L’hémoptysie est un rejet de sang par la bouche, provenant de l’arbre respiratoire sous-glottique, en général lors d’un effort de toux.
C’est en général une urgence médicale. Elle nécessite une évaluation rapide de la quantité et du retentissement respiratoire chez des patients souvent porteurs d’une pathologie bronchopulmonaire connue.
Le plus urgent est d’évaluer l’importance de l’hémoptysie, ce qui est plus facile lorsque le médecin assiste à celle-ci. Une hémoptysie est jugée importante lorsqu’elle dépasse 500 mL.
Elle met alors directement le pronostic vital en jeu et peut nécessiter des soins en réanimation.
Le plus souvent de faible abondance, voire sous forme de filet de sang, elle constitue pratiquement toujours un sujet d’inquiétude et provoque une consultation médicale.
La quantité doit bien être précisée car souvent surestimée. Prendre des images concrètes est un bon moyen d’estimer la quantité : fond de verre, cuillère à café ou à soupe, permet souvent de relativiser et donne le temps d’adresser le malade directement dans un service d’accueil d’urgence où il sera pris en charge et où des mesures diagnostiques seront mises en oeuvre rapidement après avoir éliminé la nécessité d’une prise en charge en réanimation.
Les diagnostics différentiels sont les épistaxis d’origine ORL et les hématémèses d’origine digestive.
Les antécédents de saignements de nez ou d’écoulement pharyngé postérieur sont recherchés et les efforts de vomissements au moment du saignement peuvent corriger le diagnostic.
DIAGNOSTIC :
Évaluation de la quantité et du retentissement :
Cette évaluation permet d’orienter la conduite à tenir immédiate : débuter des mesures de réanimation ou plutôt une attitude diagnostique si l’état clinique du malade est stable.
Les signes cliniques d’insuffisance respiratoire aiguë sont prioritairement analysés : fréquence respiratoire, cyanose, tirage, prise de saturation au doigt, précédant la réalisation rapide de gaz du sang, qui permettent de juger de l’urgence vitale.
Le danger de l’hémoptysie réside davantage dans l’inondation de l’arbre trachéobronchique aboutissant à une détresse respiratoire que dans le choc hémorragique qui n’a pas le temps de se constituer ou, s’y associant, assombrit rapidement le pronostic immédiat, lors de la rupture d’un gros vaisseau dans l’arbre trachéobronchique.
Le sang provient le plus souvent de la circulation artérielle bronchique, par effraction comme dans un cancer bronchopulmonaire. Il peut également résulter d’une augmentation de pression vasculaire à l’origine d’une extravasation de sang dans le secteur alvéolaire comme dans l’oedème pulmonaire cardiogénique, ou encore résulter de rupture de la barrière alvéolocapillaire par des mécanismes immunologiques lors de vascularites (maladie de Wegener, périartérite noueuse, etc.) ou de connectivites (lupus érythémateux systémique, etc.)
L’aspect est également important. Le sang artériel bronchique est rouge, rutilant, aéré. Il peut être pur ou accompagné de pus. Un crachat hémoptoïque, défini par la présence de filets de sang dans un crachat chez un malade sans antécédent respiratoire dans un contexte de bronchite infectieuse, n’a pas la même signification et le même degré d’urgence que chez un malade porteur d’une caverne tuberculeuse séquellaire colonisée par un aspergillome ou un malade ayant une mucoviscidose.
L’anamnèse est donc la première étape importante devant un malade présentant un premier épisode d’hémoptysie.
Les antécédents de mucoviscidose ou de cancer pulmonaire sont en général connus, mais il faut apporter une attention particulière aux antécédents de tuberculose, qui peuvent parfois être anciens. L’interrogatoire recherche des symptômes pouvant faire évoquer une dilatation des bronches méconnue : antécédents d’infections respiratoires, etc.
Examens complémentaires :
Les examens complémentaires comportent une radiographie de thorax, complétée d’une tomodensitométrie (TDM) thoracique avec injection de type angioscanner si une embolie pulmonaire est suspectée ou avec des coupes millimétriques si le diagnostic d’une maladie parenchymateuse pulmonaire, de type dilatation des bronches, est suspecté.
La TDM permet de visualiser une ou des opacités d’allure tumorale, une opacité pneumonique, une embolie pulmonaire, des malformations artérioveineuses.
Le plus souvent, ils sont complétés d’une fibroscopie bronchique selon les orientations de la tomodensitométrie et permettent d’orienter le côté et/ou l’origine du saignement. La présence d’un caillot est respectée, car assurant l’hémostase au cours d’un examen qui peut aggraver par luimême le saignement. En cas d’insuffisance respiratoire, la fibroscopie n’est pas réalisée. La recherche systématique de mycobactérie à l’examen direct de l’aspiration bronchique et de l’examen cytobactériologique des crachats les trois jours suivant la fibroscopie bronchique est réalisée.
Enfin, il faut signaler que la réalisation de biopsies bronchiques au cours d’une fibroscopie à visée diagnostique pour tout autre symptôme peut être à l’origine d’hémoptysie, en général minime, et dans tous les cas, spontanément réversibles en 24 ou 48 heures. Si ce n’était pas le cas, le patient devra consulter en urgence.
ÉTIOLOGIE :
Les principales étiologies sont résumées dans l’encadré 1.
Encadré 1. Étiologie des hémoptysies
Cancer bronchique
Tuberculose
Dilatation des bronches, mucoviscidose
Aspergillome
Pneumopathie infectieuse
Bronchite infectieuse
Malformations vasculaires
Traumatismes thoraciques
Biopsies bronchiques (fibroscopie)
Insuffisance cardiaque
Hémorragies intra-alvéolaires (lupus, maladie de Wegener, syndrome de Goodpasture)
L’insuffisance cardiaque gauche peut entraîner une hémoptysie par l’intermédiaire d’une hémorragie intra-alvéolaire, et se compliquer de crachats rosés, que l’on peut rencontrer au cours de toutes les hémorragies intra-alvéolaires.
Par ailleurs, l’embolie pulmonaire peut s’accompagner d’hémoptysie. Elle est rarement le signe inaugural. En effet, elle résulte de la formation de l’infarctus pulmonaire succédant à l’obstruction artérielle pulmonaire par un caillot fi brinocruorique.
Elle fait généralement suite dans les jours suivants à la douleur thoracique classiquement de type pleural, inhibant l’inspiration profonde et la dyspnée. Elle est en général de couleur sombre.
La présence d’angiomes cutanéomuqueux associés à un souffle thoracique vasculaire systolodiastolique évoque le diagnostic de fistule artérioveineuse dans le cadre d’une maladie de Rendu Osler.
TRAITEMENT :
En cas d’hémoptysie massive, la conduite à tenir dans un premier temps, vise à assurer les fonctions vitales avec une oxygénation immédiate pour maintenir une saturation périphérique en oxygène supérieure à 92 %, si l’hémoptysie est importante. En attendant les mesures de réanimation, la mise en décubitus latéral du côté de l’origine du saignement, connue ou suspectée, tente d’éviter l’inondation sanguine du poumon controlatéral. Une perfusion doit rapidement être installée avec le prélèvement d’un groupe sanguin et la recherche d’agglutinines irrégulières.
L’intubation peut être nécessaire et vise à réaliser une intubation sélective du côté sain afin de le protéger de l’inondation sanguine.
Après avoir assuré l’oxygénation, des manoeuvres sont entreprises afin de tarir le saignement.
L’utilisation de drogues vasopressives ( vasopressine) peut permettre d’arrêter le saignement. Si elle s’avère insuffisante ou le risque de récidive dangereux chez un malade insuffisant respiratoire, l’embolisation artérielle bronchique peut s’avérer nécessaire. Enfin, une pneumonectomie d’hémostase peut être envisagée en dernier recours avec un risque opératoire important.
CONCLUSION :
En conclusion, l’hémoptysie est un symptôme toujours inquiétant et nécessite une évaluation du degré d’urgence de la prise en charge. Les diagnostics les plus fréquents sont dorénavant les carcinomes bronchopulmonaires qui ont détrôné, par rapport aux séries cliniques les plus anciennes, la tuberculose. L’absence de cause retrouvée d’hémoptysie est une situation loin d’être rare, entre 10 et 30 % des cas, et doit inciter à une surveillance radiologique et clinique régulière chez les malades, notamment chez les fumeurs.
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