Dépistage du cancer de la prostate

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POURQUOI ?

Selon des statistiques de 2000, le cancer de la prostate est le cancer masculin le plus fréquent (40 000 cas par an), et la deuxième cause de décès par cancer chez l’homme (10 000 décès par an). Il survient en majorité au-delà de 50 ans.

Dépistage du cancer de la prostate
Dépistage du cancer de la prostate

Comme pour tout cancer, la découverte du cancer à un stade très précoce, où la maladie a toutes les chances d’être encore localisée à la prostate, offre les meilleures chances de guérison, grâce par ailleurs à des progrès importants dans la prise en charge thérapeutique dont l’efficience est maintenant avérée.

L’avènement d’un marqueur spécifique de la prostate (mais pas spécifique du cancer) a été une avancée considérable qui, dans la majorité des cas, permet d’évoquer le diagnostic à un moment très précoce de l’histoire naturelle du cancer de la prostate. Avant le PSA (antigène spécifique de la prostate), 80 % des cancers étaient diagnostiqués à un stade avancé ou métastatique. Depuis le PSA, la proportion s’est inversée en faveur des cancers localisés.

Le principe du dépistage est donc de détecter le cancer chez un patient indemne de symptômes, afin de lui offrir les meilleures chances d’en guérir.

Tableau I. Probabilité de cancer selon les différentes valeurs seuil.
Tableau I. Probabilité de cancer selon les différentes valeurs seuil.

COMMENT ?

Le dépistage est basé sur l’association du toucher rectal et du dosage du PSA.

Le dosage du PSA permet d’orienter vers le diagnostic 9 fois sur 10, le toucher rectal demeurant un élément indispensable : en effet, le toucher rectal peut être anormal et révélateur du cancer alors que le PSA est normal.

La norme supérieure du PSA retenue pour évoquer le diagnostic de cancer de prostate est de 3 ng/mL (European Association of Urology).

Cependant la controverse existe sur la valeur seuil effective, sachant que le PSA est également le reflet de l’hypertrophie bénigne de la prostate et de la prostatite associée, éléments dont il faut tenir comte dans l’interprétation du dosage.

Le dosage du PSA libre, rapporté au PSA total, exprimé en pourcentage, permet d’affiner relativement la sensibilité de ce marqueur biologique, sans toutefois être réellement spécifique, la prostatite ou l’atrophie des glandes prostatiques pouvant donner un abaissement du pourcentage sans qu’il y ait de cancer associé. La valeur de ce rapport en dessous de 10 % est cependant nettement suspecte.

De même, la vélocité du PSA, appréciée sur les dosages successifs annuels, a une valeur indicative si l’augmentation annuelle du PSA dépasse 0,75 ng/mL/an. Toutefois, à 50 ans, cette valeur peut être abaissée à 0,40 ng/mL/an.

QUI ?

La question, à double entrée, est essentielle : c’est celle de la définition de population à risque d’apparition précoce du cancer (formes héréditaires et familiales) d’une part, et celle du risque de surtraitement de cancers non significatifs à faible risque évolutif dans l’espérance de vie attendue, d’autre part.

En effet, l’histoire naturelle du cancer de la prostate fait qu’entre le moment de l’initiation du cancer et le décès éventuel, plusieurs décennies peuvent se passer. Tout dépend donc du moment où le diagnostic est fait : s’il survient « trop » tôt, au moment de l’apparition des premières cellules cancéreuses, le terme évolutif est très loin, et le traitement, certes efficace, n’apporterait que le risque d’effets secondaires et séquelles urinaires, sexuelles ou digestives grevant la qualité de vie du patient. Il est cependant bien difficile aujourd’hui de savoir effectivement à quel moment le diagnostic est fait pour un patient donné quand les biopsies prostatiques montrent un cancer de très petite taille, dans la mesure où le PSA permet d’avancer la date du diagnostic de plusieurs années. Le praticien doit alors se poser la question d’un cancer non significatif, pour lequel une surveillance seule pourrait convenir. Les recherches dans ce do maine se font vers des marqueurs spécifi ques qui indiqueraient l’évolutivité tumorale, aujourd’hui en cours d’évaluation.

On admet cependant que le diagnostic de cancer de prostate dans le cadre moderne du dépistage se fait le plus souvent dans une fenêtre où la maladie est significative et localisée à la glande prostatique, et que le risque d’une évolution au-delà des ressources thérapeutiques existe après 10 ans de recul, terme avant lequel tous les traitements, quels qu’ils soient, seront équivalents.

Le risque de morbidité et le coût, au sens large, d’un traitement du cancer ne sont pas justifiés quand existent d’autres causes probables de mortalité que le cancer de prostate. À titre d’exemple, il est admis qu’à 100 ans, pratiquement tous les hommes sont porteurs d’un cancer de prostate, mais que 3 % seulement risquent d’en mourir, alors qu’à 50 ans ce risque est de 75 %.

C’est pourquoi il est d’usage de commencer le dépistage à partir de 50 ans, et de ne pas l’envisager après 75 ans. Cette limite « maximale » de 75 ans ne doit pas être absolue, la date de naissance n’étant qu’un reflet approximatif de l’état général et de l’espérance de vie. Il est probable que cette limite évoluera dans le temps compte tenu de l’augmentation prévisible de l’espérance de vie au rythme de 1 an tous les 4 ans. Aujourd’hui, à 75 ans, l’espérance de vie en moyenne est de 14,8 ans.

Une population particulière est celle des formes familiales et héréditaires qui représentent 5 à 25 % des cas de cancers de prostate.

Les formes héréditaires se définissent comme l’atteinte de 3 cas au moins de cancer de prostate identifiés chez les parents au 1er degré, 3 cas de cancer de prostate sur 3 générations dans la même branche familiale (paternelle ou maternelle), ou seulement 2 cas mais de survenue précoce, avant 55 ans. Elles représentent 5 à 10 % des cancers de prostate. Le risque de cancer de prostate est multiplié par un facteur 10 par rapport aux formes sporadiques.

Les formes familiales, ne répondant pas aux critères des formes héréditaires représentent 5 à 25 % des cancers de prostate, et le risque de cancer de prostate est multiplié par 3,5.

L’apparition des cancers de prostate dans ces familles est plus précoce, 5 à 10 ans plus tôt que dans les cas sporadiques. Cela justifie dans ce cas de proposer un dépistage à partir de 40 ans.

RECOMMANDATIONS :

Les recommandations de la communauté urologique (Association française d’urologie) sont de proposer le dépistage individuel du cancer de la prostate chez les hommes entre 50 et 75 ans, et à partir de 40 ans en cas de formes héréditaires ou familiales. Le dépistage inclut le toucher rectal et le dosage du PSA. Le rythme de dépistage est ensuite ajusté en fonction des résultats, soit annuel soit biannuel ou triannuel.

Ce dépistage individuel ne se conçoit que chez un patient informé des conséquences en terme de moyens diagnostiques, thérapeutiques, et des effets secondaires des traitements éventuels.

CONCLUSIONS :

Au-delà des polémiques sur la surdétection et le surtraitement, le dépistage permet aujourd’hui de détecter une majorité de cancers de la prostate à un stade de la maladie où la probabilité de guérison est très forte. Cette stratégie de dépistage efficace à l’encontre d’une maladie fréquente responsable d’un nombre important de décès, a cependant un coût, en terme individuel pour les patients (anxiété, examens répétés, retentissement potentiel des traitements sur la qualité de vie), et en terme d’économie de la santé (répétition des examens, coûts des traitements et de leur suivi). Il faut donc adapter la stratégie de dépistage individuel basé sur le dosage de PSA et le toucher rectal, afin de ne le proposer qu’aux patients à risque, tant de par leur histoire familiale que de par leur tranche d’âge et en fonction de leur espérance de vie conditionnée par la comorbidité.

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