure des émotions par le bébé et le travail des soignants se fait autour de ce dialogue des émotions au moyen de l’attention psychique portée dans l’observation thérapeutique.
L’élaboration des représentations des pulsions, l’organisation des affects et la mise en sens des émotions sont la base de l’action thérapeutique. Lors des hospitalisations mère-bébé, les soignants s’attachent à cette fonction contenante autour du bébé et de sa mère afin qu’il développe ses compétences et que s’organise son fonctionnement mental à travers les échanges corporels. Le psychomotricien fait un travail conjoint avec une infirmière puéricultrice ou une infirmière référente de la dyade pour un travail progressif de reconnaissance et de soutien à l’individuation du bébé à travers des ateliers massages ou des ateliers « bébé » avec les mamans. Le père, quand il peut être présent, participe à ces efforts de triangulation.
Dépression maternelle :
Lorsque les mamans sont plongées dans une dépression, le premier temps est celui de la protection du bébé et de sa « revitalisation » narcissique par les soignants référents. La maman demande le plus souvent un relais que le bébé cherche d’ailleurs. Toute la délicatesse réside dans le fait de restituer le lien aux deux partenaires. La mère est dans un retrait parfois complet vis-à-vis de son bébé, « au mieux » l’accordage affectif est discordant. L’enfant se contente du minimum et se retire de l’interaction, comme il se retire de son corps en devenant atone.
Lorsque nous intervenons précocement ou qu’un relais a été fourni par la famille, le bébé montre vite des compétences, se réanime avec plaisir et il est souvent prêt à renouer avec sa mère dès que l’état de celle-ci s’améliore.
Relations parents-bébé pathogènes :
Enfin, nous avons à faire face à des relations parents-bébés qui restent pathogènes quoi que nous fassions et sans placement possible ou souhaitable de l’enfant. Le travail sur la relation se poursuit mais ne suffit manifestement pas. Une action directe auprès du bébé parallèlement au travail thérapeutique sur la relation, aux soins portés à la mère, s’avère alors nécessaire. Dans ce domaine, l’évaluation du fonctionnement du bébé est une composante essentielle du travail thérapeutique et préventif. Le bébé est notre baromètre de la relation, nous sommes à son écoute, nous lui portons attention. Cette évaluation exige une clinique très précise afin de ne pas perdre de vue l’objectif premier qu’est le développement du bébé. L’état maternel, le discours de la femme, des adultes autour et leur comportement font trop souvent écran à ce qui se passe entre les parents (la mère) et le bébé. Notre regard et notre attention sont souvent détournés, notre évaluation faussée et le travail thérapeutique mis à mal.
Souffrance du bébé :
Les signes de souffrance du bébé sont d’autant plus subtils que le bébé est jeune. Durant les 2 premiers mois, période fusionnelle, il est rare d’appréhender des signes du nourrisson et de la relation qui nous est peu accessible. Nous avons à construire une clinique des 2 premiers mois afin d’assurer une meilleure prévention.
Le corps et le langage corporel du bébé sont les véritables voix de cette souffrance possible vécue dans la relation. L’évaluation des signes repose sur la lecture des observations avant toute appréciation, toute critériologie. Dans ces observations, nous puisons autant d’éléments propres à nous inquiéter que propres à soutenir la relation et le bébé dans leurs ressources et leurs compétences. C’est pourquoi, nous préférons privilégier le récit aux échelles d’évaluation qui obturent parfois les capacités de chacun. Évaluer les capacités du nourrisson, les relations qu’il a avec ses parents et son environnement, évaluer la parentalité font partie intégrante de la PPN, évaluer-soignerprévenir est une triade qui fonctionne simultanément et dont les termes ne peuvent être facilement dissociés.
Nous souhaitons que l’approche thérapeutique qui s’appuie sur le développement du bébé suivant ses propres ressources soit renforcé en PPN. L’institut de Loczy a montré combien l’activité motrice autonome du bébé est importante pour l’évolution, et combien l’intrication psyché et soma s’impose à nous à cet âge de la vie. Nous n’isolons pas ces bébés qui consultent ou sont hospitalisés avec leur mère (leurs parents), mais nous leur offrons des temps pour des interactions respectueuses de cette activité motrice libre sous l’attention de leur mère et/ou sous l’attention du soignant. Cet intérêt que nous portons très tôt à son activité motrice autonome, à ses temps et ses rythmes, à une présentation adaptée des objets, à l’environnement propice à susciter une sécurité interne de qualité est fait pour l’aider à son développement sensorimoteur, source de sa construction psychique.
L’observation du bébé favorise son activité libre sur laquelle s’élaboreront ses sensations et ses émotions, se différencieront des invariants d’où émergeront des représentations. Le bébé est intéressé par ses propres expériences, il perçoit sa capacité à les maîtriser et intériorise cette confiance dans la sécurité qui lui est offerte. Il pourra s’appuyer secondairement sur cette confiance dans ses capacités émergeantes.
Dans le cas de désordres, de désorganisations relationnelles mère-bébé, l’expérience de Pikler à Loczy est à prendre en considération. Des relais qui s’appuient sur ces capacités du nourrisson peuvent être mis en place de façon séquentielle soit dans les unités mères-bébés, soit en ambulatoire sur des temps de prise en charge en psychomotricité par exemple, mais aussi sous la forme de crèches thérapeutiques dont le concept serait à développer. Il est cependant clair que le but du soin et son terme ne sont pas d’établir une relation idéale mais de permettre une relation viable pour les deux partenaires, fût-elle atypique.
Placement provisoire :
Lors de désordres trop graves dans la relation parentale, les unités mères-bébés sont amenées à travailler dans le cadre d’ordonnances de placement provisoire prononcées par le juge pour enfant. La mesure est souvent confiée à l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Elle contient parfois une forme d’injonction de soin dans ces unités fixant ainsi un cadre précis de travail. Mais c’est parfois après un temps d’hospitalisation dans ces mêmes unités que la dimension pathogène de la relation et ses effets sur le bébé deviennent manifestes, obligeant à un signalement par le pédopsychiatre et éventuellement une décision de placement par le juge.
Une fois le placement effectué, nous nous sommes interrogés sur les effets particulièrement toxiques (et que nous constations sur les enfants plus grands en pédopsychiatrie) du maintien de certaines relations de mères envahies par des mécanismes psychotiques sur leur bébé. Nous avons mis en place une modalité de rencontres que nous appelons « médiations thérapeutiques » qui se déroulent dans l’unité mère-bébé en présence d’une infirmière. Ces médiations thérapeutiques offrent un contenant et une fonction de pare-excitation à la relation mère(père)-bébé. L’enfant prend appui sur le soignant dans la rencontre avec le parent. Le soignant restitue les manifestations du bébé aux parents sous forme accessible et reconnaissable par eux, et en retour atténue les projections parentales.
Ce travail s’est développé suivant des indications thérapeutiques précises en accord avec la justice ou l’ASE. Il a une double fonction : permettre la rencontre entre le(s) parent(s) et le bébé en atténuant au maximum les effets pathogènes, poursuivre les soins à la relation afin que la représentation parentale ne soit pas, chez l’enfant, source d’une angoisse ou d’un processus pathogène qui se poursuit bien au-delà du temps de la rencontre.
Pour certaines situations, le placement n’a pas de raisons objectives et pourtant les préoccupations sont bien là ; elles sont développementales pour le bébé, actuelles ou préventives face à des négligences, des discontinuités graves et des risques forts de maltraitance. Nous envisageons une formule innovante que nous nommons « crèche thérapeutique » qui s’appuie sur une élaboration de notre pratique (projet bipartite, pédopsychiatrie– PMI).
Les jeunes enfants qui profiteraient de cette formule sont dans des situations suffisamment fréquentes de troubles relationnels, de discontinuité dans l’accordage, de dysfonctionnements dans la mise en place des processus d’attachement, de carences de soins, de microruptures de l’attention, d’inadaptation.
Ces inadéquations dans les réponses provoquent des troubles chez l’enfant qui apparaissent a minima à partir de 2-3 mois, mis en évidence par une observation descriptive et participante très fine, en deçà des signes alimentaires habituels, des reflux gastro-oesophagiens, des pleurs excessifs, des insomnies et des tensions corporelles. Dès son quatrième mois, le bébé présente des signes que seule l’observation dans l’unité d’hospitalisation mère-bébé permet : absence de rassemblement des deux hémicorps, pauvreté de l’investissement des objets, évitement dans les échanges et plus clairement à partir de 6-8 mois absence d’investissement du bas du corps. Ces enfants n’ont pu construire un sentiment de sécurité, bloqués dans leur exploration par un autoagrippement, ils n’ont pas de jeu avec leurs pieds, ni de bascule, ni de possibilité de rester à se mouvoir sur un tapis, ils sont ligotés dans un siège et déjà dans des phénomènes excessifs de projections. La relation d’objet est pauvre, nous constatons une hypo- ou hypertonicité, une passivité, des troubles alimentaires, du sommeil, des pleurs incessants ou au contraire une absence d’expression. Vers 9-12 mois, l’enfant se présente déjà avec un retard des acquisitions ou une hyperactivité préjudiciable à la découverte des objets et au développement cognitif, un retard psychomoteur touchant souvent la partie inférieure du corps.
Ces situations surviennent alors même qu’un soin est instauré mais insuffisant soit en ambulatoire ou sur des périodes séquentielles. Le bébé se retrouve avec ses parents sur des durées assez longues sans médiateurs. Ces soins seraient à poursuivre en crèche thérapeutique afin de protéger le bébé sur des temps plus longs, dans un contexte l’autorisant à effectuer sa propre expérience de la motricité, à construire des liens substitutifs continus de qualité et sécures. Pour poursuivre la construction du lien avec les parents, au-delà des visites à domicile par le professionnel référent, il est prévu que les parents soient présents une demi-journée par semaine dans la crèche pour partager la vie avec leur enfant et l’équipe dans une expérience qui se vit en commun.
Travail sur la stabilité :
Le travail sur la stabilité se réalise en permettant à l’enfant d’expérimenter l’équilibre et le déséquilibre sans danger.
Pour ces bébés qui ont souvent vécu des tensions comme inhérentes à leurs sensations corporelles (portage inadéquat, soins discordants non conformes aux besoins du moment…), il est intéressant de susciter chez eux la capacité de se faire du bien, de rater un peu sans punition ou sans conséquence grave, réparer la déception, la douleur ou le chagrin produits, la capacité de faire pour soi plutôt que pour égayer l’autre ou atténuer son agressivité. L’organisation d’une telle crèche tient compte de ces objectifs : l’environnement doit être stable, on doit pouvoir y tomber sans se faire mal, expérimenter la motricité sans danger. Des zones de « solitude » sous le regard bienveillant des adultes, aménagées afin de favoriser le travail de pensée en particulier par l’usage des capacités motrices pour soi (mobilité, jeu moteur, manipulations, expérimentations…). Les apprentissages ne sont que secondaires et n’interviennent pas dans leurs formes premières, les enfants sont là sans idée d’activités d’éveil pour accumuler sous forme éducative des capacités cognitives ou des savoirs anticipés.
Émotions :
L’attention aux émotions de l’enfant, que ce soit sous forme de retrait, de colère, de manifestations digestives, de troubles du sommeil etc. permet de les atténuer et de les transformer en élément pensable mais sans interprétation, uniquement dans une capacité de les recevoir, de ne pas s’en éloigner, d’accueillir le chagrin, la dépression, le manque comme dans la vraie vie. Le chant, la respiration, la voix humaine peuvent être des médiateurs pour dire les émotions ensemble, découvrir, ressentir la beauté.
Fonction contenante :
La fonction contenante de la crèche est tout à fait essentielle pour ces enfants au vécu douloureux (dont ils ne reconnaissent pas même la douleur). Ils sont souvent dans la discontinuité, suspendus dans un vide psychique et parfois physique à travers le portage en sachant que ce qui se passe sur le plan psychique s’exprime par le corps et vice versa. Réguler les tensions, les successions d’évènements, lutter contre la discontinuité demandent le déploiement d’une fonction de contenance de qualité et celle-ci se met en place par la présence, la continuité, l’offre de point d’appui, le quotidien corporel : explorer le dedans et le dehors physique, c’est explorer les éprouvés, les émotions, le lâchage. S’installer dans les lieux est possible dans la durée et la répétition rassurante offrant un investissement stable, c’est enfin appréhender le déroulement du temps dans sa prévisibilité. Avant d’incorporer psychiquement une expérience, il faut la vivre dans un environnement sécurisant, qui favorise l’expérimentation, les allersretours, les hypothèses, la non-destructivité des faits et des émotions, s’autoriser des mouvements entre savoir et ne pas savoir sans être anéanti. Cette fonction de contenance aura besoin de temps pour agir positivement afin d’éviter que les bébés tiennent à leur vécu antérieur comme seul possible, comme seul vécu auquel ils s’accrochent dans la répétition, dans la nécessité qu’ils éprouvent à s’agripper sur du connu même destructeur pour leur épanouissement. L’utilisation des défenses rigides, de la répétition des schémas d’attachement, du gel des capacités sensorielles et motrices est un des obstacles majeurs, qui ne peut être modifié que dans ce contexte et avec la participation des parents afin qu’ils reconnaissent leur enfant comme le leur dans cette nouvelle modalité relationnelle.
Conclusion :
La PPN en est au début de son essor, elle doit poursuivre l’exploration du champ de la connaissance du bébé, en particulier sur ses 40 premiers jours. L’interaction affective s’exprime à travers des signaux minimes, perçus uniquement grâce à une observation effectuée par des professionnels particulièrement bien formés à cette technique. À chaque dyade, un langage corporel particulier et une découverte pour le professionnel. À chaque fois se pose la question de ce qui se passe pour ce bébé-là avec cette maman, ce papa, cet environnement précis.
Comment soutenir le parent dans sa relation au bébé, comment donner confiance au bébé en ses propres compétences ?
La PPN est complexe, elle est confrontée à la reconnaissance et aux soins portés à la relation qui se noue entre un bébé et ses parents, et parfois à la nécessité de tenir compte de la sensibilité du bébé, de ses angoisses qu’il exprime à travers son corps. Il faut pouvoir apporter à ce bébé un sentiment de bienêtre, restaurer sa sécurité, soutenir ses capacités et les restituer à ses parents pour qu’ils puissent se sentir soutenus par leur enfant.
Alimenter la relation et trouver une place à l’activité libre demandent à s’appuyer sur une observation attentive et respectueuse de la part du soignant qui acquiert une connaissance du fonctionnement intime de la dyade dont il a la charge. Donner à l’enfant les possibilités d’un attachement sécure à ses parents, soutenir les parents pour qu’ils puissent recevoir cet enfant, favoriser la relation dans ses modalités créatives seraient le pari de la PPN.