Traitement anticoagulant

Attention :

• Toute héparinothérapie nécessite un contrôle de la numération plaquettaire deux fois par semaine.

• Un relais précoce par antivitamines K (AVK) diminue le risque de thrombopénie.

• Une thrombopénie sous héparine doit être confirmée in vitro (immuno-allergie contre-in­diquant définitivement l’héparine, sauf situations exceptionnelles).

• La surveillance des AVK repose sur l’évaluation de l’International Normalized Ratio (INR) et non plus le taux de prothrombine (TP), qui varie selon les réactifs.

• Bien connaître les substances interférant avec les antivitamines K, ne pas hésiter à contrôler l’INR.

• Evaluer le ratio bénéfice/risque du traitement par AVK selon le terrain.

Traitement anticoagulant
Traitement anticoagulant

Héparines de bas poids moléculaire (HBPM) :

Elles sont obtenues par fractionnement de l’héparine et ont une activité anti-Xa (antithrombo­tique) sans activité anticoagulante hémorragipare (surtout anti-IIa).

Elles ont des indications prophylactiques et curatives, selon la posologie ou la spécialité. Le risque de thrombopénie est moindre que sous héparine non fractionnée (HNF).

Contre-indications :

— Manifestations hémorragiques, lésion organique susceptible de saigner.

— Ulcère digestif évolutif.

— Accident vasculaire cérébral hémorragique (donc tomodensitométrie préalable devant tout AVC).

— Péricardite aiguë.

— Endocardite aiguë, sauf sur prothèse mécanique.

— Antécédent de thrombopénie sous héparine.

— La prudence est de mise en cas de lésion de la choriorétine, d’insuffisance rénale ou hépa­tique, d’HTA non équilibrée.

Utilisation prophylactique :

Ordonnance n° 1 : risque thrombo-embolique faible

LOVENOX [énoxaparine sodique] 2000 UI, ou INNOHEP [tinzaparine sodique] 3500 UI, 1 injection sous-cutanée par jour.

— Numération plaquettaire préalable ++, puis 2 fois par semaine.

Ordonnance n° 2 : risque thrombo-embolique majoré (cancer, antécédents thrombo-emboliques)

INNOHEP [tinzaparine sodique] 3500 UI, 1 injection sous cutanée par jour.

— Même surveillance plaquettaire.

Ordonnance n° 3 : risque thrombo-embolique élevé

LOVENOX [énoxaparine sodique] 4000 UI ou INNOHEP [tinzaparine sodique] 4500 UI, 1 injection sous-cutanée par jour.

— Même surveillance plaquettaire.

Utilisation curative dans le traitement des thromboses veineu­ses profondes :

Ordonnance :

— En une seule injection par jour : FRAXODI [nadroparine calcique] 0,1 ml/10 kg ou INNOHEP [tinzaparine sodique] 175 UI/kg.

— Surveillance des plaquettes 2 fois par semaine.

— La surveillance de l’activité anti-Xa plasmatique peut être nécessaire surtout si insuf­fisance rénale, poids atypique, inefficacité clinique du traitement, hémorragie. Celle-ci doit se situer entre 0,5 et 1 UI anti-Xa/ml. Pour INNOHEP [tinzaparine sodique] spé­cifiquement, l’activité anti-Xa plasmatique ne doit pas dépasser 1,8 UI antiXa/ml.

— Commencer le plus tôt possible les AVK pour pouvoir équilibrer l’INR avant le 10ème jour d’héparinothérapie +++.

Utilisation curative dans le traitement de la fibrillation atriale et du flutter atrial récemment découverts (en attendant l’efficacité des AVK) :

Ordonnance :

— Il faut DEUX injections par jour : LOVENOX [énoxaparine sodique] 1 mg/kg, deux fois par jour.

— Cette HBPM n’a pas l’AMM dans cette indication, mais est la seule HBPM utilisée dans des études portant sur l’anticoagulation des arythmies atriales.

Complications :

— Hémorragie pouvant exceptionnellement neutraliser le traitement par PROTAMINE (sulfate ou chlorhydrate), dose pour dose, de préférence en plusieurs injections.

— Hématome au point d’injection : en rapport avec la purge de la seringue, non nécessaire.

— Ostéoporose en cas de traitement prolongé sur plusieurs mois.

— Nécrose cutanée au point d’injection : arrêt du traitement, relais par AVK.

— Embolies de cholestérol (rares) : apparition d’un livedo réticulaire sur les jambes, d’orteils pourpres douloureux sans refroidissement des extrémités, parfois d’une insuffisance rénale : arrêter immédiatement le traitement.

— Thrombopénie immuno-allergique +++ : interrompre l’héparine dès une baisse de 30 % des chiffres initiaux ; contrôler immédiatement le chiffre des plaquettes pour confirmation ; si confirmation, relayer immédiatement par AVK et anti-agrégants plaquettaires (durant le temps nécessaire à l’équilibration des AVK).

— La confirmation biologique de l’immuno-allergie est nécessaire (laboratoires spécialisés).

Antivitamines K (AVK) :

— Action au niveau hépatique entraînant une diminution des facteurs II, VII, IX et X, et des protéines C et S.

— Trois spécialités utilisées : PREVISCAN, SINTROM et MINISINTROM (équivalent à 1/4 de cp de SINTROM), COUMADINE.

— L’utilisation du PREVISCAN ou de la COUMADINE paraît préférable : demi-vie plus lon­gue, une seule prise par jour, INR stable, doses relativement fixes selon le patient ; contrepartie : rémanence plus longue de l’effet AVK.

— Il ne faut pas faire de doses de charge.

— L’équilibration est rarement atteinte avant une dizaine de jours de traitement.

— La prise du soir permet une correction immédiate de la dose journalière, en fonction de l’INR effectué le matin même.

Contre-indications :

— Celles des héparines.

— Plus : la grossesse et l’allaitement, l’éthylisme, le contexte psychologique inapte à une bonne compréhension et observance.

Interactions (médicamenteuses, non médicamenteuses) :

Liste longue et non exhaustive.

Contre-indications des injections intramusculaires +++ (voie sous-cutanée possible), des injec­tions intra-articulaires +++.

Nécessité de contrôler l’INR pour ajustement de la dose.

Potentialisation :

– aspirine, AINS, TICLID (contre-indiqué),

– CORDARONE,

– statines, fibrates,

– inhibiteurs de la pompe à protons et cimétidine,

– hormones thyroïdiennes,

– fluconazole, miconazole, kétoconazole,

– fluvoxamine,

– allopurinol,

– antibiotiques à large spectre, sulfamides antibactériens et quinolones.

Diminution de l’effet :

– pansements gastro-intestinaux, charbon,

– laxatifs lubrifiants,

– QUESTRAN,

– barbituriques, carbamazépine, phénytoïne,

– rifampicine, griséofulvine,

– aliments riches en vitamine K : choux, céréales, brocolis, carottes, crudités, abats.

Mise en route du traitement :

PREVISCAN 1 cp le soir.

— En même temps que la poursuite de l’héparine (chevauchement précoce, entre le 2ème et le 4ème jour).

— Le chevauchement dure au moins 4 jours.

— Contrôle de l’INR 48 h plus tard et adaptation prudente de la dose (par 1/4 de cp).

— Contrôles fréquents de l’INR dans les premières semaines, ensuite 1 fois par mois.

— Arrêt de l’héparine dès que l’INR-cible est atteint.

INR-cibles :

— Chez le sujet très âgé en AC/FA, un compromis entre le risque hémorragique et le risque thrombotique peut être obtenu en amenant l’INR entre 2 et 2,5.

— En cas de prothèse mécanique de dernière génération et en position aortique, en l’absence de facteur de risque thrombo-embolique, l’INR cible est de 2 à 3.

Traitement anticoagulant

Surveillance :

Ordonnance :

— Faire une prise de sang pour TP et INR une fois par mois, davantage si nécessaire selon avis médical, qsp X mois

— Ne prendre aucun médicament sans avertir le médecin.

Education du patient +++ :

utilité du traitement, risques, sports et activités contre-indiqués, interactions avec certains trai­tements en automédication, port d’une carte/carnet de traitement avec report des INR et des doses, contrôles au moindre doute.

Cas particulier du traitement antithrombotique dans la fibrillation atriale :

— La fibrillation atriale et le flutter atrial ont le même potentiel emboligène (d’ailleurs, ils alternent souvent chez un même patient).

— Les formes paroxystique et permanente ont également le même potentiel emboligène

— le score CHADS2 stratifie le risque thrombo-embolique d’un patient et permet de choisir le traitement anti-thrombotique le plus adapté.

— Ceci dit, d’autres éléments tels la taille de l’oreillette G à l’échographie, l’existence d’une val­vulopathie mitrale, entrent aussi en considération… Laisser le spécialiste décider du traitement le plus adapté.

Score CHADS2 : Additionner les points

Critères de calcul du score Points

Age > 75 ans 1

HTA 1

Diabète 1

Insuffisance cardiaque 1

ATCD d’accident vasculaire cérébral transitoire ou constitué

ou d’embolie périphérique 2

Traitement antithrombotique recommandé :

Score CHAD2 = 0 : aspirine 100 à 325 mg par jour

Score CHADS2 = 1 : aspirine 100 à 325 mg par jour ou antivitamines K

Score CHADS2 > 1 : antivitamines K

Préparation à une cardioversion électrique : antivitamines K (le choc électrique est lui-même thrombogène)

Ainsi, il n’est pas erroné de laisser un patient de 65 ans qui fait de la fibrillation atriale pa­roxystique « sur coeur apparemment sain » sous aspirine … Et, en dehors de contre-indications absolues, de mettre un patient de 84 ans, hypertendu équilibré qui fait de la fibrillation atriale paroxystique, sous AVK …